Publié par CEMO Centre - Paris
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La Libye sous tutelle turco-russe

vendredi 12/juin/2020 - 10:22
La Reference
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Pendant que les Américains regardaient ailleurs et que les Européens essayaient de se mettre d’accord, la Russie et la Turquie se sont partagé la Libye. C’est, à peine simplifié, ce qui vient de se passer dans ce pays méditerranéen crucial pour la sécurité de l’Europe, qui se retrouve soumis à une partition de facto : à l’ouest, la Tripolitaine, où les forces mobilisées par le président turc Erdogan ont permis au gouvernement d’accord national (GAN) de Faïez Sarraj de repousser l’offensive du maréchal Khalifa Haftar et de reprendre le contrôle de la région, et, à l’est, la Cyrénaïque, sur laquelle règne le maréchal rebelle, replié sur Benghazi après l’échec de son assaut sur Tripoli. Soutenu par l’Egypte et les Emirats arabes unis, il bénéficie, lui, de l’appui militaire de la Russie.

La chute, le 5 juin, du dernier bastion du maréchal Haftar en Tripolitaine a marqué la fin de son offensive lancée le 4 avril 2019 pour tenter de s’imposer à la tête du pays. Il s’en est fallu de peu qu’il y parvienne, à la tête de ses troupes autoproclamées Armée nationale libyenne (ANL), avec l’aide précieuse des mercenaires russes, membres du fameux groupe Wagner, dont le nombre a pu dépasser le millier. Mais Faïez Sarraj s’est trouvé un allié plus puissant encore, Recep Tayyip Erdogan, auquel il a encore rendu visite à Ankara le 4 juin. C’est à la Turquie, à ses drones et aux quelque 7 000 hommes de milices syriennes qu’elle a fait venir d’Idlib que le GAN doit son salut.

Voici donc la Libye, comme la Syrie, sous tutelle turco-russe. Ce tournant dans l’histoire de ce pays, ravagé par les luttes entre milices locales et groupes islamistes depuis la révolution qui a renversé le colonel Kadhafi en 2011, est une mauvaise nouvelle pour l’Union européenne. Elle l’est notamment pour la France, qui s’est montrée bienveillante à l’égard du maréchal Haftar, dans lequel elle voyait le meilleur rempart contre le terrorisme islamiste, mais dont elle a sous-estimé la stratégie de conquête. Paris regarde aujourd’hui avec inquiétude la Turquie prendre pied durablement en Libye, une évolution qui, reconnaît-on à l’Elysée, change la donne en créant une pression stratégique et politique sur l’Europe.


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