Les Soudanaises à l’avant-garde de la dernière révolution arabe
Toutes les semaines, chronique de la vie quotidienne,
sociale et culturelle dans les pays arabes.
Asma Mohamad Abdallah, 73 ans, vient d’être
nommée ministre des Affaires étrangères dans le nouveau gouvernement formé
jeudi au Soudan, issu de l’accord de partage du pouvoir entre les civils et les
militaires. Ce n’est pas tout à fait une première dans le monde arabe,
puisqu’en Mauritanie une femme a occupé ce poste en 2015, pendant quelques mois
seulement. Mais c’est un marqueur des avancées démocratiques accomplies depuis
un an par une révolution soudanaise où les femmes ont pris une place remarquée.
Les images de la magique et dynamique jeune
étudiante toute de blanc vêtue qui haranguait la foule en chantant et dansant
sur le toit d’une voiture en avril avaient envahi les réseaux sociaux. La scène
se déroulait devant le quartier général militaire de Khartoum où un sit-in de
plusieurs semaines a réclamé et obtenu le renversement du dictateur islamiste
Omar el-Béchir.
Alaa Salah, 22 ans était devenue une icône des manifestants en déclamant un
poème sur la liberté. Elle s’était présentée comme une héritière des «Kandaka»,
les souveraines nubiennes qui régnaient avant l’ère chrétienne. Une affiliation
revendiquée également par une autre nouvelle figure féminine de la scène
politique soudanaise, Raja Nicolas Abdel Massih, juriste sexagénaire et
chrétienne. Elle est l’une des deux femmes membres du Conseil souverain du
Soudan, l’instance agréée entre les militaires au pouvoir et «les forces de la liberté et du changement» (regroupement de l’opposition civile), pour gérer
la transition vers la démocratie.
Les deux parties
ont mené de longues et âpres négociations pour s’accorder sur la mise en place
des instances de transition.
Dans le nouveau projet de Constitution, le code de la famille a supprimé toute
discrimination envers les femmes. Celles-ci doivent par ailleurs occuper 40%
des sièges de l’Assemblée législative de 300 membres qui doit être mise en
place d’ici le 15 novembre.
«Qui avance sur le bon chemin finit par arriver», dit la nouvelle ministre des Affaires étrangères en
citant un proverbe soudanais. La diplomate de carrière qui avait été écartée
depuis 1989 de toute fonction à la suite du coup d’Etat d’Omar el-Béchir,
considérée comme peu compatible avec le nouveau pouvoir islamiste, fait un
retour en force à l’âge de la retraite.