Publié par CEMO Centre - Paris
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Quel paratonnerre contre les foudres d’Erdogan ?

samedi 26/septembre/2020 - 07:04
La Reference
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Le président turc, nostalgique de la puissance de l’Empire ottoman, poursuit ses rêves expansionnistes au risque d’extrêmes tensions avec l’Union européenne.


Si on vous dit « leader populiste », vous penserez immédiatement à Trump, Poutine ou Bolsonaro. L’autocrate le plus dangereux pour l’Europe et la France est pourtant à la fois plus proche de nous… et bien plus embarrassant. Car son pays, riverain de la Méditerranée et membre de l’Otan, détient l’un des verrous de l’immigration en Europe et prendra le 15 septembre la présidence de l’Assemblée générale de l’ONU.

Il s’agit du président turc Recep Tayyip Erdogan qui, nostalgique de la puissance de l’Empire ottoman, poursuit ses rêves expansionnistes au risque d’extrêmes tensions avec l’Union européenne et, en particulier, avec son ennemi historique la Grèce. Mais aussi avec la France d’Emmanuel Macron, en pointe pour dénoncer son islamo-nationalisme de plus en plus conquérant.

Après la transformation de Sainte-Sophie en mosquée, c’est l’incursion, mi-août, d’un navire turc de recherches sismiques, le « Oruç Reis », escorté de frégates militaires dans les eaux territoriales grecques riches en ressources gazières, qui a mis le feu aux poudres. Athènes a dénoncé une « nouvelle escalade grave ». Aussitôt appuyé par Paris, qui a renforcé la présence militaire française dans la région.

Erdogan a alors accusé Macron de se comporter « comme un caïd » en Méditerranée orientale. « Le peuple français sait-il le prix qu’il devra payer à cause de ses dirigeants cupides et incompétents ?, a-t-il menacé. Lorsqu’ils’agit de combattre, nous n’hésitons pas à donner des martyrs […]. Ceux qui s’érigent contre nous […] sont-ils prêts aux mêmes sacrifices ? »

Roulements de tambour et discours martiaux

Depuis, il ne se passe pas une semaine sans qu’un incident ne vienne envenimer les relations entre Ankara et Paris, aux antipodes sur les questions kurde et arménienne, mais aussi au Liban (où Erdogan dénonce les visées « coloniales » françaises), en Syrie, en Libye ou en Irak. Le porte-parole du ministère turc des Affaires étrangères a même récemment expliqué que « la politique étrangère de la France était, sur presque tous les sujets, guidée par sa rhétorique anti-turque », allant jusqu’à critiquer la « propagande » pro-kurde de certains de nos manuels scolaires !

En interne, le néosultan multiplie les roulements de tambour et discours martiaux, comme lors de la célébration du 949e anniversaire de la bataille de Manzikert : « La conquête turque n’est pas l’occupation ou le pillage – c’est instaurer […] la justice voulue par Allah, a-t-il lancé. […] Si quiconque veut se dresser contre nous et en payer le prix, qu’il vienne. » Dans ce climat explosif, l’armée turque a débuté dimanche 6 septembre ses cinq jours de manœuvres militaires annuelles en République turque de Chypre du Nord, baptisées « Orage méditerranéen ».

Alors, quel paratonnerre contre les foudres d’Erdogan ? Alors que les tensions avec Ankara vont déjà dominer les discussions au sommet des pays du sud de l’UE qui se tient ce jeudi 10 septembre en Corse, les 27 chefs d’Etat et de gouvernement européens examineront, les 24 et 25 septembre, une panoplie de sanctions possibles à l’encontre de la Turquie si – comme c’est probable – elle refuse de s’engager dans un « dialogue constructif ». Et les observateurs redoutent que les saillies belliqueuses du maître d’Ankara excitent la frange radicale islamo-nationaliste de sa diaspora en Allemagne et en France – les sinistres « Loups gris » – ainsi que certains réseaux proches des Frères musulmans. Sombre perspective.

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