Au Soudan, « Hemetti », le général sanglant qui voulait être roi
Le 3 juin, au petit matin, des
éléments d’une unité paramilitaire soudanaise, la Force de soutien rapide
(RSF), étaient lâchés sur les militants prodémocratie soudanais, endormis aux
abords du sit-in planté face au quartier général de l’armée, à Khartoum. En
quelques heures, humains et tentes, tout fut balayé.
Dans la poignée de vidéos ayant fini par
émerger, on voit les tirs sur des jeunes sans défense, la violence des
tabassages. L’un a la jambe sectionnée au niveau du tibia, d’autres
s’écroulent. Il y aura des viols de jeunes femmes, des noyés, repêchés dans le
Nil. On comptera plus de 150 victimes.
Ce déchaînement colle à la personne d’un
homme qui a fondé toute sa carrière, a bâti toute son ascension, en alchimiste
de cette violence-là : le général Mohammed Hamdane Daglo
« Hemetti », chef des RSF, numéro deux de la junte, le Comité
militaire de transition (TMC). Il avait essayé, pendant une parenthèse récente,
de faire oublier cet ADN. C’est raté.
Le 3 juin fut peut-être son massacre
de trop. Certes il y en avait eu tant, auparavant, de plus graves, de plus
lourds, mais si lointains. Les méthodes des RSF se sont forgées au Darfour, au
Kordofan, ou sur les frontières, sans témoins extérieurs. Désormais,
« Hemetti » (« qu’il nous protège ») ne voulait plus être
boucher, mais faiseur de roi, puis roi tout court, sans nul doute.
Un
regard de loup
Il avait 30 000 hommes sur des
pick-up, assez armés pour la guerre. Ce ne pouvait être assez. Il fallait
ruser, séduire. Se grandir. Lorsqu’il a fait entrer une partie de cette légion
sur ses véhicules hérissés de canons dans la capitale soudanaise, c’est comme
si un chef vandale venait d’entrer dans Rome.