Soudan: les réfugiés tigréens disent être victimes d'expropriation par des milices
Fuyant les combats dans la province
éthiopienne du Tigré, des milliers de réfugiés - 38 000 selon
l'UNHCR - continuent d’affluer au Soudan. En parallèle de l’offensive
menée par les troupes de l’armée régulière, ils racontent avoir été victimes
des Amharas, l’ethnie voisine des Tigréens. Des milices et des groupes armés
voulaient s’approprier leurs terres.
Dans le camp de Hashaba, il suffit d’un
coup d’œil pour voir que beaucoup de réfugiés sont des paysans. De nombreux tracteurs
sont stationnés à côté des abris de fortune. « J’ai pris la fuite
sur mon tracteur car j’ai vu des gens dans le village se faire massacrer, des
jeunes égorgées, des femmes violées, raconte Mekonen Tigabo, qui possédait
quatre hectares de sorgho à Mai-Kadra. Les Fannos ont fait cela ».
Les Fannos en Éthiopie sont historiquement
des paysans qui prennent les armes. Aujourd’hui, « Fanno » désigne
aussi des groupes de jeunes Amharas nationalistes. Pour Mekonen, ils étaient
devenus de plus en plus menaçants. « Ces gangs d’Amharas disent que
toutes les terres qui s’étendent jusqu’à la rivière Tekezé sont à eux,
explique-t-il. Ils disent cela depuis longtemps. Mais cela s’est
intensifié depuis qu’Abiy Ahmed a été élu. Il les a poussés à revendiquer ces
territoires. Il n’y avait aucun conflit entre nous avant ».
Nettoyage ethnique
Un peu plus loin, un autre fermier,
Gebregziabher Gebremichael, raconte avoir lui aussi abandonné ses
récoltes. « Pour cette saison, on avait fini de récolter le
sésame, il ne restait plus que le sorgho, explique-t-il. Mais on
n’a pas eu le temps, ils vont tout prendre. Les Fannos ont déclaré la guerre
aux Tigréens pour les terres. Être Tigréen est devenu un crime à leurs yeux.
Leur but est de nettoyer cette région de tous les Tigréens ».
La région qui borde la rivière Tekezé
est connue pour ses terres fertiles. Aujourd’hui, le contrôle de cette terre
est devenue une pomme de discorde entre Tigréens et Amharas. Les
combats se poursuivent en Éthiopie, dans la région du Tigré. Les troupes
fédérales ont lancé le siège de la ville de Mekele, capitale de la province du
Tigré et bastion du TPLF (Front de libération du peuple du Tigré). Des tanks
ont été déployés en prévision du bombardement de la ville, a annoncé le
porte-parole de l’armée éthiopienne qui a lancé un ultimatum aux civils leur
demandant de quitter Mekele. De son côté, le TPLF a assuré que ses forces
tenaient bon et avaient commencé à creuser des tranchées.