Israël-Emirats arabes unis : un accord et un abandon
L’accord historique, annoncé le
13 août, par Israël et les Emirats arabes unis, qui doit mener à une
normalisation de leurs relations, à l’ouverture d’ambassades et de liaisons
aériennes directes, a suscité un soulagement trompeur. Premier rapprochement israélo-arabe
depuis le traité de paix signé par l’Etat hébreu avec la Jordanie,
en 1994, il s’accompagne d’un abandon provisoire du plan d’annexion d’une
partie de la Cisjordanie qu’agitait le premier ministre israélien, Benyamin
Nétanyahou.
Grâce à cette « feuille de
route », les Emirats affirment avoir écarté une telle menace, qui aurait
enterré la possibilité d’une solution à deux Etats. Pour la Maison Blanche,
cette entente concrétise la « vision » de Donald
Trump pour une « paix » au Proche-Orient, faite
d’alliances économiques avec Israël et les monarchies du Golfe. Paris et
Londres se réjouissent de voir deux alliés officialiser des relations déjà bien
établies, notamment en matière de renseignement.
Faux soulagement
Cette entente, en réalité, n’a que peu à
voir avec la « paix » en Terre sainte. M. Nétanyahou peut se
féliciter d’un accord qui n’impose à Israël aucune concession en faveur des
Palestiniens, aucun retour à des négociations politiques, en échange de
l’abandon d’une promesse électorale impréparée et impopulaire.
Dimanche, Emmanuel Macron a lui aussi
rappelé au président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, sa « détermination
à œuvrer pour la paix au Proche-Orient ». « La reprise des
négociations pour parvenir à une solution juste et respectueuse du droit
international reste une priorité », a affirmé le président français.
Mais l’accord avec les Emirats rend un tel scénario plus improbable. Autant
qu’un faux soulagement, il représente un vrai abandon : celui des
Palestiniens par les Etats arabes du Golfe.
Les Emirats ont choisi de se priver du
moyen de pression le plus efficace sur Israël. Ils reconnaissent tacitement
s’accommoder du régime d’occupation en vigueur dans les territoires depuis
1967. Leur allié saoudien se fait discret, mais il est douteux qu’il n’ait pas
été tenu au courant de cette initiative. Il n’a visiblement rien fait pour
l’empêcher.
Ces dirigeants d’une nouvelle ère ne se
pressent pas pour tenir une réunion de la Ligue arabe, réclamée par l’Autorité
palestinienne. Celle-ci mettrait à nu le lent effondrement de la position
commune établie depuis 2002, qui conditionne la normalisation des relations
avec Israël à la création d’un Etat palestinien sur les territoires de 1967,
débarrassés des colonies, avec Jérusalem-Est pour capitale