L’accord sur le nucléaire iranien de 2015 va-t-il finir par voler en
éclats ? Téhéran, asphyxié par les sanctions américaines, se délie encore
un peu plus de ses engagements. La République islamique vient de mettre en
route des centrifugeuses avancées dont la production augmentera le stock
d’uranium enrichi produit par le pays, a annoncé le porte-parole
de l’Organisation iranienne de l’énergie atomique (OIEA), Behrouz
Kamalvandi, samedi 7 septembre.
Le porte-parole a détaillé les mesures de la nouvelle phase du plan de
réduction des engagements pris par l’Iran devant la communauté internationale à
propos de ses activités nucléaires. Il a insisté sur le fait que les
engagements pris par l’Iran sur la « transparence » de ses
activités nucléaires seraient « honorés comme avant ».
Cela concerne en particulier « la surveillance et l’accès » des
inspecteurs de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), a déclaré
M. Kamalvandi lors d’une conférence de presse retransmise en direct par la
télévision d’Etat.
40 centrifugeuses avancées
Parmi les mesures constituant une réduction des engagements de l’Iran,
M. Kamalvandi a annoncé que l’OIEA avait mis en route
20 centrifugeuses de type IR-4 et 20 autres de type IR-6, alors que
l’accord sur le nucléaire iranien de 2015 ne l’autorise à ce stade à
produire de l’uranium enrichi qu’avec des centrifugeuses de première génération
(IR-1).
Le démarrage de ces centrifugeuses devrait accélérer la production
d’uranium enrichi par l’Iran et augmenter les stocks du pays, qui depuis
juillet dépassent la limite fixée par cet accord (300 kg) conclu
entre la République islamique et le groupe 5 + 1 (Chine,
Etats-Unis, France, Grande-Bretagne, Russie et Allemagne).
L’Iran a commencé en mai à réduire les engagements qu’il a consentis au
titre de cet accord en représailles de la décision prise un an plus tôt par les
Etats-Unis de dénoncer le texte et de réimposer des sanctions économiques à
Téhéran.
Le ministre américain de la défense Mark Esper a affirmé samedi
n’être « pas surpris » de cette annonce. « Ils
violent déjà (l’accord sur le nucléaire), ils violent le traité de
non-prolifération depuis des années donc ce n’est pas une surprise »,
a-t-il commenté.
M. Rohani estimait ne pas être parvenu au résultat désiré dans le
cadre de la récente tentative diplomatique conduite par la France pour tenter
d’éviter que l’accord sur le nucléaire ne vole en éclats.
Violente récession économique
L’accord de Vienne est menacé depuis que les Etats-Unis en sont sortis
unilatéralement, en mai 2018, avant de rétablir des sanctions
économiques contre l’Iran, dont l’économie, entrée au deuxième semestre 2018
dans une violente récession, est asphyxiée par la politique américaine de « pression
maximale ». Les nouvelles mesures sont prises « afin que nous
puissions assister à une expansion dans [le domaine] des centrifugeuses »,
et « nous savons que c’est un grand pas que fait la République
islamique d’Iran », a déclaré M. Rohani.
En représailles au retrait américain de l’accord, les autorités iraniennes
ont commencé depuis mai à revenir sur certaines restrictions imposées à leur
programme nucléaire (augmentation des stocks d’uranium enrichi au-delà de la
limite fixée par l’accord de Vienne, enrichissement de ce minerai à un niveau
prohibé par le texte, soit plus de 3,67 %).
Le 7 juillet, elles ont donné soixante jours, jusqu’à jeudi, aux
parties restant attachées à l’accord (Allemagne, Chine, France, Royaume-Uni et
Russie) pour les aider à contourner les sanctions américaines, sous peine de
les voir s’affranchir d’autres obligations.