Algérie : l’opposant Karim Tabbou devrait être libéré dans deux semaines
Un an de prison, dont six mois ferme.
L’opposant algérien Karim Tabbou, arrêté en septembre, devrait être libre dans
deux semaines. Le jugement, très attendu, a été rendu mercredi 11 mars
dans une atmosphère électrique, alors que des dizaines de manifestants
s’étaient rassemblés devant le tribunal algérois de Sidi M’hamed, devenu le
haut-lieu de l’actualité judiciaire depuis le début du Hirak, le mouvement de
contestation politique né en février 2019.
Figure emblématique des détenus politiques
en Algérie, Karim Tabbou était poursuivi pour « entreprise
de démoralisation de l’armée », « atteinte à l’unité du territoire
national » et « incitation à attroupement ».
Le 5 mars, le parquet avait requis une peine de quatre ans de prison ferme
et 200 000 dinars d’amende (environ 1 470 euros) à son
encontre. Défendu par un collectif de 180 avocats, l’opposant avait
dénoncé des accusations infamantes et une procédure politique.
Karim Tabbou est le fondateur et
coordinateur de l’Union démocratique et sociale (UDS) après avoir été, de 2007
à 2011, le premier secrétaire du Front des forces socialistes (FFS), le plus
ancien parti d’opposition d’Algérie. Son arrestation avait créé une onde de
choc dans l’opposition, M. Tabbou étant le premier responsable politique
poursuivi et incarcéré en raison d’activités liées au Hirak.
« C’est
une épée de Damoclès »
« C’est une condamnation surprenante
et lourde. D’autres militants ont été acquittés dans le même type de dossiers.
C’est une nouvelle tendance qui s’inscrit dans le durcissement et la
criminalisation de l’action politique », estime Saïd Salhi, membre de la Ligue algérienne pour
la défense des droits de l’homme, joint par Le Monde Afrique à
l’annonce du jugement : « Karim Tabbou a déjà passé six mois
en prison. Six mois de condamnation avec sursis, c’est aussi une manière de
mettre la pression et de lui interdire toute activité politique. C’est une épée
de Damoclès. »
Cette condamnation intervient alors que la
justice algérienne montre des signes de raidissement dans son traitement des
opposants politiques. Mardi, le tribunal de Sidi M’hamed a placé sous contrôle
judiciaire un journaliste et envoyé en prison préventive trois militants du
Hirak, dont l’une de ses figures, Samir Belarbi, qui venait à peine de sortir
de cinq mois de détention.
Dans cette atmosphère viciée, Karim Tabbou,
que ses avocats n’ont pu apercevoir qu’à distance, a été présenté devant la
cour le visage marqué, un pansement sur le nez et claudiquant, après que le
fourgon cellulaire chargé de son transport a été impliqué dans un accident de
la circulation survenu entre la prison de Koléa (à 30 km l’ouest de la
capitale) et le tribunal.