La guerre en Syrie est-elle finie ?
La face cachée du globe |Que se passe-t-il en Syrie ? La guerre, les guerres qui ont traversé le pays depuis neuf ans sont-elles finies ? Le conflit local, national, régional puis international, dont la première et principale victime est la population syrienne, se poursuit en sourdine.
Le
président syrien Bachar Al-Assad a réussi à se maintenir, mais il contrôle un
pays dévasté dont la moitié de ses citoyens sont déplacés, réfugiés ou exilés.
Quant au processus de négociations sous l’égide des Nations unies, il est dans
l'impasse.
L’heure
de la paix est encore très loin estime Hala
Kodmani,
journaliste à Libération.
Les combats ont-ils cessé en
Syrie ?
Aujourd’hui,
le régime avec l’appui de la Russie et de l’Iran a repris une grande partie du
territoire. Il n’y a plus vraiment d’enjeu. Cela dit, de petites guerres, de
petits conflits continuent. Il y a quelques jours et c’est régulier, Israël a
fait un raid contre des forces du régime iranien, à la frontière
syro-israélienne. Il y a une semaine, dix jours encore, le régime syrien a
refait une campagne de bombardements sur la dernière zone qui échappe à son
contrôle et qui est détenue par l’opposition dans le nord, dans la région
d’Idlib. On a encore quelques opérations qui sont menées contre le groupe État
islamique à l’est du pays, où il y a encore des forces américaines, des forces
russes, et encore aussi des milices. Les acteurs de la guerre sont encore et
toujours là.
Crise économique et crise alimentaire
Et rien n’est résolu ? Est-ce donc une
victoire militaire pour Bachar Al-Assad ?
Évidemment,
rien n’est résolu. Il n’y a pas de paix. Bien sûr, il y a une victoire
militaire sur le terrain, le régime syrien a reconquis. Il faut remonter à
2014-2015, avant l’intervention russe directe, il ne contrôlait plus que 20%
à 30% du territoire. Aujourd’hui,
il en contrôle entre 60 et 70%.
Maintenant,
le pays est en souffrance. Le peuple est presque au bord de la famine. Le
pays est complètement dévasté. Il n’y a aucune reconstruction en cours et la
moitié de la population n’est plus là où elle était il y a dix ans. Aujourd’hui, les
forces russes, la police militaire russe intervient dans les villages, dans les
villes en Syrie comme une force d’interposition, une force qui gère le pays
pratiquement. Quand on voit l’état du pays et de la population, toute la Syrie
est défaite.
Rappelons quelques chiffres : depuis
2010, près de 400 000 personnes ont été tuées, 5 millions déplacées ou
exilées principalement au Liban, en Jordanie et en Turquie. Et la
reconstruction du pays, qui va coûter entre 240 et 400 milliards d’euros, n’a
pas commencé ?
Le
premier euro n’est même pas encore arrivé. Pour l’instant, il y a des milliards
d’euros d’aides humanitaires qui sont en train d’aller aux camps de réfugiés
parce qu’il n’y a rien qui puisse faire revenir la population. Tout est
détruit. La sécurité des gens n’est pas garantie, les jeunes garçons notamment
sont tout de suite enrôlés dans l’armée. Donc, on est dans une situation de
blocage total, avec quand même, une dégradation des conditions de vie de la
population et l‘économie est à l’arrêt.
Qui pour stopper le régime de Bachar
Al-Assad ?
Aujourd’hui, dans quelle situation se
trouve l’opposition, existe-t-elle encore ?
L’opposition
principale est en Turquie, donc nécessairement sous influence turque. La
Turquie, l’un des acteurs extérieurs qui devrait être du côté de l’opposition,
n’agit en fait que pour ses propres intérêts, et a ses propres batailles en
Syrie. En plus, le fait de n’avoir abouti à rien, évidemment, décrédibilise
cette opposition.