En Libye, les mercenaires russes au service du maréchal Haftar désertent le front de Tripoli
L’image
a fait le tour des réseaux sociaux libyens. Des hommes d’apparence occidentale
sanglés dans leur treillis et entassés à l’arrière d’un pick-up traversant Beni
Oualid, localité située à 150 kilomètres au sud-est de Tripoli, devant des
passants interloqués : la scène n’était pas celle d’une colonne montant au
front mais plutôt celle d’une retraite en bon ordre.
Samedi
23 mai, plusieurs centaines de mercenaires russes ont quitté en convoi
l’agglomération de Tripoli pour l’oasis de Beni Oualid où les attendaient des
avions de transport de type Iliouchine. De là, ils devraient rejoindre, selon
une source diplomatique, la base aérienne d’Al-Jufra située à 350 kilomètres
plus à l’est dans une zone contrôlée par le maréchal Khalifa Haftar, étape vers
un probable retour en Russie.
L’épisode
marque la fin d’un engagement humain russe dans la bataille de Tripoli, qui
fait rage autour de la capitale depuis le 4 avril 2019, date de
l’assaut déclenché par l’Armée nationale libyenne (ANL) du maréchal dissident
Haftar contre le gouvernement d’accord national (GAN) de Faïez Sarraj, reconnu par
les Nations unies.
«
Plus d’un millier » d’hommes
Ce
retrait de mercenaires de compagnies de sécurité privées opérant pour le compte
d’Haftar − dont la présence n’a toutefois jamais été officiellement reconnue
par Moscou − sanctionne plusieurs semaines de débâcle des forces assaillantes
sous l’effet d’une montée en puissance du soutien d’Ankara au gouvernement de
Tripoli.
A
la mi-avril, l’ANL a dû quitter les localités littorales de Sorman et Sabratha,
situées à moins de 70 kilomètres à l’ouest de la capitale. Et la base aérienne
d’Al-Watiya, principale présence stratégique de l’ANL en Tripolitaine non loin
de la frontière tunisienne, a été reconquise, le 18 mai, par les forces
loyales au GAN de Sarraj dopées par l’efficacité croissante des drones turcs.
Outre son système de défense antiaérienne, Ankara a acheminé à Tripoli
plusieurs milliers de combattants syriens pro-turcs.
La
chute de la base d’Al-Watiya a précipité le désengagement des mercenaires de la
compagnie de sécurité Wagner qui tenaient des positions au sein de
l’agglomération de Tripoli, dans les quartiers de Salaheddine, Qasr Ben
Ghachir, Yarmouk et Hamza. Combien sont-ils à s’être retirés samedi vers
l’oasis de Beni Oualid dans ce qui apparaît comme une exfiltration de
masse ? Selon une source diplomatique, le convoi était composé d’« au
moins 80 véhicules » dans lesquels avaient pris place des Russes
et des mercenaires syriens pro-Damas. Le maire de Beni Oualid, cité par
l’agence Bloomberg, a évoqué le chiffre de « plus d’un
millier » d’hommes, Russes et Syriens confondus, apparemment
accompagnés d’armements lourds, tels des obusiers de 152 mm Msta-B
howitzer ou des véhicules antiaériens Pantsir.