Entre Israéliens et Palestiniens, le Qatar joue sur plusieurs tableaux
Doha entretient de bonnes relations institutionnelles avec les ministères
et institutions de l’État hébreu dans le cadre de son rôle de médiateur et de
facilitateur entre ce dernier et le Hamas.
Parmi
les pays du Golfe, il est celui qui paraît le plus éloigné d’une normalisation
de ses relations avec Israël. Le message du Qatar est clair : pas de liens
officiels avec l’État hébreu sans État palestinien. Une position qui va à
contre-courant de la vague de changement qui traverse les pays du Golfe. Alors
que les Émirats arabes unis et Bahreïn ont officiellement établi des relations
diplomatiques avec Israël mardi, le locataire de la Maison-Blanche, Donald
Trump, a indiqué que « cinq ou six pays » arabes devraient à leur
tour signer des accords avec l’État hébreu. Les visites du secrétaire d’État
américain, Mike Pompeo, et du conseiller et gendre du président américain,
Jared Kushner, se sont d’ailleurs succédé le mois dernier dans la région avec
pour objectif d’encourager les voisins d’Abou Dhabi à lui emboîter le pas. Si
les rumeurs vont bon train sur Mascate, Khartoum ou encore Rabat comme
prochains candidats à la normalisation, l’option a été balayée d’un revers de
main par Doha. « Nous ne pensons pas que la normalisation était au cœur de
ce conflit et, par conséquent, elle ne peut pas être la réponse », a
déclaré Lolwah Alkhater, ministre adjointe qatarie des Affaires étrangères,
lors d’un entretien accordé à l’agence américaine Bloomberg à la veille de la
signature des « accords d’Abraham » (appellation donnée aux accords
signés entre les Émirats et Bahreïn, et Israël, en référence au patriarche des
trois religions monothéistes, NDLR) « Le cœur de ce conflit concerne les
conditions dramatiques dans lesquelles vivent les Palestiniens » en tant
que « peuple sans pays, vivant sous occupation », a-t-elle poursuivi.
Doha reste conforme à la ligne
traditionnellement défendue par les pays de la région, cristallisée par
l’Initiative de paix présentée en 2002 par le roi saoudien Abdallah, qui
conditionne une normalisation des relations entre les pays arabes et Israël à
la création d’un État palestinien avec pour capitale Jérusalem-Est et une
solution viable pour les réfugiés palestiniens. Un discours réitéré cette
semaine par le ministre qatari des Affaires étrangères Mohammad ben Abderrahman
al-Thani, qui a estimé dans une interview accordée au Washington Post que le
document offre « une base juste » pour des négociations, soulignant
que le gouvernement israélien « n’a pas montré sa volonté de s’engager
dans un dialogue constructif avec les Palestiniens ». « Les
conditions ne sont actuellement pas remplies par Israël pour permettre la
réalisation d’une concession à son égard. Pour le Qatar, cela doit aller dans
les deux sens », remarque Andreas Krieg, professeur au King’s College de
Londres.