Au Liban, les femmes et leurs droits au cœur des manifestations
Alors que les manifestations contre la
corruption de la classe politique se poursuivent depuis une semaine au Liban,
des milliers de femmes ont rejoint les rangs de la contestation pour dénoncer
également les inégalités dont elles restent victimes.
Il s’en est fallu de peu.
En lançant un coup de pied dans l'entrejambe d'un garde ministériel armé d'un
fusil automatique, une jeune femme s’est muée en quelques heures en icône
des manifestations anti-corruption qui bousculent
le Liban depuis la semaine dernière. La vidéo d’à peine 5
secondes a été publiée vendredi 18 octobre, avant d’être reprise de façon
virale sur les réseaux sociaux, atteignant à ce jour plus de 62 000 vues.
Selon les médias libanais,
l’incident s'est produit dans la nuit de jeudi à vendredi, lors d'une
confrontation entre des manifestants et le convoi du ministre de l'Éducation
Akram Chehayeb, dans le centre-ville de Beyrouth. L'un des gardes du corps du
ministre est sorti de la voiture et a tiré en l'air avec un fusil d'assaut,
provoquant la colère des manifestants.
Tandis qu'un second garde
du corps pointe à son tour son fusil en l'air, une femme lui assène un coup à
l'entrejambe, faisant reculer l'homme, hagard. Depuis, la vidéo a été scrutée,
commentée, et même détournée dans l’œuvre de l’artiste libanais Rami
Kanso.
Une “Marianne
libanaise"
La jeune femme, dont
l'identité n'est pas encore connue, a été comparée à la "reine nubienne", autre symbole des
manifestations ayant conduit à la destitution du président Omar
el-Béchir au Soudan, le 11 avril. Une courte vidéo diffusée au
printemps dernier montrait une Soudanaise, tout de blanc vêtue, haranguer les
autres protestataires en chantant des slogans rythmés.
Au Liban, beaucoup se
disent impressionnées par cette jeune inconnue, déjà surnommée la “Marianne
libanaise”. Interrogée par l’AFP, Hannah, 24 ans s’est sentie encouragée à
se battre contre "une société patriarcale". "Nous ne devrions
pas avoir peur de frapper un homme, nous ne devrions pas avoir peur
d'eux", a-t-elle confié. "Il est temps de montrer notre force".
Mais nombre de femmes n’ont pas attendu la publication de cette courte séquence
pour manifester leur colère contre le pouvoir en place.
"Pas uniquement une
affaire d’hommes"
Depuis jeudi dernier, elles
sont des milliers à descendre dans les rues de Beyrouth, de Zahlé, dans la
plaine de la Bekaa, ou encore dans les villes côtières. “On voit des femmes
portant le voile, d’autres en bretelles, des jeunes, des moins jeunes, des
adolescentes ou encore des femmes enceintes”, explique notre correspondante à
Beyrouth, Zeina Antonios. “Elles viennent de toutes les classes sociales. Et
toutes les appartenances confessionnelles (chrétienne, druze, musulmane...),
régionales et partisanes sont représentées”.