Après neuf ans de guerre, le conflit en Syrie a grandement modifié la
démographie du pays. Autrefois majoritaires, les Arabes sunnites ne
représentent plus que la moitié de la population. Ce changement est dû au
nombre important de réfugiés et de déplacés engendrés par les combats, mais il
est aussi le fruit de stratégies issues d’une approche communautaire du
conflit.
En 2011, des
manifestations sont sévèrement réprimées par le régime de Bachar Al-Assad dans
la ville de Deraa, faisant des dizaines de morts, dont des enfants. C’est
l’étincelle qui a embrasé la Syrie depuis près de neuf ans. Comme souvent en
temps de guerre, l’insécurité entraîne un repli communautaire. Cependant cet
aspect va être exacerbé et instrumentalisé par les belligérants. La
régionalisation du conflit et l’implication d’acteurs extérieurs, notamment la
Turquie et l’Iran, ont accentué ce phénomène.
Ankara pratique
le nettoyage ethnique dans les zones kurdes sous son contrôle. L’État turc
applique ainsi son programme de mise en place d’une ceinture de sécurité
peuplée d’Arabes proturcs en expulsant les Kurdes et en les remplaçant par les
milices djihadistes qui lui sont acquises.
Téhéran emploie
également des « proxies ».
L’utilisation de supplétifs chiites venant des pays de la région, mais aussi
d’Afghanistan et du Pakistan permet d’augmenter le nombre de combattants, mais
aussi de changer la démographie de certains territoires en leur offrant la
possibilité de rester en Syrie. Ce faisant, le régime redessine la répartition
des populations et s’assure ainsi de la présence de soutiens du pouvoir ou de
personnes dépendantes de celui-ci dans les zones clés de la Syrie.
LES POLITIQUES
CLIENTÉLISTES DES AL-ASSAD
Le communautarisme
est inhérent au système étatique construit par Hafez Al-Assad. Dès son
accession à la présidence, il a pris en otage les alaouites, sa communauté
d’origine, les liant à son pouvoir et à son appareil sécuritaire. Il a aussi
composé avec la majorité sunnite en utilisant des politiques clientélistes afin
de s’assurer le soutien d’un certain nombre de fidèles à l’intérieur de cette
communauté. Il en fera de même avec les autres minorités nationales, leur
rappelant leur faible poids démographique face à la majorité sunnite.