Turquie : Erdogan condamne une décision «entièrement politique» de la CEDH en faveur du leader kurde Demirtas
Le Figaro:Le président turc Recep Tayyip Erdogan a violemment condamné mercredi 23 décembre l'arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) ordonnant la «libération immédiate» du leader kurde Selahattin Demirtas. «C'est une décision entièrement politique. (...) Demander la libération de celui qui est responsable de la mort de 39 de nos concitoyens relève d'une politique de deux poids deux mesures, c'est de l'hypocrisie», a martelé M. Erdogan.
Il faisait référence aux violentes manifestations qui ont fait des dizaines de morts en 2014 dans le sud-est de la Turquie, dont les autorités turques attribuent la responsabilité aux dirigeants du parti pro-kurde HDP, ce que ceux-ci nient. La CEDH a condamné mardi la Turquie pour la détention depuis 2016 de Selahattin Demirtas, exigeant sa libération «immédiate» et accusant Ankara de poursuivre «un but inavoué d'étouffer le pluralisme».
Ancien coprésident du HDP et un des principaux rivaux du président turc, M. Demirtas est accusé par Ankara de «terrorisme» et risque jusqu'à 142 années de prison.
Pour le président turc, la Cour de Strasbourg a rendu un verdict «d'exception», en examinant le cas de M. Demirtas avant que celui-ci n'ait épuisé les voies de recours interne, une condition pour déposer une requête au CEDH. Or pour la CEDH, le jugement en cours de M. Demirtas devrait être vu comme une prolongation d'un premier procès pour lequel la Cour avait déjà statué en 2018 et demandé sa libération, en vain.
«La CEDH doit savoir qu'elle défend une personne en lien avec le PKK», a dénoncé M. Erdogan en référence au parti des Travailleurs du Kurdistan (PKK), classé «terroriste» par Ankara et ses alliés occidentaux. «Cette personne est coupable aux yeux de notre nation non à cause de ses discours politiques, mais parce qu'il n'a pas pu se distancier du terrorisme», a-t-il ajouté.
Les milieux prokurdes, en particulier le HDP, font l'objet d'une répression implacable depuis plusieurs années en Turquie. Le pouvoir turc accuse le HDP d'être une «vitrine politique» du PKK, une accusation rejetée par le parti prokurde qui se dit victime de répression en raison de sa farouche opposition au président turc.