L'intervention turque en Syrie en questions (2)
Quelle est la réaction du régime syrien et de ses alliés?
La diplomatie syrienne a déclaré qu’elle fera "face à l’agression turque sous toutes ses formes à travers le pays, en utilisant tous les moyens légaux". Cependant, cette déclaration n’a pas été suivie d’actes pour l’instant. Il semble que le régime syrien, épaulé par son partenaire russe, garde une attitude attentiste pour plusieurs raisons. D’abord, le retrait américain de Syrie est une victoire supplémentaire pour Damas et ses alliés russe et iranien, nouveaux maîtres du jeu dans la région, ce qui inquiète Israël. Ensuite, ni les Russes, ni Damas n’ont intérêt à voir s’installer un pouvoir kurde pérenne dans le nord du pays.
Quel rôle peut tenir l’Union européenne?
La secrétaire d’État française aux Affaires européennes, Amélie de Montchalin, a déclaré vendredi 11 octobre sur France Inter qu’une sanction européenne sera sur la table du Conseil européen qui se tiendra la semaine prochaine. Pour Dorothée Schmid, chercheuse spécialiste de la Turquie à l’Institut français des relations internationales (Ifri), l’UE est démunie face à l’attitude va-t-en-guerre du président Erdogan. "Les Européens sont à la fois ceux qui ont le moins de poids et ceux qui sont le plus exposés à ce qui va se passer sur la question des réfugiés et au risque posé par les djihadistes" de l’État islamique, a-t-elle déclaré sur la chaîne Cnews.
L’État islamique peut-il se regrouper?
Dix mille combattants de l’EI, dont 2.000 étrangers, sont détenus dans des prisons de fortune gardées par les forces kurdes dans le nord-est de la Syrie. Les Kurdes ont prévenu qu’ils ne pourraient plus assurer leur garde s’ils devaient défendre leur territoire face à l’incursion turque. D’autre part, des cellules dormantes de l’EI pourraient profiter du chaos déclenché par l’intervention turque pour organiser des raids afin de libérer les djihadistes de ces camps. Cette menace fait peser un risque pour la sécurité de l’UE et de la Turquie.
Quid de la menace turque de laisser ses réfugiés venir en Europe?
La gestion des 3,6 millions de réfugiés syriens pèse de plus en plus sur la politique intérieure turque. Le président Erdogan en fait une arme de chantage vis-à-vis de l’UE, en menaçant d’ouvrir ses frontières si elle ne soutient pas son offensive en Syrie. Pour l’analyste turc Aydin Selcen, l’argument a du poids. "Il faut préciser que l’UE n’est pas un ‘acteur’ mais un ‘objet’ par son immobilité depuis le début du conflit syrien. Donc du point de vue diplomatique, c’est M. Erdogan qui détermine le ton et le rythme du jeu."