Les preuves sur l'innocence des érudits musulmans de déclarer apostats les gouvernants et les gouvernés

Le livre « L’innocence des érudits musulmans du fait de
déclarer apostats les gouvernants et les gouvernés », d'Abdallah Haggag, remet
en cause les fondements idéologiques des groupes terroristes et islamistes
violents. L’ouvrage de 44 chapitres et de 330 pages, est composé de trois axes
principaux. Le premier explique les principes d’Ahl Al-Sunna wal Djamaa,
le deuxième aborde le Takfir (déclarer autrui apostat) et le troisième axe
parle, quant à lui, de la promotion de la vertu et de la prévention du vice.
L’auteur a mis à profit l’existence de principes
idéologiques communs entre Ahl Al-Sunna wal Djamaa et les groupes terroristes
pour délégitimer ces derniers, et saper leur idéologie, et ce en se basant sur
des interprétations historiquement reconnues du Coran et du hadith. Abdallah
Haggag essaye de démanteler la pensée terroriste et de démentir les prétentions
selon lesquelles les dirigeants des groupes extrémistes détiennent « la
légitimité et la force spirituelle ».
Dans le premier axe, l'auteur explique la doctrine d’Ahl
Al-Sunna et leurs méthodes de déduction. Il consacre plusieurs chapitres
aux autres groupes islamiques qui sont en désaccord avec Ahl Al-Sunna,
soulignant les différences qui existent entre eux. Il accorde une attention
toute particulière aux Kharijites, en expliquant leurs débuts, leurs croyances
et leurs pratiques les plus importantes. Puis il avance des preuves pour
montrer que cette secte est en contradiction avec la tradition authentique du
Prophète (sunna). Haggag considère en effet que les mouvements takfiris
modernes sont « le prolongement idéologique de la pensée kharijite, basée
sur le fait de déclarer apostats les musulmans, de prendre les armes contre les
gouvernants et de cibler les musulmans par des actes de violence et des
assassinats.
L'écrivain montre que les groupes terroristes et les
groupes takfiris sont en totale contradiction avec la méthode d’Ahl Al-Sunna
de faire face aux erreurs des gouvernants et des gouvernés. Ahl Al-Sunna
recommandent l’exhortation et le bon conseil tandis que les Kharijites prônent
la violence comme seule méthode de contrer les erreurs des dirigeants et des
musulmans en général.
L’auteur rétorque à certaines questions équivoques
soulevées par les takfiris. Il répond à la question de savoir si, oui ou non,
il faut déclarer apostat un gouvernant qui n’applique pas la loi islamique
(Charia), en raison de son interprétation de la religion, ou même en raison de
ses désirs personnels. Il n’est en aucun cas permis, selon l’auteur, de le
déclarer apostat, tant que la constitution considère la Charia comme la
principale source de législation.
L’auteur souligne également qu'il n’est pas légalement
permis de critiquer publiquement le gouvernant, car il est le tuteur légal et
lui obéir est une obligation. De même, les critiques publiques peuvent mener à
des conflits nuisibles pour les musulmans qu’il s’agisse d’individus ou de
communautés. L’auteur avance en guise de preuve ce hadith prophétique :
« Celui qui veut conseiller un sultan, qu’il ne le fasse pas
publiquement, mais qu’il le prenne à l’écart et le conseille. S’il accepte son
conseil tant mieux, sinon, il aura fait son devoir ».
La violence dans le changement
L’auteur critique aussi les méthodes de changement
violentes utilisées par certains groupes, considérant que « l’intolérance
et le non-respect des principes moraux sont contre-productifs lorsqu’on ordonne
le bien et proscrit le mal ».
L’auteur mentionne un certain nombre de versets
coraniques et de hadiths, selon lesquels toute personne non musulmane qui entre
dans un pays non musulman, et qui est autorisé à y travailler ou à y pratiquer
le commerce, est soit un pactisé (personne liée aux musulmans par un pacte), ou
un protégé (bénéficiant de la protection des musulmans). Les deux ne peuvent
être agressés d’une quelconque façon. Le Prophète (paix et bénédiction d'Allah
sur lui) a dit: « Celui qui tue un pactisé ne sentira pas l'odeur du
paradis ».
« Celui qui ne respecte pas ces principes porte
atteinte à l'Islam, et le montre comme une religion terroriste et traître »,
reprend l’auteur. Et de s’interroger : « Et si les pays dont les
ressortissants se font assassiner réclamaient la loi du talion et demandaient
l’application du principe de réciprocité ? Les musulmans se feraient alors tuer
de même que les prédicateurs dans ces pays ».
L’ouvrage passe en revue les propos d’Ibn Taymiyya, et
son élève Ibn Al-Qayem, qui sont des références historiques chez Ahl
Al-Sunna wal Djamaa, en montrant qu'ils étaient contre les actes téméraires
sous prétexte d’ordonner le bien et de proscrire le mal, ceci pour ne pas créer
d'autres maux, comme la répression, qui amènent les musulmans et les non
musulmans à répugner la Charia.
Haggag mentionne un certain nombre de fatwas du Cheikh
Abdoul Aziz ben Baz, ancien Mufti d'Arabie Saoudite, dans lesquelles il compare
aux Kharijites ceux qui, poussés par leur ferveur religieuse, se comportent de
manière indisciplinée. En fait : « ils tombent dans un grand péché
en rendant licite le sang illicite sous des prétextes de réforme et de vertu
».
Il cite également les écrits du grand érudit, Nasser
Al-Albani, qui a mis en garde contre le recours abusif au takfir (fait de
déclarer autrui apostat) contre les musulmans qui commettent des actes
contraires à la religion, affirmant que commettre un acte est une chose, et
déclarer quelqu’un apostat en raison de cet acte, en est une autre.
En réalité, de multiples excuses empêchent de déclarer le
musulman apostat comme l’oubli et la contrainte. Il ne faut donc pas faire
preuve d’exagération et juger apostat tout musulman qui commet un acte
contraire à la foi islamique.