Abdelrahim Ali : Erdogan rompt avec Erbakan en 2001, dans une tentative de faire entrer la Turquie dans l’Union européenne
Dr Abdelrahim Ali, président du Centre d’Etudes du
Moyen-Orient à Paris, a affirmé que lorsque Erbakan fonda le mouvement Milli
Görüs, il commença à préparer le terrain en Turquie pour la domination de
l’islam politique : en 1970, il fonda le parti de l’Ordre national (MNP)
qui ne tarda pas à être dissout en 1971. Il fonda alors son second parti en
1972 : le parti du Salut national qui fut également dissout en 1980
lorsque l’armée turque prit le pouvoir.
Mais Erbakan ne se découragea pas et fonda en 1983 un
nouveau parti : le parti de la Prospérité (RF) qui fut interdit par la
Haute Cour constitutionnelle de Turquie car il violait les articles de la
constitution imposant la séparation de la religion et de l’Etat.
Et lorsque Erbakan, Erdogan et Gül se virent interdire la
pratique de la politique, d’autres membres du parti de la Prospérité fondèrent
le parti de la Vertu (FP) fin 1997, interdit lui aussi en 2001 par la Haute
Cour constitutionnelle.
Et le président du CEMO de poursuivre :
« Lorsque Erbakan, Erdogan et Gül furent à nouveau autorisés à réintégrer
la vie politique, on assista à une rupture claire entre la vieille garde
dirigée par Erbakan et la nouvelle génération du mouvement représentée par
Erdogan et Gül. C’est ainsi qu’Erbakan devint chef du parti de la Félicité en
2001, tandis qu’Erdogan et Gül fondèrent la même année le parti de la Justice
et du développement ».
Et d’ajouter : « Erbakan mourut en 2011, mais
nous pouvons affirmer que la pensée islamique consignée durant les années
soixante du siècle dernier dans son Manifeste représente la base du parti de la
Justice et du développement, fondé et présidé par la suite par Erdogan. C’est
aussi la même idéologie adoptée par le mouvement islamique Milli Görüs, fondé
en Europe mais qui s’est étendu aux Etats-Unis et en Australie.
Erdogan et Gül quittèrent cependant Milli Görüs suite aux
conflits internes qui tournaient autour des gains matériels de ce mouvement en
Europe. En effet, leurs revenus provenant du mouvement atteignirent un million
d’euros par mois pour la seule Allemagne ».
Ces déclarations ont été faites lors du colloque organisé
vendredi par le Centre d’Etudes du Moyen-Orient à Paris, présidé par le
journaliste Abdelrahim Ali, sous le titre « « La politique extérieure
de la Turquie et ses conséquences désastreuses pour l’Europe ». Y
participent le directeur exécutif du CEMO Dr Ahmad Youssouf, Pierre Berthelot, Roland Lombardi,
Joachim Véliocas, et Garen Shnorhokian, ainsi qu’un grand nombre d’experts et
de spécialistes du Moyen-Orient et de l’Europe, et des journalistes arabes et
français.