Comment la France fait respecter l’embargo des Nations-Unies sur les armes en Libye
Partie de son port-base de
Brest (Finistère) le 18 septembre 2020, la frégate anti-sous-marine
(Fasm) Latouche-Tréville est de retour après deux mois et demi
de mission en Atlantique et, ce qui est moins courant pour un bâtiment
brestois, en Méditerranée.
Du 1er octobre au 7 novembre, la frégate
brestoise a en effet intégré l’opération
Irini de l’Union
européenne. Objectif : faire respecter l’embargo sur les armes à destination de
la Libye, imposé par les résolutions 2292 (2016) et 2526 (2020) du Conseil de
sécurité des Nations-Unies.
Deux bateaux
suspects
Aux côtés de trois autres
frégates européennes (allemande, italienne et grecque), le Latouche-Tréville a
réalisé 71 interrogations auprès des navires de commerces à destination ou en
provenance de la Libye, treize approches amicales et deux opérations de visite
pour suspicion de transports d’armes.
L’approche amicale (friendly
approach) dure seulement une trentaine de minutes, avec l’accord du
commandant du bateau. « Il permet surtout de partager les informations
et les impressions sur la zone, et de ressentir l’ambiance à bord, explique
le commandant du Latouche-Tréville, le
capitaine de vaisseau Patrick de Sevin. L’équipe est d’ailleurs souvent
reconnaissante envers notre action rassurante de gendarmes de la mer. »
Un drone
pour lever les doutes
La visite, elle (au sens
juridique du terme), dure bien plus longtemps : elle fait suite à la
caractérisation « d’un doute raisonnable » sur la présence
d’armes à bord (notamment grâce au survol de la cargaison et de l’équipage par
un drone aérien).
« Au lieu des six
personnes d’une approche amicale, cette fois douze marins spécialement formés (d’une brigade de 18) procèdent
à une fouille plus approfondie, sous l’égide de l’ONU et dans le cadre de la
convention de Montego Bay, après l’accord de l’État du pavillon, obtenu par
l’État-major opérationnel, basé à Rome (Italie). »
« La force
légitime de l’Europe »
Pendant les 40 jours de
mission du Latouche-Tréville au large de la Libye, cette fouille
minutieuse d’environ six heures, par une douzaine de militaires (équipés de
gilets pare-balles, casques lourds et fusils à pompe) s’est produite à deux
reprises : « Nous représentons alors la force légitime de l’Europe. »
La première fois, le bateau
était un porte-conteneurs : la fouille a consisté en l’ouverture aléatoire (et
la fermeture, conformément au droit marin) de plusieurs de ses boîtes
embarquées. Et le second, un vraquier de sacs de ciment, qui a dû ouvrir ses
trois cales.
Vitesse réduite
« Chaque fois, la visite
se fait alors que le bateau suspect réduit sa vitesse, par exemple de dix nœuds
à six nœuds pour un vraquier, précise le commandant. L’objectif n’est pas de faire perdre
du temps, et donc de l’argent, à l’équipage et à l’armateur, mais de faire
respecter le droit international. »