Au salon aéronautique de Moscou, le MC-21 en vedette pour conjurer la morosité
La Russie a présenté mercredi son nouveau moyen-courrier MC-21 au salon MAKS de Moscou, mais sa présence ne suffira pas à faire oublier les difficultés de la filière aéronautique russe, en pleine réorganisation.
Sous le soleil, hommes d'affaires en costume et militaires en tenue d'apparat se sont pressés sur le tarmac de l'aéroport Joukovski, en banlieue de Moscou, où des dizaines de vieux appareils soviétiques côtoient les derniers nés du complexe militaro-industriel russe.
Très attendu, l'avion développé par la compagnie publique Irkut est censé concurrencer l'A320 et le B737, les modèles phares d'Airbus et Boeing. Il a volé pour la première fois loin de l'usine d'Irkoutsk (Sibérie) où il est construit.
Le MAKS-2019 avait accueilli la veille le président russe, Vladimir Poutine, et son homologue turc, Recep Tayyip Erdogan, venus discuter de la Syrie mais aussi observer de près les derniers modèles d'avions de combat russes, tous présents au salon.
"Nous avons conclu plusieurs accords concernant le MC-21 au cours du forum", a déclaré, sans préciser lesquels, le directeur général d'Irkut, Ravil Hakimov, qui assure que la demande pour ce type d'avions sera au moins de 30.000 exemplaires dans le monde et 1.000 en Russie à l'horizon 2030.
Selon lui, les premières livraisons sont prévues au deuxième semestre 2021, mais le MC-21 doit jusqu'à présent se contenter de chiffres de vente assez modestes, avec 175 commandes fermes et 150 intentions de vente, selon Irkut.
Pour la Russie, la réussite du MC-21 est cruciale. Il a la lourde tâche de raviver les ambitions déçues de l'aviation civile russe et de faire oublier la débâcle du Soukhoï Superjet 100 (SS-100), lancé en 2011, premier appareil civil conçu en Russie depuis la chute de l'URSS, dont les ventes à l'étranger sont presque nulles.
Il s'attaque à un marché bien plus gros puisqu'il doit concurrencer les valeurs sûres des géants Airbus et Boeing. Mais le MC-21 n'a cessé de rencontrer des obstacles depuis son premier vol d'essai en 2017.
Alors qu'il devait initialement être mis en service fin 2018, la date a été repoussée plusieurs fois. Comme le SS-100, l'avion est en effet conçu en partie avec des pièces étrangères, notamment d'indispensables matériaux composites importés des Etats-Unis par une entreprise russe visée depuis septembre 2018 par des sanctions.
Rostec s'emploie depuis à trouver des fournisseurs russes ainsi qu'à produire son propre moteur pour proposer une alternative aux moteurs américains Pratt & Whitney. Pas encore prêt, le moteur russe "sera testé l'année prochaine et devrait recevoir sa certification en 2021", assure Konstantin Popovitch, designer en chef du MC-21.
- Ambitions déçues -
Source de fierté à son lancement, le SS-100 a connu un succès limité au-delà de la Russie, à cause notamment de lourds coûts de maintenance et de problèmes de fiabilité. En mai, l'incendie d'un appareil de ce type après un atterrissage d'urgence à Moscou, qui a fait 41 morts, a encore assombri son avenir.
Le MAKS-2019 doit aussi montrer les premier résultats de l'incorporation du groupe United Aircraft Corporation (UAC), qui rassemble les principaux avionneurs civils et militaires russes (Soukhoï, Antonov, Tupolev...), au sein du conglomérat public Rostec.
Annoncée fin 2018, cette opération doit être finalisée en 2020 et est censée résoudre les nombreux problèmes d'organisation et de financement ralentissant le développement de nouveaux avions.
Depuis la crise ukrainienne de 2014, les sanctions occidentales, surtout américaines, ne cessent de se renforcer contre l'économie russe, et notamment contre son industrie de défense. Ces sanctions visent notamment Rostec et son influent patron, Sergueï Tchémézov, réputé proche du président Poutine.