Syrie: Les maux d'Idleb posés sur du rap qui dénonce
Devant un tableau d’une salle de classe criblé de balles, Amir
al-Mouarri scande son rap enragé, et dénonce les bombardements
meurtriers du régime syrien dans sa province d’Idleb, les universités fermées, mais aussi la
soumission face aux djihadistes et les rebelles.
Dans la région d’Idleb, où vivent quelque trois millions de personnes et qui échappe toujours au
pouvoir du président Bachar al-Assad, près d’un millier de civils ont été tués
dans des frappes meurtrières du régime et de son allié russe, entre fin avril
et fin août, date à laquelle un cessez-le-feu est entré en vigueur,
rétablissant un calme précaire.
Redonner une identité aux martyrs d’Idleb
C’est devant les ruines d’immeubles, que l’on retrouve
Amir al-Mouarri Cheveux noirs gominés plaqués en arrière, barbe taillée,
jean serré et chemise sombre : dans son premier clip posté sur les
réseaux sociaux, le rappeur martèle ses rimes en dialecte syrien.
Le rap mis en ligne en septembre a pour but
de dénoncer un conflit syrien qui s’éternise depuis 2011 et qui a fait
plus de 370.000 morts, mais aussi donner un visage aux millions d’anonymes
de la province d’Idleb.
Son clip Sur tous les fronts, qui
a vu le jour grâce à une collaboration avec d’autres artistes sur Internet et
dont le montage a été fait par des camarades au Liban, invite les habitants, du
vendeur de falafels à la mère de famille en passant par des secouristes de
casques blancs, avec une insistance sur leurs visages usés par la guerre.
Dénoncer les ravages de la guerre
La région est contrôlée par les djihadistes de Hayat Tahrir
al-Cham (HTS), l’ex-branche syrienne d’Al-Qaïda, et accueille aussi des
rebelles affaiblis par HTS, qui avaient afflué de tout le pays après la
reconquête de leurs fiefs par le régime syrien et ses alliés.
Le jeune rappeur, après avoir vécu à Istanbul est rentré
en Syrie en 2018, après la mort de son frère tué par une patrouille turque.
Une diatribe qui charge ceux aux pouvoirs qui
« se nourrissent de la guerre et du sang » les djihadistes de HTS
accusés de tortures ou de détentions arbitraires par des ONG internationales.
Un artiste en devenir
Le jeune rappeur annonce plancher sur de nouveaux
morceaux depuis sa chambre transformée en studio.
Malgré son ton critique, Amir al-Mouarri assure ne pas
avoir été inquiété, même si des militants affiliés à des groupes rebelles ou
d’autres organisations lui ont parfois conseillé « d’alléger » la
teneur de ses propos, alors que les voix dissidentes sont souvent menacées,
voire même liquidées.
« J’exprime ce que je vois. Et les gens sont avec
moi, tout le monde a positivement réagi à ce que j’ai dit, ils ont aimé les
sujets évoqués dans la chanson », assure-t-il, alors que son clip s’est
propagé à Idleb.
Amar-al-Mouarri ne souhaite qu’une chose, que les paroles
de son rap seront comprises afin de faire réagir car manifester ne sert à rien
dans une région contrôlée par une milice djihadiste bloquant les lieux de
culture.