Pourquoi les États-Unis ne doivent pas entrer en guerre contre l'Iran
Depuis le
retrait américain de
l'accord nucléaire en mai 2018, rien ne va plus entre Téhéran et Washington.
Après avoir
affirmé sur les chaînes américaines
que cet accord, signé à Vienne (Autriche) en juillet 2015, était «le
pire accord qui soit», Trump a rétabli les sanctions contre la
République islamique d'Iran, entraînant une grave crise économique dans le pays et un
renforcement du pouvoir des conservateurs, ceux-là même qui
étaient déjà contre l'accord il y a quatre ans.
Ce retrait unilatéral des États-Unis a
également laissé à l'Europe le rôle de médiateur. Les membres de l'Union
tentent de sauver ce qu'il reste de l'accord alors même que l'Iran menace de
s'affranchir de certains de ses engagements. Téhéran a
annoncé début juillet qu'il
recommençait à enrichir son uranium. En septembre, le président Rohani a affirmé que le pays reprenait la recherche et développement
dans le domaine du nucléaire. Enfin, Téhéran a menacé de passer à la prochaine
étape dans les deux mois, si aucune solution n'était trouvée par les Européens.
Loin de faire plier l'Iran, la stratégie
américaine de pression maximale pousse Téhéran à répondre en «montrant
des dents», explique Thierry Coville, chercheur à l'Iris, spécialiste du pays. Preuve s'il en
est, les tensions dans le Golfe persique.
Le 13 juin on
assistait à l'attaque de deux
pétroliers et quelques jours plus tard, le 20 juin, l'Iran affirmait avoir
abattu un «drone espion américain». «Les Iraniens sont plus confiants.
Il voient que jusqu'à présent leur stratégie de résistance contre les
États-Unis semble fonctionner. Ils sont donc encouragés à aller plus loin et
c'est là leur erreur. Ils font un mauvais calcul en pensant que Trump est
réticent à s'engager au Moyen-Orient», explique Ali Vaez, directeur du programme Iran à l'International Crisis
Group à Washington. «La stratégie iranienne, c'est de dire: “J'ai des
alliés dans la région”. Le risque, c'est qu'il y ait un événement qui conduise
à un conflit. Il suffit d'un mauvais calcul, d'une mauvaise interprétation ou
d'une surréaction», s'inquiète Thierry Coville. Ainsi, selon Ali
Vaez, «aucun des partis ne veut la guerre mais ils peuvent très
facilement y sombrer».
Une «guerre totale»
Or, si un conflit éclate et que l'Iran est
attaqué, les conséquences seront désastreuses. Le 20 septembre le chef de la
diplomatie iranienne Mohammad Javad Zarif a affirmé lors d'une interview pour CNN que, en cas d'attaque contre l'Iran, il faudra
s'attendre à une guerre totale dans la région.
«Cette réponse, c'est finalement la
stratégie militaire de l'Iran, affirme
Thierry Coville. Du fait des sanctions, la République islamique ne fait pas
le poids en matière d'équipement militaire ou d'aviation, ils utilisent donc la
stratégie de dissuasion.»
Interrogé l'an dernier sur les
représentations de martyrs dans les rues et sur les façades de certains
bâtiments iraniens, Habib
Ahmadzadeh, chercheur iranien
spécialiste du conflit
Iran-Irak expliquait que ces
fresques à la gloire des suppliciés sont des moyens de dissuasion face aux
menaces étrangères et non pas un appel à la guerre: «Ces images sont
une manière de dire que, en cas de guerre, notre peuple est prêt à se battre
pour se défendre», déclarait-il.