Les Algériens réclament du changement, le président encore malade
La première apparition du président algérien Abdelmadjid Tebboune depuis son transfert en Allemagne, où il a été hospitalisé fin octobre après avoir contracté le coronavirus, visait à rassurer un pays qui attend depuis longtemps de profondes réformes politiques.
Mais dans les rues d'Alger, c'est une réaction d'impatience qui a accueilli un message vidéo de cinq minutes diffusé dimanche dernier dans lequel le président annonçait qu'il serait absent pendant trois semaines supplémentaires.
La plupart de nos demandes attendent toujours une réponse", déplore Ahmed Abbachi, membre du mouvement de contestation populaire Hirak qui a entraîné la mise à l'écart de l'ancien président Abdelaziz Bouteflika en 2019 et qui réclame le renouvellement de l'élite politique au pouvoir depuis l'indépendance.
Âgé de 75 ans et grand fumeur, Abdelmadjid Tebboune est apparu très amaigri dans la vidéo, la première depuis son transfert en Allemagne.
L'absence de photos ou de vidéos du mandataire avait suscité des rumeurs sur son état de santé réel, les bulletins d'information officiels assurant que le président se portait bien.
L'absence d'Abdelmadjid Tebboune a ravivé les souvenirs de nombreux Algériens qui, face à la maladie d'Abdelaziz Bouteflika, ont passé de longues années sans gouvernail tandis que les factions rivales au sein de l'élite dirigeante se bousculaient pour imposer leur influence.
"Bouteflika était complètement incapable de parler, de marcher, et on nous répétait sans cesse qu'il était capable de diriger le pays", se souvient Antar Aissaoui, un plombier.
Le président Tebboune aura beaucoup à faire à son retour à Alger. Face aux faiblesses structurelles qui menacent l'économie du pays, à la chute des revenus du pétrole et du gaz qui mettent à mal les dépenses sociales, le gouvernement entend mener un programme de réformes économiques jugées nécessaires afin d'éviter une crise budgétaire, les réserves de devises étrangères s'étant épuisées de plus de moitié en cinq ans.
Le Hirak n'est cependant pas convaincu que les efforts d'Abdelmadjid Tebboune pour tourner la page de la contestation de 2019 porteront leurs fruits.
La pandémie de coronavirus a mis fin aux manifestations en mars dernier mais le référendum que le chef de l'Etat avait organisé en novembre dernier sur la réforme de la Constitution algérienne n'a attiré qu'un quart des électeurs inscrits.
"L'Algérie est confrontée à l'une des périodes les plus difficiles de son histoire. Des menaces nous entourent", affirme le professeur Rachid Chalabi, évoquant la crise politique interne, les menaces économiques et les conflits qui secouent toute la région.
"Tebboune fera face à ses plus grands défis après son rétablissement. Tout indique que le chemin vers la stabilité est encore long", estime quant à lui Djamel Taibi, un ingénieur de 37 ans.