En Irak, des jeunes se lèvent pour sauvegarder leur patrimoine (reportage)
On connait de l’Irak des images de pays en ruine, de
désespoir et de destruction. On connait moins le courage et la rage de vivre de
certains de ses habitants qui cherchent à sauvegarder leur patrimoine
millénaire. A l’occasion des journées du patrimoine, rencontre avec les jeunes
partenaires que nous soutenons en Irak.
L’immense
édifice, énorme parallélépipède à degrés de 80
mètres de long sur 64 de large et 30
de hauteur, est, de loin, massif, solide, impénétrable.
De près, il semble vertigineux et mystérieux, mais les
briques ocres qui le constituent laissent voir l’empreinte humaine.
Salman
Khairallah désigne d’un grand geste la ziggourat d’Ur qui
se dresse au bout d’une route désolée. « C’est
un des grands vestiges de la civilisation sumérienne ! »,
s’exclame-t-il.
La
loi et l’écriture ont été inventée ici
La ziggourat d’Ur a été dressée dans la plaine, en
bordure des marais des deltas du Tigre et de l’Euphrate.
La Bible affirme que le prophète d’Abraham y
a vu le jour.
La ville d’Ur était, au IIIe millénaire avant JC, le coeur de la Basse
Mésopotamie. Une des cités les plus puissantes de
ce temps. Et la ziggourat en est le vestige le plus spectaculaire.
Elle a été construite pour le Dieu-Lune Nanna.
Salman est heureux de raconter comment avec d’autres
jeunes irakiens, ils ont participé à ce qu’elle soit classée au Patrimoine
de l’Humanité par l’Unesco, avec les marais du Sud de
l’Irak. C’est tout un pan de l’Histoire humaine que
nous voulons ainsi contribuer à protéger. »
Salman,
moins de trente ans, est reconnaissable à son dynamisme infatigable et à ses
lunettes à monture orange, une rareté en Irak. Cet ingénieur spécialiste
de l’environnement est membre de l’ICSSI (Initiative
de Solidarité de la Société Civile Irakienne), soutenue par le CCFD-Terre Solidaire.
C’est un des fondateurs de la Campagne pour sauver le Tigre et
les marais du Sud de son pays.,
que nous soutenons également.
Mobilisés autour de la protection de leur environnement,
le combat des
jeunes militants s’est étendu naturellement à la protection des sites antiques menacés
par l’érosion, les guerres, les pillages.
L’initiative
des jeunes pour redonner vie au site d’Ur
Les jeunes de l’ICCSI ont fondé l’Initiative
Urim, du nom de la ville de Ur en langue sumérienne. « Notre principal objectif est de pousser
le gouvernement à mettre en place un plan de développement et de gestion
conforme aux exigences de l’Unesco », explique Bassem Tiranu,
jeune architecte.
Le site d’Ur n’est plus fouillé : les équipes d’archéologues internationaux n’ont
pas l’autorisation de leurs gouvernements de se rendre en Irak pour cause
d’insécurité. Leurs collègues irakiens n’ont pas les moyens de mener ces
travaux seuls.
Et les autorités publiques considèrent qu’elles ont d’autres chats à fouetter
dans un pays exsangue depuis des décennies.
Le site n’est plus visité non plus : les Irakiens ont perdu l’habitude de
visiter leur pays. Trop dangereux pendant trop longtemps. De toute façon, sur
le site aucune structure n’est prévue pour les accueillir.