Publié par CEMO Centre - Paris
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Éthiopie : le fort enjeu du référendum des Sidamas pour Abiy Ahmed

jeudi 21/novembre/2019 - 09:19
La Reference
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« Les opérations de vote se sont terminées dans le calme, sans qu'aucun incident ne soit rapporté aux forces de sécurité ou à nous », a indiqué mercredi soir à la presse la directrice de la communication de Commission électorale nationale (NEBE) Soleyana Shimeles. Les Sidamas – 2,3 millions d'inscrits au vote – ont donc voté dans le calme ce mercredi 20 novembre, décrété jour férié pour l'occasion. L'enjeu du scrutin est de taille, puisque les résultats du référendum pourraient donner l'autonomie à la région Sidama. En cas de « victoire de la shaféta » – cette jarre traditionnelle symbole des valeurs de la région qui représentait le « oui » –, la région quitterait ainsi l'État régional des nations, nationalités et peuples du Sud (RNNPS), auquel elle appartient actuellement et qui regroupe d'autres territoires.

Une requête historique

Une revendication que le pouvoir fédéral avait, jusqu'ici, toujours refusée. Pourtant, l'article 47 de la Constitution rédigée en 1995 exige que le gouvernement organise un référendum pour tout groupe ethnique souhaitant former une nouvelle entité, dans l'année qui suit sa demande. En 2005 déjà, au moment des élections, leur requête n'avait pas obtenu de réponse. Treize ans plus tard, en juillet 2018, les Sidamas avaient réitéré leur demande. S'en sont alors suivies des violences intercommunautaires qui ont fait plusieurs dizaines de morts. De ce fait, la tension qui a régné dans la région a conduit Addis-Abeba à placer la zone sous contrôle de la police fédérale et de l'armée.

Le référendum proposé hier est donc lourd de sens pour les partisans de l'autonomie. Le Mouvement de libération sidama (SLM) s'est toujours senti floué par l'arrivée au pouvoir du Front démocratique révolutionnaire des peuples éthiopiens (EPRDF) en 1991. C'est ce parti qui a en effet créé la RNNPS, et « fondu » la région Sidama dans cette grande entité de près de 112 000 kilomètres carrés, où se côtoient Sidamas, Kaffas, Hadiyas et Gouragés. C'est aussi ce même parti que dirige actuellement le Premier ministre Abiy Ahmed.

Quelles conséquences ?

Ce mercredi, le Premier ministre a salué en ce référendum « l'expression de la voie vers la démocratisation sur laquelle s'est lancée l'Éthiopie » et a appelé les Sidamas à « s'impliquer pacifiquement dans tout le processus ». Si le vote s'inscrit dans le plan de démocratisation voulue par Abiy Ahmed, elle cadre en revanche difficilement avec son approche centralisatrice du pouvoir. Ces derniers mois, il s'est évertué à tenter de calmer les ardeurs autonomistes des autres ethnies, invitant les uns et les autres à la patience. En effet, l'autonomie régionale pourrait engendrer de nombreuses conséquences, et en premier lieu le partage des richesses de la zone, dont l'économie est dominée par le tourisme et l'industrie textile.

« Le calendrier pour la formation de cette nouvelle région » et « l'allocation du budget fédéral » sont autant de sources potentielles de litiges, a estimé l'avocat et analyste politique Kiya Tsegaye à l'AFP. Le statut d'Hawassa, actuelle capitale de la région RNNPS dont les Sidamas veulent faire leur capitale, est aussi épineux. Un accord signé récemment prévoit que le gouvernement régional restera dans la ville pour les deux prochains mandats de cinq ans. Mais la question reste en suspens, car qu'en sera-t-il quand cette période prendra fin ?

Surtout, l'autonomie sidama pourrait donner des idées à d'autres régions d'Éthiopie, deuxième pays le plus peuplé d'Afriqueactuellement divisé en neuf régions semi-autonomes. Le risque d'une fragmentation est réel. Une dizaine de groupes de l'État ont déjà lancé des procédures similaires. À quelques mois des élections générales, prévues en mai 2020, la gestion du problème fait office de test pour le Premier ministre, tout juste auréolé du prix Nobel de la paix.


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