Congrès du Millî Görüş : une progression notable du mouvement en France en 2019
Le 21 octobre 2019 se tenait à Paris le congrès du mouvement
islamiste turc Millî Görüş. Enregistré intégralement par le média
turc MIZANE, son visionnage nous permet de saisir la dynamique de
l’organisation à travers la France.
Ce mouvement fut fondé en 1969
par l’ex Premier ministre turc Necmettin Erbakan (mort en 2011) qui voyait l’Europe comme une terre
de conquête. « Les Européens sont
malades… Nous leur donnerons les médicaments. L’Europe entière deviendra
islamique. Nous conquerrons Rome. » avait-il prévenu. Grand ami
des Frères Musulmans, Erbakan attira à son enterrement les pontes de la
confrérie islamiste dont Rached Ghannouchi qui évoqua la perte d’un «grand
frère ». Car le projet est similaire entre les deux mouvements
siamois : rétablissement à long terme d’un califat politique basé sur une
Loi islamique, qui pourra s’établir par l’épée si nécessaire.
Son secrétaire général en France, Fatih Sarikir, a développé les
chiffres clés de l’organisation en termes de fidèles, d’adhérents, de nombre
d’associations liées et de mosquées.
A ce jour 286 associations islamiques sont membres de la
confédération islamique Millî Görüş France (CIMG), 71 mosquées fréquentées le vendredi par 63776 fidèles. Le nombre
d’adhérents cotisant au mouvement est passé de 14 000 en 2016 à 19333 en
2019. Ces adhérents ont permis de
récolter 1 054 726 euros l’année dernière.
Les projets de mosquées et établissements scolaires en cours sont
au nombre de 22, avec une présence dans toutes les régions françaises ce qui
est notable étant donné l’origine très à l’est de son implantation originelle
dans les années 70-80. C’est ainsi que les villes de Perpignan, Dijon, Clermont
Ferrand, Metz, Creil, Vernouillet-sur-Seine vont accueillir des mosquées,
parfois très grandes comme à Clichy-sous-Bois.
Une fédération scolaire nommée Union européenne pour
l’enseignement privé musulman (UEPM) regroupe actuellement cinq écoles
primaires et secondaires. Les chiffres communiqués sont de 253 enfants
scolarisés en maternelle, 492 dans les écoles élémentaires et 448 élèves dans
les 4 collèges de la fédération. Et des écoles vont s’ouvrir encore avec la
bénédiction des préfets et académies qui laissent faire. Ainsi, à Blois, Rennes, et Belfort des
établissements scolaires vont ouvrir leurs portes prochainement.
Une fois le point fait sur ces grands chiffres, le secrétaire
général se lance dans une diatribe paranoïaque sur le traitement fait aux
musulmans par les politiques et les médias cloués au pilori. Médias et
politiques sont accusés de « nier et de banaliser l’islamophobie »,
de traiter différemment les victimes musulmanes d’attaques, car le
« traitement aurait été différent si les victimes appartenaient à d’autres
communautés religieuses ». « Leurs silences les rend complices de ces
attentats et attaques ». Alors même que les médias se sont largement fait
l’écho des attaques contre la mosquée de Bayonne, contre l’imâm de Brest et de
la voiture bélier contre une mosquée à Colmar, Fatih Sarikir n’en démord pas et
s’indigne de leur « silence assourdissant ». Il aurait pu choisir
d’autres exemples d’ « islamophobie » car l’homme à la voiture
bélier à Colmar est un musulman ayant crié Allah Akbar, victime de gros
troubles psychiques (Lire
Ouest-France).
En voulant faire passer les musulmans pour des « citoyens de
seconde zone » le secrétaire du mouvement islamique veut susciter la
rancœur et la méfiance systématiques des fidèles à l’égard de la société
française. La victimisation est un ressort bien connu utilisé par toutes les
organisations islamistes du monde.
L’islamophobie entendu même comme la critique intellectuelle de la
religion est bien sûr à bannir : « combien de temps encore va-t-on
tolérer les propos islamophobes tenus publiquement ? » s’indigne
Fatih Sarikir qui poursuit : « l’islamophobie n’est pas une simple
opinion comme on voudrait nous le faire croire, elle doit être punie par la
loi. » Ne pas punir les propos islamophobes serait « un traitement
discriminatoire » selon lui, alors que la religion chrétienne est
largement mosquée en France jusque dans les radios publiques comme France
Inter.
La présence dans le public de Marwan Muhammad fondateur du CCIF
est à noter.
Discours solidaire
du vice-président du CFCM
Puis vient au micro le vice-président du Conseil Français du Culte
Musulman, l’algérien Chems-Eddine Hafiz dirigeant la fédération de mosquées
algérienne de la Grande Mosquée de Paris (700 mosquées affiliées). Le même qui
s’est joint à la tribune de
Hakim El Karoui dans Le Monde pour
proposer ses services dans la lutte contre l’islamisme radical. Les propos
tenus au congrès Millî Görüş
montrent qu’il est solidaire avec ce mouvement extrémiste.
« Je veux insister aujourd’hui auprès de vous pour dire que
le Millî Görüş est un élément
important dans l’instance représentative de l’islam de France. Le Conseil
français du culte musulman a aujourd’hui besoin de votre fédération. Car il
s’agit d’abord de musulmans, nous sommes des musulmans. Quelles que soient nos
origines, nos pays d’origine, auxquels nous devons avoir ce lien d’affection.
Il y a deux choses importantes aujourd’hui dans cette salle [congrès tenu au Novotel Paris Est] , d’abord nous sommes musulmans
c’est ce qui nous uni, mais parallèlement, il ne faut pas faire de hiérarchies
nous sommes des citoyens français. »
« Ces deux appartenances ne doivent pas être en contradiction
bien au contraire », selon le responsable de la Grande Mosquée de Paris.
« Et je dois insister sur quelque chose, tout à l’heure Fatih
a parlé d’islamophobie, c’est vrai aujourd’hui, il y a des actes qui touchent
la communauté musulmane. Mais moi je voudrais qu’on ne soit pas dans la
confrontation pas dans l’agressivité je veux que nous soyons pédagogues. Il
faut que nous arrivions à expliquer à nos concitoyens non musulmans ce qu’est
véritablement notre religion. »
Donc pour Chems-Eddine Hafiz, l’islam extrémiste prônant le
califat politique et le djihad pour la prise du pouvoir du Millî Görüş (voir cette étude)
est le même que l’islam malékite de l’Algérie. Pas rassurant.
Après vient le tour de Anouar Kbibech président du Fond pour les
œuvres de l’islam, du Rassemblement des Musulmans de France des marocains, et
ancien président du CFCM jusqu’en 2017.
Pour cette homme la guerre mondiale des terroristes islamistes
n’existe tout simplement pas. Dans une interview sur LCI en juin 2015 il affirme
« Quand quelqu'un [
l'UMP Christian Estrosi, nda] parle de
troisième guerre mondiale qui aurait été déclarée à la civilisation
judéo-chrétienne, on croit rêver ! ». Avant de réclamer des sanctions
pour les médias qui ont donné le micro à Christian Estrosi, pourtant très
conciliant jusqu’aux Frères Musulmans à Nice !
Au congrès du Millî
Görüş Kbibech vient demander aux turcs une forte participation aux élections du
CFCM qui eurent lieu le mois suivant de l’événement.
Puis s’exprime au micro le rustre Abdellah Zekri de
l’Observatoire national de l’islamophobie du CFCM qui fit du bruit pour avoir
dit il y a quelques mois « Je ne suis pas assimilable, je
suis un poison musulman. Celui qui veut m’assimiler, il meurt », en parlant du
modèle d’assimilation à la culture française des immigrés naturalisés.
Il accuse le très modéré
Jean-Michel Blanquer de « déclaration mensongère » pour avoir pointé
la déscolarisation de certains élèves issus de la mouvance du fondamentalisme islamiste.
Monsieur Zekri doit être mieux renseigné que le ministre de l’Education
Nationale en lien avec le ministère de l’Intérieur sur ces questions. Il s’en
prend ensuite à Marlène Schiappa qui a osé évoquer la différence de traitement
homme-femme dans l’héritage islamique, « de quoi se même-t-telle ? ».
On pourrait lui rappeler que la loi française n’autorise pas cette
discrimination mais la Loi islamique prime pour ce personnage.
A la fin du congrès , est interrogé par le média turque MIZANE le
président du mouvement Tabligh Foi et pratique, Hamadi Hamammi, qui a remplacé
son père expulsé vers le Tunisie pour radicalisme [1].
Il faut ajouter que Mohamed Hamammi (le père) avait frappé
une équipe de Canal +. Principal mouvement tabligh en France, il est membre de droit au
Conseil Français du Culte Musulman.
Donc toute la « crème » islamiste était bien présente au
congrès 2019 du Millî Görüş,
événement qui nous avait échappé en octobre dernier, cet article remédiant au
manque cruel d’information sur ce mouvement dans la presse traditionnelle.
[1] Tariq Ramadan et recteur de la
mosquée de Lyon, Kamel Kabtane, avec d’autres imâms de l’UOIF, signèrent une
pétition pour défendre Mohammed Hammami contre son expulsion. Pourtant, le
président de Foi et Pratique qui était imâm à la mosquée Omar de Paris (la plus
extrémiste de la capitale) fut expulsé du territoire français pour avoir
« valorisé le jihad violent, proféré des propos antisémites et justifié le
recours à la violence » contre les femmes, annonça à l’époque le ministère de
l’Intérieur en octobre 2012.