Les institutions d'Erdogan dans le Golfe 1-2
Maher
Farghali
Les
activités de la Turquie dévoilent ses tendances à cibler les communautés et
régimes arabes et islamiques. Elle affiche un large intérêt sans précédent,
vis-à-vis de ses voisins arabes. Les raisons sont claires. La Turquie agit, à
présent, dans la région arabe en adoptant le terme de la "diplomatie
générale". C'est un terme ancien et un projet stratégique dont
bénéficiaient les grandes puissances pour renforcer leur pouvoir. Un siècle
après avoir abandonné la région, la Turquie a résolument décidé d'entreprendre
des démarches vigoureuses pour récupérer la région arabe, exploitant et
mobilisant le groupe des Frères musulmans.
Des
associations turques de pénétration
Des
associations et des institutions turques ont représenté plusieurs axes
d'action, supervisées par des hommes d'affaires proches des décideurs. Des
institutions de services et de financement ou d'autres travaillant dans le
secteur médiatique. Ces institutions ont constitué la force douce ayant aidé à
recréer l'empire ottoman depuis l'Afrique du Nord et jusqu'au Plateau iranien
et l'Asie Centrale. Les médias ont en fait un rôle efficace et profond dans la
propagande pour les régimes politiques, ce qui a poussé la Turquie à créer un
certain nombre d'institutions et de bureaux dans plusieurs pays arabes. Elle a
également créé la chaîne turque "trt" qui incarne la culture turque,
pour la transmettre au monde arabe.
Le
régime turc a eu recours à des outils officiels ou à des mouvements
intellectuels comme le mouvement qu'Erdogan avait exploité au début de son
pouvoir. C'était un mouvement qui a pris l'éducation comme outil pour couronner
de succès ses efforts.
Entre
autres mouvements, celui de l'Association d'hommes d'affaires en Turquie et
dans les pays arabes. Comme son nom l'indique, cette association vise les
hommes d'affaires pour nouer des liens avec les institutions sociales et
commerciales arabes pour renforcer les relations d'amitié.
Les
institutions turques sont passées par trois phases. La première c'est la
paralysie ou la stagnation. C'est justement la phase où l'Etat turc de Kemal
Atatürk accordait un grand intérêt à l'Europe. Le monde islamique ne l'attirait
en aucune sorte, à l'époque.
La
deuxième phase est celle de l'élan. C'est cette période qui a suivi l'accession
du Parti de la Justice et du Développement au pouvoir. C'est la phase "erdoganienne",
qui s'est basée sur la diplomatie générale et l'extension régionale. Après
l'accession au pouvoir de ce parti, toutes les relations turques ont été
forgées à nouveau, comme Ahmet Davutoglu s'est exprimé en disant :
"Peut-être la majorité écrasante des entités arabes a-t-elle abordé la
présence turque dans la région, et tendait-elle à présenter des recettes du
déjà-vu pour le conflit entre la laïcité et l'islam en Turquie, mais nous
tendons à renouer les relations arabes".
Les
véritables intentions
Quelles
que soient les intentions turques, ses activités, ses positions et ses
politiques servent son grand projet de retour et de recréation de l'Etat
ottoman. Il reste cependant plus ou moins ambigu, la capacité politique et
militaire à concrétiser cette vision. C'est justement pour cette raison que la
Turquie déploie le maximum d'efforts pour hausser le taux de commerce avec ses
voisins d'Orient, même si son volume demeure beaucoup plus inférieur à celui
noué avec les pays européens.
Depuis
le début de son pouvoir et jusqu'à nos jours, Erdogan a toujours affirmé, que
tout comme Turgut Özal, il aura recours à la force douce, via les
communications culturelles et économiques pour travailler à recréer la nouvelle
version de l'empire ottoman. Il exploitait la religion islamique et l'appui aux
groupes islamistes, car les liens religieux authentiques dans les régions du
Moyen-Orient et de l'Océan Pacifique, sont capables de créer des relations
politiques et d'affaires, et c'est ce qui s'est effectivement passé avec le
retour de la Turquie vers la région.
La
dimension commerciale et économique
La
dimension la plus importante exploitée par la Turquie pour pénétrer dans la
région, fut les institutions économiques. Les intellectuels et analystes
révèlent là l'exemple de l'ouverture d'une fameuse chaîne de supermarchés turcs,
ayant ouvert près de 54 filiales dans les pays voisins.
L'Association
des hommes d'affaires turcs
C'est
une association, même si apparemment à caractère commercial et économique, mais
elle porte dans ses replis, des concepts intellectuels, politiques et
religieux, qui servent la propagande turque, par le biais de ses activités à
l'intérieur tout comme à l'extérieur du pays.
Cette
association est aujourd'hui le plus grand rassemblement économique en Turquie, regroupant
près de 2.650 membres représentant des milliers d'entreprises.
Les
institutions caritatives à dimension humanitaire
Le
principe de la politique extérieure turque, consiste à influencer les provinces
à l'intérieur du pays ainsi qu'à l'extérieur dans les pays voisins. La Turquie
a donc exploité les institutions caritatives pour servir ses aspirations
d'extension régionale et pour notamment influer sur la région, économiquement
et culturellement parlant. L'institution turque "Tika" incarne donc
ce modèle qui vise à consolider le projet turc d'ascension stratégique régionale
et à redorer le blason de la Turquie.