Coopération - Giyoun Kim : « Collaborer avec l'Afrique, c'est collaborer avec le monde »

Face à la concurrence des grands voisins
chinois et japonais, la Corée du Sud compte sur la Korea-Africa Foundation et
sa vice-présidente Giyoun Kim pour renforcer la coopération avec le continent
africain.
En entendant pour la première fois le nom Korea-Africa Foundation, certains s'imaginent qu'il est question d'une énième organisation d'aide humanitaire. Il n'en est rien. Le rôle de cette structure est de développer les relations diplomatiques avec l'Afrique ainsi que les échanges entre secteurs privé et public. Créée en juin 2018, il s'agit de la 4e dépendance du ministère coréen des Affaires étrangères, après la Koica (Agence coréenne de coopération internationale) en charge des programmes d'aide, la Korea Foundation, qui se concentre sur les échanges culturels à l'international, et l'Overseas Korea Foundation, qui assiste la diaspora coréenne.
Le gouvernement coréen place de grands
espoirs dans cette 4e instance qui doit servir de plateforme coopérative avec
tout un continent. « Cette institution est une expérience unique en son
genre », souligne Giyoun Kim, la vice-présidente de la Korea-Africa Foundation.
« C'est la première agence gouvernementale axée sur des régions précises
du globe. Elle reflète la volonté du gouvernement d'accorder plus d'attention à
ses relations avec le continent africain et d'investir pour l'avenir.
Une vision qui se veut à long terme
« À
la fondation, nous voulons avoir une approche holistique pour développer
cette coopération entre la Corée du Sud et nos pays partenaires », annonce d'emblée la
vice-présidente. En ce qui concerne les affaires, une bonne compréhension des
pays où l'entreprise exerce ses activités est nécessaire et « nous ne
pouvons pas avoir une vision à court terme ». La fondation va donc prendre
le temps et se donner les moyens de mener des recherches d'experts et des
études sur l'Afrique. Ce type d'approche fait partie de la stratégie
diplomatique coréenne. « La Corée a, elle aussi, reçu des aides et
aujourd'hui c'est un pays donateur », rappelle Giyoun Kim. « En
termes de ressources naturelles, nous étions très pauvres, particulièrement
après la guerre de Corée : le pays était dévasté. Économiquement et
socialement, nous avons beaucoup accompli. Nous avons fait d'énormes progrès
dans les technologies de l'information et de la communication. À travers cette
histoire et notre expérience, nous avons développé notre propre vision et notre
propre façon d'interagir avec les autres pays. Et cela va aussi se refléter sur
la façon dont la fondation va mener ses actions », assure la
vice-présidente.
Focus sur la jeunesse et l'entrepreneuriat
Lors de
l'inauguration de la fondation, la ministre coréenne des Affaires étrangères
avait souligné l'intérêt croissant des Coréens – notamment les jeunes – pour
l'Afrique. Il y a deux mois, Giyoun Kim participait à une réunion avec des
start-up actives dans certains pays d'Afrique, où l'un des participants a fait
remarquer : « Vous savez , l'Afrique, c'est le monde, l'Afrique
elle-même est globale, ce qui veut dire que, si vous avez
des opérations commerciales en Afrique, vous travaillez déjà à un niveau global. »
« C'est le but que nous poursuivons, appuie Giyoun Kim. L'Afrique est un
continent très diversifié, alors, si notre jeunesse travaille avec l'Afrique,
ça veut dire qu'elle travaille avec le monde. »
La fondation mise donc beaucoup sur la jeunesse et sa capacité à entreprendre. Plusieurs projets ont été lancés dans ce sens, à l'instar de l'African Students Community Meeting, qui s'est tenu en novembre dernier à Séoul. « En Corée du Sud, nous avons près de 2 800 étudiants africains. Beaucoup de gens sont surpris de l'apprendre parce qu'il est rare de les rencontrer. Donc, dans un premier temps, nous avons pensé qu'il était important de créer une plateforme et un espace où ces étudiants pouvaient échanger. Beaucoup d'entre eux sont isolés parce qu'ils étudient en dehors de Séoul. »
L'African Students Community Meeting, un lieu pour comprendre
Cet
événement a permis à la fondation de recueillir l'avis de ces jeunes sur
la façon dont la Corée pourrait développer ses relations avec l'Afrique et sur
les moyens de coopération avec le continent. « Nous avons tourné des clips
de leurs témoignages pendant cette rencontre qui ont été diffusés en décembre,
lors du Korea-Africa Youth Forum, pour partager leur voix », précise la
vice-présidente. Ce forum, dont le thème était « Entrepreneurs for
innovative Partnership », avait plusieurs objectifs : présenter
l'Afrique comme un nouveau marché, encourager les jeunes à créer des start-up,
et intensifier les échanges entre la jeunesse coréenne et africaine. Le Korea-Africa Youth forum devrait d'ailleurs devenir « un rendez-vous
annuel ».
Cette année, la Korea-Africa Foundation a trouvé un
nouveau moyen d'« amener les étudiants coréens à s'intéresser à
l'Afrique » en lançant le Start-up contest ideas. Ce concours invite les étudiants
à proposer un projet de création de start-up lié à l'Afrique. Les étudiants
coréens et africains sont fortement encouragés à s'associer : s'ils le
font, ils obtiennent des points supplémentaires. Les équipes gagnantes
recevront une formation à l'entrepreneuriat et des conseils d'experts, en plus
d'une dotation financière. La Korea-Africa Foundation n'a qu'un an d'existence
et elle se trouve toujours dans une phase de conception et d'ajustement. Malgré
l'ampleur des enjeux, Giyoun Kim garde un certain optimisme.
L'explication : elle croit beaucoup dans la jeunesse africaine, ce que
renforce l'énergie que lui renvoie la personne qui travaille sous ses ordres à
la fondation : jeune avec du potentiel à revendre face aux grands
challenges qui les attendent.