Les anciens patrons de la Fed demandent à Trump d’arrêter ses pressions
Les quatre derniers présidents de la banque centrale américaine ont lancé
un appel à respecter l’indépendance de l’institution, alors que les décisions
sur les taux ont une nouvelle fois déçu Donald Trump.
Trop,
c’est trop! Les attaques répétées de Donald Trump contre la banque centrale
américaine et son président, Jerome Powell, qu’il a pourtant nommé début 2018,
ont fait sortir du bois les quatre derniers patrons de la Fed. Soit tous les
«ex» encore vivants. Dans une tribune inédite publiée lundi soir par le Wall Street Journal ,
les nonagénaires Paul Volcker, 91 ans, président de la Fed de 1979 à 1987, et
Alan Greenspan, 93 ans, 1987-2006, ainsi que leurs cadets Ben Bernanke, 65 ans,
2006-2014, et Janet Yellen, 72 ans, 2014-2018, défendent l’indépendance de
l’institut d’émission.
«La
Fed doit pouvoir agir en toute indépendance et, dans le meilleur intérêt de
l’économie, libre de pressions politiques de court terme et surtout sans menace
de révocation de ses dirigeants pour des raisons politiques», écrivent ainsi
les quatre sommités. Ensemble, ils ont tenu les rênes de la politique monétaire
américaine pendant 40 ans et ont été nommés ou reconduits par six présidents,
républicains et démocrates.
Ce
soutien à leur successeur Jay Powell intervient alors que lundi encore, à la
faveur d’un tweet sur la dépréciation du yuan chinois, Donald Trump
interpellait une fois de plus son banquier central: «Vous écoutez, la Réserve
fédérale?» Avec en sous-entendu: vous devriez réduire davantage vos taux
d’intérêt pour faire baisser le dollar.
Déception sur Twitter
Le
31 juillet, alors que la Réserve fédérale a justement diminué son taux
directeur - une première depuis la fin de la crise financière de 2008 - pour adapter
l’économie à une conjoncture plus incertaine, le président américain y était
allé de son commentaire sur Twitter: «Comme d’habitude, Powell nous a déçus.
(…) Je ne reçois pas beaucoup d’aide de la Réserve fédérale.» Le Congrès a
«sagement établi» la Fed comme une agence indépendante, rappellent les quatre
prestigieux signataires de la tribune. Les membres de son Conseil des
gouverneurs ne peuvent être révoqués que pour manquement à la loi.
«L’économie est plus forte quand la banque centrale agit
de façon indépendante»
Les
exemples de dirigeants politiques enjoignant à leur banquier central de donner
un coup de fouet à l’économie abondent, rappellent les quatre ex-gouverneurs.
Mais l’histoire a démontré, et la science économique l’a confirmé, que
«l’économie est plus forte quand la banque centrale agit de façon indépendante».
Janet Yellen et ses cosignataires ne vont pas jusqu’à dire qu’une banque
centrale indépendante est la marque de fabrique d’une démocratie saine, même si
c’est perceptible entre les lignes. L’actualité rappelle justement qu’à Pékin
la «Banque du Peuple» reste au service des dirigeants communistes. En Turquie,
le président Erdogan a limogé le gouverneur de la banque centrale le mois
dernier, insuffisamment docile à ses yeux. Le maintien de taux élevés a eu
pourtant le mérite de soutenir la livre turque.