Sahel : Britanniques et Américains prolongent leur appui à l’opération française Barkhane
Américains et Britanniques reportent leur désengagement au Sahel, un sursis précieux pour l’armée française qui ne peut, pour le moment, se passer de cette aide en renseignement et logistique. "Le Royaume-Uni a décidé de maintenir ses hélicoptères Chinook sur place. Quant aux Etats-Unis, ils ont différé leur décision de désengagement. Leurs moyens sont toujours en place", a affirmé Florence Parly dans un entretien accordé le 24 avril au quotidien Sud-Ouest.
Une aide cruciale pour la France
Le Pentagone avait ouvertement envisagé ces derniers mois de réduire drastiquement la voilure en Afrique de l'Ouest. Or, Washington fournit aux 5 100 soldats français de l'opération Barkhane des capacités cruciales de renseignement et de surveillance – grâce à ses drones notamment –, du ravitaillement en vol et du transport logistique pour un coût de 45 millions de dollars par an.
Depuis juillet 2018, l'armée de l'air britannique fournit quant à elle une aide précieuse aux troupes françaises au Sahel avec trois hélicoptères lourds CH-47 Chinook et une centaine d'aviateurs, pour des missions de logistique, ravitaillement et transport de troupes. Le Chinook, hélicoptère lourd doté de deux rotors, permet le transport logistique de grande capacité au plus près des combats. Une aide précieuse, gage d’une plus grande efficacité sur un vaste territoire qui couvre plusieurs pays. Le mandat britannique devait s'achever à l'été 2020.
Florence Parly a fait cette déclaration lors d’une visite le 24 avril 2020 au 5e régiment d'hélicoptères de combat de Pau, endeuillé par la mort de deux de ses militaires le 16 avril, lors d'un accident pendant un vol d'entraînement. Déjà en novembre 2019, ce régiment avait déjà perdu sept des siens, tués dans un accident d'hélicoptères au Mali qui avait coûté la vie au total à 13 militaires français, la plus importante perte de l'armée française en opération depuis 1983.
Les USA se concentrent sur "la menace Chinoise"
Ce report américain est un soulagement pour la France, Florence Parly en avait fait son cheval de bataille lors de sa rencontre, le 27 janvier 2020, avec son homologue américain, Mark Esper, à Washington. La responsable française ne cachait pas alors son inquiétude face à la volonté affichée des Etats-Unis de réduire leurs moyens au Sahel pour concentrer leurs efforts sur les nouvelles menaces représentées par la Chine et la Russie.
Les groupes jihadistes qui opèrent dans cette région visent davantage l'Europe que les Etats-Unis. Le chef du commandement américain pour l'Afrique (Africom), le général Stephen Townsend, avait estimé que " l'Europe peut et doit en faire plus avant que les Etats-Unis en fassent davantage dans cette partie du monde". La montée en puissance de l’Europe se fait au compte-gouttes. Promise depuis l'été 2019, la "force Takuba", qui doit compter quelques centaines d'hommes de 11 pays européens, débutera cet été ses opérations sous commandement français dans la région du Liptako, aux confins du Niger et du Mali, réputée servir de sanctuaire à des groupes jihadistes, dont l'Etat islamique au Grand Sahara (EIGS).
"Avec Takuba, les Européens montrent leur capacité à se mobiliser ensemble pour leur sécurité", avait déclaré la ministre française des Armées sur Twitter. Pour autant, si les 11 pays européens apportent leur soutien politique à la création de Takuba, ils n'y participent pas tous. A ce jour, seuls six pays ont annoncé leur contribution : la France, la Belgique, le Danemark, l'Estonie, les Pays-Bas et le Portugal. La Suède, elle, attend un feu vert de son Parlement pour confirmer sa participation à Takuba, sous la forme d'une force de réaction rapide héliportée de 150 personnes. Sollicitées, la Norvège et l'Allemagne ont annoncé renoncer à envoyer des soldats à ce stade faute de soutien politique interne suffisant.