Publié par CEMO Centre - Paris
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Maher Ferghaly écrit: Les fondations d'Erdogan dans les pays du Golfe 2-2

dimanche 30/septembre/2018 - 08:35
La Reference
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La première partie de l'étude aborde les tentatives d'infiltration de la Turquie dans le monde arabe par le biais des mécanismes et des fondations œuvrant hors de ses frontières sous la devise de ''la force douce''. Cette manœuvre est une énième tentative de réinstaurer et de redynamiser ''la dynastie ottomane'' comme le souhaite le président turc Recep Tayyib Erdogan

Des fondations à caractère commercial et économique par lesquelles la Turquie a créé des compagnies, ont été citées outre la création des associations d'amitié et des organisations de sauvetage pour mener à bien la tentative d'infiltration.

Des fondations à caractère culturel et social comme outils d'influence et d'infiltration turques et le rôle des fondations transcontinentales, ont été également abordées dans cette première partie.

Fondations à caractère culturel et artistique

Etant donné l'impact évident de la culture et de la force douce, la Turquie s'est intéressée aux fondations culturelles et artistiques qu'elle considère comme un pont la reliant au monde arabe. En guise d'exemple, Kamal Yerchaguy rapporte que les séries télévisées turques jouissent d'une popularité immense chez les femmes saoudiennes. Un sondage a montré que 71% des femmes interrogées disent aimer regarder les séries turques et que la plupart d'elles ont dépensé beaucoup d'argent pour voyager en Turquie afin de regarder les lieux de tournage de ces séries. (1)

La Turquie s'est réellement intéressée à la création des associations et des compagnies artistiques pour communiquer avec le monde arabe par le truchement des scénarios corroborant ses aspirations, à l'instar de l'Association turco-arabe pour les Sciences, la Culture et les Arts, créées par des académiciens, des journalistes et des penseurs turcs et arabes qui déclarent être conscients du fait que la réussite de l'association dépend de l'interaction entre ses membres.

L'Association a été reconnue par les autorités turques le 2 avril 2008 comme Organisation nationale à but non lucratif et à caractère international lui permettant d'ouvrir des branches et des représentations aussi bien à l'intérieur qu'à l'extérieur de la Turquie, d'avoir le droit d'adhésion aux divers organismes et organisations internationales ayant les mêmes centres d'intérêts. Les autorités turques ont également signé la création de l'Institut turco-arabe pour les Etudes et la Documentation, comme fondation scientifique pour les recherches dépendant de l'association. L'on peut aussi citer le Forum turco-arabe pour le dialogue culturel qui réunit des penseurs arabes et turcs de manière périodique, et le magazine du Dialogue turco-arabe qui est publié en arabe et en turc.

L'Association a pris la capitale turque Ankara comme siège principal mais mène des activités aux niveaux politique et économique dans plusieurs capitales arabes.

Ceci en plus de la coopération avec le Centre des recherches historiques, artistiques, culturelles et islamiques avec bon nombre des centres dans le monde arabe comme le Centre Culturel Turc à Amman qui organise des activités culturelles dans le but clairement affiché d'infiltrer les sociétés arabes.

L'Académie turque nommée ''12 mois'' est une organisation non gouvernementale, utilisée comme voile pour enrôler les jeunes dans les pays du monde arabe comme l'Egypte où ils sont soigneusement sélectionnés et présentés comme candidats aux organisations et associations affiliées à l'organisation des Frères musulmans et où ils sont entrainés aux mécanismes de changement démocratique sans pour autant connaitre les objectifs de l'Association.

Le contact avec l'association se fait par le truchement d'un coordinateur à l'intérieur du pays ciblé. Des invitations sont envoyées aux concernés pour obtention de visa à l'aéroport d'Istanbul sans avoir à passer par l'Ambassade de Turquie. Avant le voyage, le candidat reçoit un appel téléphonique. Pour chaque stage, le groupe  se compose de 4 à 30 jeunes pour une formation d'une semaine. Celui qui aura prouvé sa capacité à l'interaction est invité pour un autre stage de deux semaines. La fondation tuque se charge des frais de ces deux stages.

La fondation forme les jeunes à faire usage des alliances entre les organisations de la société civile qui soutiennent la participation de la femme à la vie politique et aux élections. Ces jeunes sont aussi formés pour la création des alliances pour des sujets déterminés. Ce qui permettra à Ankara de noyauter les pays arabes.(2)

Le danger que représentent ces organisations turques est tel que les organisations américaines aussi ont regagné la course en transférant leurs activités des pays interdit d'accès, vers la Turquie comme l'Organisation de l'Initiative du Proche-Orient qui organise des stages de formation à grande échelle dans les domaines s'opposant aux politiques de certains pays arabes. Tout ceci dans le but d'utiliser les jeunes pour des intérêts américains et turcs.

La Conférence des jeunes arabes et turcs a été organisée le 24 octobre 2014 au Centre des Conférences d'Istanbul pendant 4 jours sur invitation de la commune d'Istanbul en collaboration avec l'Académie turque. Les frais de voyage, d'alimentation et de transport interne étaient à la charge des organisateurs. Les plus grandes délégations ayant participé à la conférence sont venues d'Egypte, de Syrie, d'Irak, de Palestine et des jeunes activistes égyptiens affiliés à la Confrérie des Frères musulmans inscrits dans les universités turques et européennes.

Le conseiller de l'ex Premier ministre turc, Paulent Aras et Mohammad Oglum, le Directeur du Croissant Rouge Turc, ont donné des conférences lors de cette rencontre.

L'Académie possède une branche en Tunisie et le Centre Al Mahroussa, coordonne ses activités en Égypte.

Elle présente beaucoup de similarités avec les associations œuvrant dans le renforcement des relations entre le peuple égyptien et le peuple turc, et contribue à la création des relations équilibrées et à garantir la présence effective de la Turquie dans la société égyptienne

Les fondations transcontinentales.

L'on ne saura séparer les organisations gouvernementales turques œuvrant dans les pays arabes, des autres organisations turques transcontinentales comme l'association "Gulen", présente dans tous les pays arabes et dans tous les autres pays du monde. En dépit des divergences entre Erdogan et Gulen, cette association – considérée par Erdogan comme parallèle au Gouvernement - sert les intérêts trucs et offrent des services  tout comme les institutions œuvrant dans le même domaine.

Gulen n'a pas tergiversé pour entrer en contact avec le monde arabe. Il a fait d'ouvrir des écoles dans les pays arabes (3) qui enseignent les mêmes manuels dans chacun de ces pays.

Sur initiation de l'Union des écrivains et des journalistes turcs, le mouvement Gulen a créé un forum qui réunit diverses factions idéologiques pour discuter des affaires turques, mondiales et humanitaires.

L'empire Gulen englobe aussi la banque islamique d'Asie avec ses branches dans les pays du Golfe et des actifs estimées en 2008, à 5.2 milliards de dollars, tout comme il englobe une  compagnie d'assurance internationale qui possède des branches dans plus de 35 pays à travers le monde.

Le mouvement crée des universités et des écoles dans presque tous les pays arabes. L'on peut citer l'école Salah el dine créée en 2009 dans le nouveau Caire (Tagammou al khames) qui organise une cérémonie annuelle à laquelle prennent part un certain nombre des personnalités égyptiennes et turques dont des députés au Parlement turc.

Après l'éviction des  Frères musulmans du pouvoir en Egypte, le Ministre égyptien de l'éducation a émis un décret stipulant la supervision du ministère sur les finances et l'administration de l'école qui, selon les parents d'élèves est devenue une véritable colonie turque en Egypte avec ses actes plus que suspects et son refus d'intégrer des élèves chrétiens. On peut également citer le complexe scolaire du même nom dans le gouvernorat de Beni Souef.

Les élevés de ces écoles sont soumis à un programme précis d'éducation et de comportement, outre la recherche de l'excellence qui est devenue la marque de ces établissements. Ce qui en a permis l'expansion.

Le mouvement Gulen possède l'agence de presse ''Djihane'' qui publie plus de 500 d'informations écrits par jour en plus de 100 infos télévisés et 100 images. Ce qui fait d'elle la plus grande agence d'information privée en Turquie. Elle possède des bureaux officiels dans 39 pays dont les pays arabes et des correspondants dans 60 pays.

Le magazine ''Heraa'' – considéré comme le premier magazine turc en langue arabe- a ouvert son bureau au Caire en 2005 et sa chaîne de télévision du même nom a ouvert le 14 mai dernier. Elle est la 1ere chaîne de la Confrérie s'adressant aux arabes. Elle a été lancée conjointement avec l'ouverture de la conférence internationale ''l'effort et la mesure'' d'Istanbul sous l'égide du groupe  ''Samanuel'' qui regroupe 13 chaînes de télévision, des journaux, des magazines et une agence de presse.

Il Ya aussi le groupe ''Faynaq'' pour l'edition - système idéologique complet- qui a commencé par le magazine ''Al Rash-ha'' dont la première publication remonte à trente ans, outre une trentaine de magazines dont certains spécialisés dans les affaires de l'enfant et de la femme. Le groupe possède une maison d'édition en Turquie et au Proche-Orient et publie 60 livres par mois dans diverses langues dont l'arabe. Il possède aussi trois sites internet en diverses langues et publie un manuel scolaire de haute impression et production.

La banque islamique d'Asie est la branche économique du mouvement et l'une des plus grandes banques turques avec lus d'un million de dépositaires et 280 branches.

Le mouvement Gulen a créé une fondation – dénommée ''Y a-t-il quelqu'un''- spécialisée dans le sauvetage et les actes caritatifs. Cette fondation mène des actions à l'intérieur et à l'extérieur de la Turquie grâce aux bénévoles parmi lesquels plusieurs jeunes arabes. Elle crée des bureaux autant qu'elle mène des actions de sauvetage.

Le mouvement Gulen soutient directement l'Association médicale islamique qui est le plus grande association caritative médicale sous la supervision des Frères musulmans. En 2014, les autorités égyptiennes ont mené des enquêtes sur le financement extérieur de l'association et sur son soutien des activités des Frères musulmans.

Le mouvement soutient aussi l'association ''la communication et la bienfaisance'' qui est une association caritative à but non lucratif. Comme son nom l'indique, elle pourvoit de l'aide et de la bienfaisance aux nécessiteux et garde le contact avec eux. Selon son site internet, elle est la même que celle qui œuvrait dans les pays du Levant (Sham) (5)

Les associations et l'avenir

A la lumière de ce qui précède, il est évident que la Turquie s'appuie sur bon nombre d'associations comme moyen de domination et de finalisation de son projet impérialiste ottoman. Des pays arabes dont l'Egypte l'ont accusée de s'immiscer dans leurs affaires internes car elle se comportait comme tout ce qui se passait dans ces pays était une affaire turque.

La Turquie se comporte comme si ces anciennes colonies sont toujours des possessions dépendant d'elle. (6)

L'on pense qu'à l'ère d'Erdogan, le projet de la ''nouvelle Turquie ottomane'' continuera sa percée. D'où le danger qu'il représente lorsqu'on sait que suite à ce qu'on appelle le printemps arabe et le soutien des Frères musulmans et des mouvements djihadistes armés dans le monde arabe par Erdogan et par le Qatar, toute la sous-région s'est embrasée dans des conflits armés sanglants.

Il est fort probable que l'expansion turque continue dans l'une des deux trajectoires:

Première trajectoire: la continuité du soutien populaire en faveur du gouvernement d'Erdogan dans sa politique régionale et la finalisation des réformes internes dans le cadre de la résolution pacifique de la crise kurde; la conformité de la politique extérieure turque à la politique extérieure américaine car la Turquie est perçue- selon certains centres de recherche- comme un État exemplaire sur lequel les États-Unis devraient s'appuyer dans la sous-région; l'envie américaine, occidentale et arabe de voir la Turquie jouer un rôle d'équilibre face au rôle négatif iranien dans la sous-région.

Deuxième trajectoire: le recul du rôle turc. C'est-à-dire l'impossibilité de réaliser le rôle régional turc et sa confrontation à l'Amérique de Trump. Ainsi le projet n'ayant pas abouti, il ne reste plus qu'à se replier sur les affaires internes déjà  en eaux troubles, ces derniers temps.

Conclusion:

Nous pouvons affirmer que la Turquie est entrain de mener un complot sans équivoque, contre les pays arabes. Ce projet se heurte toutefois aux efforts déployés par l'Arabie saoudite, l'Egypte, les Émirats pour le contrecarrer et l'étouffer.

(1)Kamal Yercheguy, ''l'influence de la Turquie'', ''la vision de la Turquie'' 2012,  page 80

(2)Le dernier stage s'est déroulé du 11 au 16 septembre 2014 en turquie avant la conference de la jeunesse arabo-turque

(3)http://rassd.com/5-79630.htm#sthash.FOOPWMm9.dpuf

(4)Ayman Abdallah Shehata, "l'avenir des reformes dans le monde islamique'', la comparaison avec le mouvement Gulen, Edition Heraa, page 475

(5)https://m.facebook.com/profile.php?id=224719517697483&refsrc=http%3A%2F%2Fwww.google.com.eg%2F&_r

(6)http://www.alkhaleej.ae/studiesandopinions/page/99

(7)http://www.acrseg.org/36638

 

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