Disparus en Syrie: «Si la coalition anti-Daesh a des informations, nous aimerions les connaître»
- Près de 8.000 Syriens ont été enlevés par Daesh et sont toujours portés disparus.
- Khalil Alhaj Saleh et Maisa Salih n’ont plus de nouvelles de leur frère et de leur sœur depuis leur kidnapping par des membres de Daesh en 2013.
- « Il est inacceptable que les terroristes ne soient poursuivis par la justice européenne que pour les actes qu’ils ont commis en Europe », considère Khalil Alhaj Saleh, frère d’un disparu et fondateur d’une coalition de familles de personnes enlevées par Daesh.
Cela fait bientôt six ans que Maisa Salih n’a plus de nouvelles de sa sœur Samar. La jeune activiste syrienne étudiait l’archéologie en Egypte quand elle décide de passer une partie de ses vacances d’été en Syrie. Le 13 août 2013, alors qu’elle revient d’un déjeuner chez sa tante à Alep avec sa mère et un ami, un véhicule aux vitres teintées vient leur barrer la route.
A l’intérieur, des hommes armés et cagoulés. Ils sortent du véhicule, ouvrent la porte de la voiture dans laquelle se trouve Samar et la kidnappent avec son ami. Une histoire semblable à celle de Firas Alhaj Saleh, kidnappé trois semaines avant Samar à Raqqa. Les familles des deux victimes tentent d’avoir de leurs nouvelles par l’intermédiaire de notables locaux mais n’obtiennent aucune réponse.
Une défaite militaire de Daesh qui ne change rien
Grâce au travail de la coalition internationale anti-Daesh et des Forces démocratiques syriennes (FDS), l’organisation terroriste perd progressivement le contrôle des zones qu’elle occupait en Syrie. Un espoir pour les familles des disparus qui pensent pouvoir enfin obtenir des nouvelles de leurs proches. Mais la victoire militaire ne leur a pour l’instant pas permis d’en savoir plus sur le sort de ces derniers.
« Il est inacceptable que les terroristes ne soient poursuivis par la justice européenne que pour les actes qu’ils ont commis en Europe. »
Début mai, Khalil Alhaj Saleh fonde, avec cinq autres familles, la coalition des familles des personnes enlevées par Daesh. Son but : faire pression sur la coalition internationale afin d’obtenir enfin plus d’informations. « Il faut qu’ils compilent les dossiers et les informations sur les crimes que les membres de l’organisation ont commis sur la population syrienne. Il est inacceptable qu’aujourd’hui ces terroristes ne soient poursuivis par la justice européenne que pour les actes qu’ils ont commis en Europe », estime Khalil.
Maisa Salih, la sœur de Samar, ajoute : « J’espère qu’à travers notre organisation nous pourrons atteindre le plus grand nombre d’Etats membres de la coalition internationale parce que, s’ils ont des informations, nous aimerions les connaître. »
L’espoir d’un jugement
Les familles se tiennent aussi à disposition des Etats membres pour leur apporter leur expertise. Beaucoup de proches de disparus connaissaient les membres locaux qui ont rejoint Daesh. C’est notamment le cas de Khalil à Raqqa. « On connaît ceux qui ont joué des rôles essentiels dans la détention, notamment Abou Lokman. » Certains sont prêts à fournir ces informations aux Etats membres de la coalition internationale en vue d’un éventuel jugement. « Nous espérons qu’ils seront jugés et s’ils sont jugés, nous espérons qu’ils seront jugés pour des actes spécifiques tels que le kidnapping, l’exécution ou les autres crimes qu’ils ont commis », estime Khalil.
L’ancien professeur de philosophie ne compte guère sur le régime syrien pour obtenir des réponses. « Le régime syrien fait partie de ceux qui ont le plus profité de la présence de Daesh. Ceux que le régime n’a pas réussi à éliminer, Daesh l’a fait. Daesh a fait le sale boulot du régime syrien. »