Les leurres stratégiques d'Al-Qaïda et de Daech
Maher Farghaly
Daech et Al-Qaida ont bâti chacun sa propre
philosophie sur le soi-disant conflit qui oppose leurs idéologies respectives.
Ces idéologies ne peuvent en aucun cas se rencontrer. Chacune d’elle ne peut
subsister en présence de l’autre. Les deux groupes terroristes ont donc mis en
place le principe du « leurre stratégique », qui consiste à attirer
son ennemi vers une longue confrontation. Celui-ci réalise quelques gains, et
pense qu’il sera victorieux. En réalité, la poursuite de la confrontation sur
la durée assure la victoire de l’autre camps.
Revenons avec
notre mémoire quelques années en arrière. Lors de son deuxième discours après
les attaques du 11 septembre, Oussama Bin Laden, qui pensait sans doute à cette
stratégie, avait parlé du « roi » et du « petit garçon
». Le garçon a utilisé le leurre stratégique pour attirer le roi vers une
longue confrontation. Celui-ci pensait qu’il serait victorieux à la fin, et
qu’il se dabarrserait du garçon. Mais les tentatives répétées du roi de tuer le
garçon revenaient à reconnaitre implicitement qu’il n’était pas un Dieu comme
il le prétendait, et que le garçon, qui a été tué par la suite, est en réalité
sincère. Résultat : la population à cru au petit garçon. Et la nouvelle a
eu l’effet d’un coup de semonce sur le roi.
Le premier à avoir
parlé du leurre stratégique était Abdullah Mohamed, aujourd’hui grand
théoricien des groupes armés après l’emprisonnement d’Abou Moussab Al-Suri. Il
dit dans une étude qui circule sur les sites djihadistes : «Quand nous
parlons du djihad, nous parlons de la guerre, la guerre a besoin d'un plan, et
le plan doit être mis en place par étapes en fonction de la nature de la
guerre. Le tout pour atteindre un objectif tactique ou stratégique et cela
varie selon les données. Dans certaines guerres, le but est d’affaiblir
l'ennemi, et dans d’autres le but est de remporter la victoire, le premier but
complète le second ». Ce que nous comprenons de ces propos c’est qu’après
le succès du leurre stratégique, vient l’action militaire.
Abdullah Mohammed,
a parlé du chaos dans la région. Il se demande : Quel est le rôle que peut
jouer le mouvement djihadiste au cours de cette étape critique de l’histoire de
la nation ? Et quel projet convient à cette phase ? Quelles sont les chances de
succès? « Au début, je dis que face à ce chaos, les projets partiels
n'auront aucune chance de survivre », dit-il.
La thèse d’Abdullah est compatible avec
la théorie du choc des civilisations, imaginée par Huntington et selon laquelle
il n’y a pas de place dans ce monde pour deux ou trois cultures. Une seule
civilisation doit prévaloir et régner sur le monde. « Nous en tant que
musulmans sommes d'accord avec lui et donc nous nous battons pour éviter une
sédition. Nous avons la bonne annonce que notre religion entrera dans chaque
maison et école avec fierté ».