Conseil de sécurité: multiplication des appels à la fin de l’ingérence étrangère, à la reprise du processus politique et à un cessez-le-feu durable en Libye
Pendant que le monde entier fermait ses frontières et se confinait à cause de la COVID-19, bateaux, avions, camions chargés de mercenaires et d’armes se déversaient dans les villes libyennes, a dénoncé aujourd’hui le Ministre allemand des affaires étrangères. M. Heiko Maas, dont le pays préside le Conseil de sécurité ce mois-ci, a jugé qu’il est temps de mettre fin à « cette absurdité cynique ».
Relayé par toutes les délégations, le Ministre a appelé à la fin de l’ingérence étrangère: « plus d’avions, plus de tanks, plus de camions ou de cargos chargés d’armes, et plus de mensonges ». Il a prévenu qu’il compte utiliser tous les instruments à disposition, y compris des sanctions ciblées, pour éviter que la Libye ne devienne le théâtre d’une guerre étrangère. « Le temps n’est pas de notre côté », a prévenu le Secrétaire général de l’ONU, M. António Guterres, au cours de cette réunion sur la situation en Libye durant laquelle ont défilé en tout 33 intervenants dont plusieurs ministres.
Le Secrétaire général a plaidé pour une reprise du processus politique dirigé et contrôlé par les Libyens, sous les auspices des Nations Unies, et pour un cessez-le-feu négocié, deux demandes qu’il a faites dans ses conversations téléphoniques avec le Premier Ministre Fayez-al-Serraj et le maréchal Khalifa Haftar. Le Secrétaire général a reconnu que la nomination d’un nouveau représentant spécial faciliterait grandement les efforts de la Mission d’appui des Nations Unies en Libye (MANUL) et a dit compter sur le Conseil de sécurité pour accélérer ce processus.
Le conflit libyen, s’est-il alarmé, est entré dans une nouvelle phase avec un niveau d’ingérence étrangère sans précédent. Le respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale continue d’être mis à rude épreuve, ce qui, s’est inquiété le Ministre des affaires étrangères du Niger, M. Kalla Ankoura, alimente les tensions entre les parties belligérantes et compromet gravement les efforts de la communauté internationale en faveur d’un retour à un processus politique porté par les libyens eux-mêmes.
On ne le dira jamais assez, la Libye n’a pas besoin d’armes; elle n’a pas besoin de mercenaires; elle n’a pas non plus besoin d’être le théâtre de l’expression de la volonté de puissance de certains acteurs internationaux, a martelé le Ministre. Les accords « passés dans les coulisses » par des acteurs étrangers « afin de se ménager des sphères d’influence » doivent cesser, a repris le Ministre allemand des affaires étrangères. Nous devons plutôt nous unir derrière la MANUL et les efforts de paix de l’ONU pour aider les Libyens à trouver une solution politique, à instaurer une paix durable et à préserver l’intégrité territoriale et la souveraineté de la Libye, a estimé M. Maas.
En dépit de l’escalade des tensions, d’un déficit budgétaire « historique » de plus de 50% du PIB, des abus des droits de l’homme dont la découverte de charniers à Tarhouna, certaines délégations dont les États-Unis ont, comme le Secrétaire général de l’ONU, entrevu une « fenêtre d’opportunité à ne pas rater » puisque le processus lancé à Berlin en janvier s’est poursuivi tout au long des six derniers mois et que les pourparlers dans le cadre de la Commission militaire conjointe 5+5 ont repris. La Chine et le Royaume-Uni se sont montrés plus prudents, soulignant que les participants à la Conférence de Berlin n’ont pas tous donné suite à l’engagement pris de pleinement respecter l’embargo sur les armes imposé par l’ONU et de s’abstenir de toute activité risquant d’exacerber le conflit.