Numérique, climat, inégalités: les enjeux planétaires du G7
Outre les crises diplomatiques du moment (Iran, Syrie, Ukraine…), Emmanuel Macron a inscrit à l’agenda de «son» G7 de grands enjeux planétaires. Sur ces sujets, l’hôte du sommet veut éviter les grandes déclarations d’intention pour «avancer sur des actions très concrètes», en bâtissant des «coalitions» d’États à géométrie variable, au besoin associées à des entreprises, des collectivités ou des ONG, assurait-il mercredi devant la presse présidentielle.
● La crise des inégalités
Fractures Nord-Sud, riches-pauvres au sein des pays du G7, hommes-femmes: «Nous vivons une crise des inégalités» tous azimuts, constate Emmanuel Macron, laquelle fait le lit de «la démocratie illibérale» et des «régimes autoritaires». C’est dans le cadre de la lutte contre les inégalités que la France a convié au sommet les chefs d’État de cinq pays africains (Afrique du Sud, Burkina Faso, Sénégal, Égypte et Rwanda).
Au sein des pays du G7, ce dossier des inégalités «est plutôt consensuel», note une source gouvernementale française. En revanche, il alimente la colère des ONG, dont plusieurs dizaines sont réunies au «contre-G7» à Hendaye et Urrugne. «Tout en multipliant les grands discours sur les dangers des inégalités, les pays du G7 - qui représentent 10% de la population mondiale mais possèdent la moitié de la richesse du globe - ont encouragé le développement d’un système inégalitaire qui permet aux multinationales et aux ultrariches de contrôler les décisions politiques en leur faveur», dénonce ainsi Oxfam.
À l’échelle planétaire, pourtant, les inégalités se sont globalement réduites. La part de la richesse mondiale détenue par les pays industrialisés s’est réduite, de 80% à 71% entre 2000 et 2014, selon un rapport de McKinsey Global Institute publié pour le G7. Mais au sein des pays riches, relève le même rapport, les 1% les plus riches perçoivent 11% des revenus avant impôt (en 2014) contre 6% en 1980. S’agissant de l’égalité hommes-femmes, sujet mis en avant lors du précédent G7 sous présidence canadienne, Emmanuel Macron a annoncé vendredi depuis l’Élysée, où il recevait la société civile, un «partenariat». Les pays pourront dans ce cadre «s’engager à éliminer les discriminations».
La fracture climatique
Depuis que Donald Trump a retiré les États-Unis de l’accord de Paris (signé en 2015), le G7 est fracturé sur le climat, entre les Américains, deuxièmes émetteurs de gaz à effet de serre après la Chine, d’une part, et les six autres États d’autre part. Emmanuel Macron a renoncé à convaincre Donald Trump sur le sujet car «c’est un engagement de campagne, vous ne pouvez pas revenir dessus», a-t-il admis mercredi devant la presse. L’hôte du sommet de Biarritz compte avancer en réunissant des «coalitions» sur des objectifs précis, comme celle qui devrait s’engager sur les HFC, les gaz des climatiseurs, «14.000 fois plus réchauffant» que le CO2, précise doctement Emmanuel Macron.
● Le bras de fer sur la taxe Gafa
La taxation des entreprises du numérique relève, pour Emmanuel Macron, de cette crise protéiforme des inégalités. «Quand un acteur du numérique dans l’hôtellerie qui ne paie ni la TVA ni quoi que ce soit vient concurrencer sur son activité un hôtelier qui paie l’impôt sur les sociétés, la TVA et différentes taxes locales, ce n’est pas juste, ce n’est pas soutenable», pose en préambule le président français. Sur ce dossier, contrairement à une idée reçue, les États-Unis ont été moteurs d’une vaste négociation, organisée par l’OCDE, pour accomplir une révolution du système fiscal afin de pouvoir taxer des sociétés là où elles font du profit sans même avoir une présence physique.
Le G7 des ministres des Finances, réuni à Chantilly le mois dernier, a accouché d’un «texte ambitieux», se félicite une source gouvernementale française. «Seulement, là où on aurait pu avoir une situation gagnante, on a à présent un dialogue de sourds entre Paris et Washington», regrette un acteur au fait des discussions internationales sur la taxation. Car pour des raisons de politique intérieure, mais aussi pour créer un élan européen, Paris a mis en place sa propre taxation sur le numérique, qui irrite fortement les Gafa et Donald Trump, qui menace en représailles de taxer le vin français. La France a toujours dit qu’elle mettrait fin à son impôt si une solution internationale était adoptée. Les chefs d’État vont tenter d’avancer en ce sens mais la crispation est là.