Publié par CEMO Centre - Paris
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Au sud du Soudan, la sidération des réfugiés éthiopiens

dimanche 22/novembre/2020 - 09:48
La Reference
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Déjà 36 000 réfugiés… et l'afflux ne cesse pas. Le Tigré, au nord de l'Éthiopie, se vide de ses  habitants, et le Soudan, voisin, les accueille tant bien que mal. Depuis l'attaque, le 4 novembre 2020, contre des bases militaires éthiopiennes à Mekele et à Dansha, la région est sous les bombes. Addis-Abeba veut écraser le Front de libération du peuple du Tigré (FLPT) ; les civils, eux, sont sidérés.

Le photographe Ebrahim Hamid a documenté l'arrivée d'un flot de Tigréens dans le camp d'Um Rakuba, dans la province de Gedaref. Un camp récemment rouvert, qui, précise la légende de son reportage pour l'AFP, a accueilli par le passé des Éthiopiens fuyant la famine de 1983-1985.

En attendant l'aide humanitaire, et peut-être un sort meilleur, des familles sont logées sous des abris couverts de roseaux ajourés. Dans une de ces tentes de fortune, Ebrahim Hamid a su capter un instant de vie. "Une photo qui raconte un événement par défaut, qui est là pour raconter qu'on ne peut pas se rapprocher de l'information", précise Marie Sumalla, chef adjointe du service photo du Monde.

Un conflit sans images

L'armée éthiopienne et les milices qui l'accompagnent ont en effet imposé un black-out total sur le Tigré, raccompagnant à Addis les journalistes venus enquêter.

Ici, pas de tension dramatique, mais "un plan large qui donne à voir un contexte et un environnement". La trame végétale qui constitue le toit et les murs projette de petites taches de lumière, marquant les effets d'un soleil de plomb. Un soleil que le parapluie noir, au centre de l'image, rappelle, en miroir.

Le parapluie, ouvert, arrête le regard. Et nous invite à explorer les détails. C'est une image qu'il faut creuser.

Si elle illustre l'affluence, la photo d'Ebrahim Hamid évoque aussi la précipitation de la fuite. Pas ou peu de bagages, quelques bidons d'eau… Les déplacés ne paraissent pourtant pas être dans la pauvreté ou le dénuement.

On comprend bien ici que ceux qui sont en train de se déplacer sont des réfugiés malgré eux. On les voit dans une situation d'attente, comme si la situation ne devait pas durer.

Certains, dans la tente, essaient de se protéger du soleil, un tissu posé sur la tête. D'autres, dorment face au sol. Tous sont assis ou allongés, parfois vaguement séparés par des tissus suspendus, dont les couleurs dédramatisent encore le décor. Un petit groupe, assis en cercle, discute joyeusement à l'arrière-plan, un homme regarde dans le vide, au premier plan.

Dans cet espace clos, on sent la chaleur, on sent l'accablement. Mais pas le désarroi.

Une lueur d'espoir dans un contexte pour le moins inquiétant ? Qu'on ne s'y trompe pas, nuance Marie Sumalla. "Cette photo n'est qu'une partie d'un reportage sur le camp d'Um Rakuba. Un éditeur a choisi de la mettre en avant, mais le travail du photographe présente d'autres aspects."

Parmi lesquels, sans doute, le "défi logistique énorme", qu'a décrit jeudi le coordinateur résident de l'ONU à Khartoum. "Il nous faut d'autres camps", a précisé Babacar Cisse, esquissant les contours d'un drame humanitaire. Et pour cause : un responsable du Haut-Commissariat aux réfugiés, Axel Bisschop, a estimé aujourd'hui à "environ 200 000" le nombre probable de réfugiés à accueillir.


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