Couvre-feu en France : une efficacité "limitée" contre la propagation du Covid-19
"Un couvre-feu strictement contrôlé avec des possibilités de dérogations limitées." Le 10 décembre 2020, face à l'augmentation inquiétante du nombre de contaminations dans le territoire, le Premier ministre Jean Castex annonce aux Français qu'il leur sera désormais interdit de quitter leur domicile après 20 h. Une mesure forte, pour limiter au maximum les interactions sociales, que le gouvernement décidera d'étendre un mois plus tard à 18 h sur l'ensemble du territoire.
Pourtant, si la rapide progression des cas redoutée avec l'arrivée du variant anglais n'a pas eu lieu, force est de constater que cette mesure n'a pas suffi. "Aujourd'hui, le nombre d'arrivées en réanimation ne baisse pas, ce qui prouve que cette mesure ne freine pas, ou du moins pas assez, l'épidémie", explique à France 24 l'épidémiologiste Catherine Hill. Le gouvernement a d'ailleurs dû se résoudre à décréter des confinements locaux le week-end et envisage des mesures plus strictes.
L'exemple guyanais
Le gouvernement le dit et le répète, il souhaite éviter un troisième confinement aux effets économiques désastreux pour la France. Pour autant, la saturation hospitalière constitue une ligne rouge à ne pas franchir. C'est dans ce contexte qu'a été instauré le couvre-feu dans l'Hexagone en décembre dernier.
Expérimenté après le confinement de mai 2020 en Guyane, le couvre-feu a coïncidé avec "une baisse importante du taux de transmission" dans ce territoire d'Outre-mer, a observé l'institut Pasteur dans une étude.
Si cet exemple est souvent mis en avant pour vanter l'efficacité de cette mesure, l'étude spécifie tout de même "qu'une approche ayant fait ses preuves en Guyane ne sera pas nécessairement efficace dans le contexte métropolitain". Une vision partagée par Jan Cédric Hansen, médecin membre de la Société française de médecine de catastrophe : "La Guyane est un territoire isolé avec des portes d'entrée réduites. La circulation longue distance y est bien moindre et il a été observé que la majorité des interactions avaient lieu le soir. Tous ces facteurs constituent des biais importants lorsqu'il s'agit de transposer cette mesure dans l'Hexagone."
Une mesure qui "déplace le problème"
"Dans les 15 premiers départements où le couvre-feu à 18 h a déjà été mis en place, la hausse du nombre de cas y est deux, voire trois fois plus faible que dans les autres départements", expliquait le Premier ministre Jean Castex, le 14 janvier, pour justifier la généralisation du couvre-feu à 18 h. Si cette mesure apparait alors comme une solution miracle pour endiguer la pandémie, Santé publique France a depuis largement relativisé ces résultats. Dans son rapport du 21 janvier, l'agence nationale de santé publique juge que le couvre-feu a "pu contribuer à l'amélioration de la situation épidémiologique" au même titre que d'autres facteurs comme "les comportements prudents de la population sensibilisée par des campagnes de communication locales".