Publié par CEMO Centre - Paris
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Royaume-Uni: des élections législatives décisives jeudi pour l’issue du Brexit

lundi 09/décembre/2019 - 03:07
La Reference
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Les élections législatives de jeudi outre-Manche ont quelque chose de plus que d’habitude. Il ne s’agit pas seulement du traditionnel jeu politique entre la gauche et la droite, entre les travaillistes et les conservateurs, entre les récurrentes cures d’austérité et une éventuelle relance budgétaire. Dans une forme presque plébiscitaire, il s’agit cette fois de savoir si le Royaume-Uni sortira - ou non - de l’Union européenne d’ici le 31 janvier prochain selon le plan négocié par le premier ministre Boris Johnson et les négociateurs bruxellois.

Boris Johnson en rêvait depuis son arrivée au 10, Downing Street en juillet: convoquer des élections anticipées pour former une nouvelle chambre favorable à son accord de Brexit. Un pari qui, au regard des études d’opinion, semble largement à portée de l’excentrique premier ministre: selon l’agrégateur de sondages du Guardian , les intentions de vote en faveur des Tories n’ont cessé de remonter depuis juin dernier. Elles n’étaient alors que de 18% plaçant les conservateurs derrière le Brexit Party de Nigel Farage (favorable à une sortie sans accord de l’UE et vainqueur des élections européennes de mai dernier), le Labour (alors très ambigu sur le Brexit) et les Libéraux démocrates (favorables à une annulation pure et simple du Brexit). Depuis, les choses ont changé: les conservateurs sont largement en tête avec 43% des intentions de vote, largement devant les Travaillistes qui ont également remonté (33%). Dans les sondages, les deux grands perdants sont les jusqu’au-boutistes des deux bords: le Brexit Party (3%) et les «lib-dems» (13%).

«BoJo», comme il est surnommé, peut donc y croire, mais le souvenir du pari raté de Theresa May peut le rendre méfiant. En 2017, l’ancienne première britannique, alors rassurée par de bons sondages, avait organisé des élections anticipées. Las, à l’issue de celles-ci, elle avait récolté une majorité plus étroite, l’obligeant à former une alliance avec les députés nord-irlandais du Parti unioniste démocrate (DUP), particulièrement constants dans leur rejet de Bruxelles.

En tenant compte de ces tendances, quatre scénarios peuvent être étudiés:

Premier scénario: les Tories, emmenés par Boris Johnson, obtiennent la majorité absolue des sièges. «BoJo» a les mains libres pour faire valider son accord de Brexit à la nouvelle Chambre des communes et adapter le droit britannique à cette aune. Le Brexit peut être déclenché le 31 janvier. Ce scénario est probable.

Deuxième scénario: les conservateurs l’emportent, mais il leur manque quelques voix pour obtenir la majorité absolue. Seule solution pour les Tories: s’allier, comme précédemment, avec les députés du DUP (dix dans la précédente mandature) ou avec d’éventuels (mais improbables) députés du Brexit Party. Un problème émergerait immédiatement: le DUP est pour l’instant opposé à l’accord de Brexit, comme les députés du Brexit Party. Les deux partis estiment que Boris Johnson n’a pas obtenu suffisamment de concessions de Bruxelles. Même si «BoJo» parvenait à dégager une majorité parlementaire, une grande incertitude sur le Brexit demeurerait donc. Ce scénario d’une demi-victoire est possible malgré les sondages très encourageants pour les conservateurs car ce n’est pas le vote populaire global qui compte, mais le résultat, circonscription par circonscription.

Troisième scénario: il s’agit du même scénario que le deux, mais renversé. Le Labour remporterait les élections en nombre de sièges, sans obtenir pour autant la majorité absolue. Il leur faudrait alors former une alliance, par exemple avec les indépendantistes du Parti national écossais (SNP). Ils pourraient trouver un terrain d’entente sur le Brexit et sur un programme budgétaire anti-austérité, mais pourraient s’opposer sur la question d’une indépendance de l’Écosse, la dirigeante du SNP et première ministre écossaise, Nicola Sturgeon, souhaitant organiser dès 2020 un référendum d’indépendance, après celui de 2014 remporté par le non. Dans l’optique d’éviter à tout prix l’actuel accord de Brexit, une alliance pourrait aussi être conclue entre le Labour et les «lib-dems» même si leurs positions sur le Brexit divergent. Contrairement à ces derniers qui souhaitent annuler le Brexit, le dirigeant travailliste, Jeremy Corbyn, connu pour peu apprécier Bruxelles à titre personnel, souhaite négocier un nouvel accord de Brexit qui maintienne des liens plus étroits avec l’UE, puis le faire valider par référendum (l’alternative à la question posée étant un maintien dans l’UE). Une solution jugée floue par beaucoup d’observateurs, mais qui a le mérite, du point de vue du Labour, d’unir provisoirement un parti profondément divisé sur la question européenne. Ce scénario n’est pas le plus probable, mais n’est pas complètement improbable non plus, pour les mêmes raisons que le scénario numéro deux.

Quatrième scénario : le Labour emporte la majorité absolue des sièges à l’issue des élections. Âgé de 70 ans, marqué très à gauche, Jeremy Corbyn remplace Boris Johnson au 10, Downing Street et part négocier un nouvel accord de Brexit à Bruxelles. Ce serait alors derechef des mois d’incertitudes. Ce scénario est, au regard des sondages, très improbable.

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