Des mercenaires russes accusés d’avoir torturé et décapité un déserteur de l’armée syrienne
En juin 2017, après l’apparition sur Internet d’une
vidéo montrant des hommes armés, russophones, torturer un homme en Syrie,
des doutes subsistaient. L’enquête publiée mercredi 20 novembre par le
journal russe Novaïa Gazeta balaie
ces interrogations : les quatre combattants que l’on voit s’acharner sur
un homme puis sur son cadavre sont bien des mercenaires de la société militaire
privée Wagner ; l’un d’eux a même été identifié nommément par les
journalistes.
Les images de 2017 montraient des combattants frapper un
homme au sol à coups de masse et de pied. Les bourreaux parlaient et
plaisantaient certes en russe, sans accent, mais aucun élément ne permettait de
les identifier, aucun visage n’apparaissait face à la caméra.
Au cours du mois de novembre, trois autres vidéos de la
même scène ont été mises en ligne, permettant à Novaïa Gazeta de
poursuivre son enquête. On y voit les hommes tenter laborieusement, tout en
continuant à plaisanter, de couper la tête de la victime avec un couteau. Un
autre essaie, en donnant des coups avec le tranchant d’une pelle, de lui couper
les bras. « Maniaques »,
ironise l’un des combattants, quand l’autre conseille : « Laissez-lui
les jambes, on va le pendre par les jambes. » La dernière
séquence montre la victime accrochée par les pieds, sans tête ni bras, aspergée
d’essence et finalement en flammes, sans que cessent les plaisanteries sur le « barbecue » en
préparation.
Sur le site pétrolier d’Al-Chaer
Au début de novembre, le site d’opposition syrien Jesr Press,
réputé fiable, était parvenu à identifier la victime comme étant Mohammed Taha
Ismail Al-Abdoullah, un Syrien né à Deir ez-Zor en 1986, qui avait fui la
guerre civile dans son pays avant d’y revenir en 2017, pour être incorporé
de force dans l’armée de Bachar Al-Assad. Il aurait tenté de déserter, mais
aurait été capturé.
Sur les images, un seul des bourreaux montre brièvement
l’intégralité de son visage. En utilisant un programme de reconnaissance
faciale, Novaïa
Gazeta a trouvé sur les réseaux sociaux russes plusieurs
images correspondant à un certain « Stanislav D. » (que les
journalistes ne nomment pas, par égard pour sa famille), avant de mettre la
main sur une copie de son passeport et, surtout, sur ses documents d’engagement
chez Wagner, la plus célèbre des compagnies de mercenaires. Avant cela, l’homme
était policier dans la ville russe de Stavropol.