Comment le gouvernement justifie l'introduction de l'arabe à l'école
Une mesure évoquée dans le cadre du projet de loi contre le séparatisme fait déjà bondir l’extrême droite et une partie de la droite: l’apprentissage de l’arabe à l’école. Mentionnée par Emmanuel Macron lors de son discours sur les “séparatismes” vendredi 2 octobre, la mise en place de cet enseignement en primaire fait son chemin depuis plusieurs années.
Ce dimanche 4 octobre dans le JDD, le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin, qui portera le projet de loi avec Marlène Schiappa, a dit tout le bien qu’il pensait de cette mesure, en utilisant un exemple personnel: “Quand j’étais enfant, mes copains, enfants de femmes de ménage comme moi et issus de familles portugaises ou espagnoles, apprenaient à l’école la langue de leurs parents. Mais mes cousins d’origine maghrébine n’avaient que la mosquée pour apprendre l’arabe”, observe le ministre.
“Réduire le pouvoir des religieux”
“Nous avons besoin de jeunes Français qui parlent aussi l’arabe, pour nos relations avec les pays dont c’est la langue, pour le commerce, pour conquérir les marchés, pour notre influence dans cette partie du monde”, poursuit-il, précisant que l’idée derrière un apprentissage labélisé éducation nationale est de “réduire le pouvoir des religieux”. Une déclaration qui colle en tout point avec celle faite dans la foulée par le ministre de l’Éducation nationale, Jean-Michel Blanquer, sur BFMTV.
“Nous devons avoir plus d’enfants qui apprennent l’arabe, puisque nous savons que s’ils ne le font pas dans l’école de la République, ou dans des structures périscolaires dont nous avons le contrôle, ils le font dans des écoles coraniques ou toute sorte de structures dont l’objectif principal n’est pas linguistique, mais religieux”, a déclaré le ministre, souhaitant que ces enseignements se fassent via des “intervenants qui sont bons sur le plan linguistique, et totalement garantis sur les valeurs de la République”.
Un ensemble d’arguments qui ne convainc pas du côté du Rassemblement national. “Quelle honte ce ministre. Les élèves ne savent plus parler ni écrire correctement notre langue, le français. Et beaucoup de jeunes ne parlent pas anglais alors que c’est pourtant indispensable. Mais pour Blanquer, la priorité c’est l’apprentissage de l’arabe”, regrette le maire RN d’Hénin Beaumont, Steve Briois, oubliant que dans cette même intervention, Jean-Michel Blanquer répète que sa “priorité absolue est la maîtrise du français”.
Un option qui va “changer les Français”
Plus tôt dans la journée, c’est l’eurodéputé RN Jérôme Rivière qui réfutait sur Twitter les arguments de Gérald Darmanin. Pour cet ancien de l’UMP, “promouvoir l’enseignement de l’arabe à l’école, ce n’est pas réduire le pouvoir des religieux, c’est vouloir changer les Français”. Et Jérôme Rivière d’insister: “En France on enseigne le français. Le reste est affaire de choix individuels”.
Or, il n’est pas question d’imposer aux élèves l’apprentissage de l’arabe, comme le sous-entend l’eurodéputé, mais de le proposer aux élèves au même titre que d’autres langues étrangères, à l’instar de l’espagnol, de l’anglais, de l’allemand ou de l’italien. Une idée qui, malgré cette nuance de taille, fait bondir également chez Les Républicains.
Pour le député LR Aurélien Pradié, “institutionnaliser l’arabe à l’école est une faute”, dans la mesure où celle-ci viendrait concurrencer l’apprentissage de la langue française, “porteuse de liberté et d’émancipation”. Pourtant, l’enseignement de l’arabe ne constituera pas une première en termes d’introduction d’une langue extra-européenne dans l’enseignement public. En 2013, l’Éducation nationale soulignait que plus de 30.000 élèves en collèges et lycées suivaient des cours de mandarin. Sans que cela n’émeuve outre-mesure la droite et l’extrême droite. Un oubli, sans doute.