Publié par CEMO Centre - Paris
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Attentats en France : «Les islamistes sont dans une dynamique de conquête»

vendredi 30/octobre/2020 - 11:35
La Reference
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Le politologue Antoine Basbous décrypte le contexte international dans lequel surviennent la décapitation de Samuel Paty à Conflans-Sainte-Honorine, le 16 octobre, et l’attaque au couteau de Nice, ce jeudi matin.

Le fondateur de l'Observatoire des pays arabes et politologue Antoine Basbous analyse la situation après les deux attentats survenus en France en l'espace de deux semaines, et les situe dans la séquence internationale particulière en cours.

Dans quel contexte s'inscrit cette nouvelle attaque de Nice ?

Nous sommes dans un contexte d'effervescence islamiste qui remonte à plus de trente ans. La décapitation de Samuel Paty à Conflans-Sainte-Honorine et l'attaque au couteau de Nice en sont un nouvel épisode. Les islamistes sont dans une dynamique de conquête et de séparatisme. Ils ne veulent pas que les « bons musulmans » fréquentent la société française. Cette effervescence est alimentée par le président turc, Recep Tayyip Erdogan, qui jette de l'huile sur le feu en essayant de faire de l'appel à l'ordre public de la France une attaque contre l'Islam. Il faut dire et répéter que les musulmans ont plus de libertés, notamment de conscience, en France, que dans leurs pays d'origine.

Le 29 octobre est la fête du mawlid, la célébration de la naissance de Mahomet. Cela peut-il avoir une signification avec l'attentat de Nice ?

Cette fête ne fait pas l'unanimité dans l'islam et n'a été inscrite dans les agendas islamiques que sur le tard. Est-ce que cela a une signification particulière? Peut-être. Peut-être aussi que l' imminence du reconfinement a poussé à l'acte avant que les rues ne se vident. Ce qui est sûr, c'est que Thabat, une agence proche d'Al-Qaïda, avait appelé en octobre au djihad individuel avec des modes d'expression violents qui n'ont pas besoin d'organisation, qui n'ont pas besoin d'être commandités depuis l'Afghanistan ou le théâtre syro-irakien. Cet appel a été pris au sérieux par le ministère de l'Intérieur qui a émis des recommandations aux préfets afin de protéger les lieux de culte pour la Toussaint et par les imams qui ont condamné l'assassinat de Samuel Paty.

Que penser des tweets de Mahathir Mohamad, l'ancien Premier ministre malaisien, qui estime que « les musulmans ont raison d'être en colère et de tuer des millions de Français pour se venger des massacres d'autrefois » ?

Ce qui est surprenant, c'est que l'islamisme asiatique a rarement été violent et peu au diapason avec l'islamisme oriental. Si un ancien chef de l'exécutif de la carrure de Mahatir adopte le discours de Daech, c'est inquiétant. Mais il est un baron de l'internationale des Frères muslmans, pilotée par Erdogan et le Qatar et qui attise la haine. Ces tweets sont une manifestation de solidarité idéologique et intellectuelle à ses alliés.

Pourquoi la France est-elle particulièrement visée par ces attaques ?

La France a cette particularité d'avoir un système laïc, ce qui n'est pas totalement compris dans le monde islamique. La laïcité est soit interprétée comme de la faiblesse, soit comme une forme d'anti-religion et d'opposition à l'islam. Par ailleurs, la France, qui a tordu le cou à l'Eglise à la Révolution, s'est montrée étonnamment souple avec la mosquée. L'affaire initiale des foulards de Creil en 1989, et l'absence de décision ferme et immédiate, a ainsi envenimé les choses avec ses débats interminables, au point de faire passer la France pour un pays anti-islamique.

Quelles solutions pour mettre un terme à cette frénésie terroriste dans le pays ?

Je crois que la fermeté est la première réponse, et que la vigilance est la deuxième. Tous ceux qui sont repérés comme de potentiels terroristes doivent être surveillés, voire expulsés. Il faut que nous soyons confiants dans nos valeurs. Il faudrait aussi faire un effort pour expliquer le concept français de laïcité et éviter les interprétations tendancieuses. Il faut notamment expliquer que la laïcité n'est pas contre la religion, mais pour la séparation de la foi et de l'Etat. En France, on peut être musulman sunnite, chiite, athée. On peut exercer sa foi, ou l'absence de sa foi. Cette pratique existe dans peu de pays musulmans, où l'autre est ostracisé car il est minoritaire.


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