Trois jours après l'assassinat du général iranien Qassem Soleimani, le Parlement irakien a demandé au gouvernement, le 5 janvier, par le vote d'une résolution, de "mettre fin à la présence des troupes étrangères" en Irak. Le député Ahmed Al Kanani faisait ce jour-là partie des plus virulents contre les États-Unis.
"Les États-Unis et le Pentagone ont dit explicitement qu'ils avaient ordonné la frappe [contre Soleimani]. On ne veut plus d'eux. Pour nous, c'est une déclaration de guerre", explique à France 24, lundi 20 janvier, Ahmed Al Kanani, député et membre du parti Al Sadiqoun, l'aile politique d'un groupe armé irakien proche de Téhéran. "Nous allons intensifier l'effort diplomatique et politique pour que le gouvernement d'Adel Abdel Mahdi, ou le prochain gouvernement, mette fin à la présence étrangère", poursuit-il.
À la différence des lois, les résolutions du Parlement ne sont pas contraignantes pour le gouvernement. Toutefois, avant le vote de cette résolution, le Premier ministre irakien démissionnaire, Adel Abdel Mahdi, avait lui-même appelé le Parlement à mettre fin à la présence des troupes étrangères, alors que près de 5,200 soldats américains sont toujours présents sur le sol irakien.
Le rejet des forces étrangères gagne du terrain
Sur la place Tahrir, à Bagdad, épicentre de la contestation qui réclame depuis début octobre une refonte du système au pouvoir, les manifestants ne soutiennent pas la décision du Parlement. Beaucoup y voit une résolution prise "sous influence iranienne et non dans l'intérêt du peuple", alors qu'ils réclament la fin de toute ingérence et manifestent contre les "deux occupants : Américains et Iraniens".
"On veut être libres, sans les États-Unis et sans l'Iran. Au cours des 16 dernières années, quels bénéfices avons nous eu des troupes américaines ici ? Quels bénéfices de l'Iran en Irak ?" questionne Ammar, un manifestant.
Le rejet des forces étrangères gagne du terrain en Irak, mais il ne fait pas l'unanimité. Originaires de la région sunnite d'Al-Anbar, Khalid Alrawi et Mamdooh Alrawi ont fui le groupe État islamique (EI) en 2015, avant de s'installer à Bagdad. Pour eux, la présence de la coalition est une question de sécurité dans la région.
"Au Kurdistan et dans toutes les régions sunnites, je dirais que 90 % d'entre nous ne voulons pas d'un départ américain. Les villes ont été libérées du groupe État islamique, mais les jihadistes sont toujours dans le désert", explique Khalid Alrawi. Plus encore que l'EI, Khalid et Mamdooh redoutent les milices chiites. Alors avec les Américains, il se sent en sécurité. Un discours très éloigné de celui qui se tient dans le cénacle politique irakien.