Les frères jihadistes Jean-Michel et Fabien Clain, tués en février dernier dans une frappe de la coalition internationale, ont laissé des traces derrière eux. C’est dans un quartier de Raqqa, en Syrie, où ont séjourné la plupart des jihadistes français jusqu’en 2017, que Jean-Michel Clain avait élu domicile avec sa femme et leurs sept enfants pendant plusieurs années.
Carrelage blanc, cuisine équipée, baignoire à jets… Au troisième étage d’un immeuble décati, le jihadiste jouissait d’un appartement confortablement meublé de 100 mètres carré. Tout appartenait à l’origine à un pédiatre de Raqqa. Daesh a tout confisqué, Jean-Michel Clain s’en est emparé. Au pied de l’immeuble, c’est son frère qu’un riverain reconnaît, signe que les deux hommes qui ont revendiqué les attentats du 13-novembre ont séjourné dans le même quartier.
Abou Othman le Français
Dans un couloir de l’immeuble, laissé à l’abandon, des cartons de téléphones satellites et des documents traînent sous les gravats. Ici, un magazine de propagande rédigé en Français dont les deux frères étaient responsables. Là, des cartes d’identité plastifiées et des centaines de serments d’allégeance avec lieu et date d’entrée en Syrie. Un peu plus loin, un registre de comptes long de plusieurs lignes sur lesquelles se succèdent des noms avec les sommes d’argent allouées à chacun.
"Ce sont les montants accordés aux combattants étrangers. Abou Abdallah de Gaza en Palestine, Abou Fares le Marocain… Celui-là il a pris 10.000 dollars", énumère un homme auprès de nos équipes sur place.
Sur l’une des lignes apparaît le nom d’Abou Othman le Français, l’alias de Jean-Michel Clain. Selon le registre, il a touché 5000 dollars pour le recrutement de nouveaux membres. Ces documents de première main, laissés à l’abandon, prouvent le degré d’organisation du groupe terroriste.
Le combat contre Daesh "est loin d’être fini"
Si les deux terroristes, haut placés dans la hiérarchie de Daesh, ont été éliminées par la coalition internationale, le combat contre le groupe jihadiste "est loin d’être fini", a déclaré en mars le général Joseph Votel, chef des forces américaines au Moyen-Orient. Les jihadistes qui désertent le dernier réduit de Daesh à Baghouz, dans le nord-est syrien, "restent largement impénitents, résolus et radicalisés", a-t-il ajouté.
"Ce à quoi nous assistons aujourd’hui, ce n’est pas la capitulation de Daesh en tant qu’organisation, c’est en fait une décision calculée (des jihadistes) pour préserver la sécurité de leurs familles et conserver leurs capacités en saisissant les chances qu’offrent les camps de déplacés ou en se cachant dans des zones reculées pour attendre le bon moment pour une résurgence", a-t-il enchaîné.
Preuve que l'organisation terroriste n’a pas capitulé: fin avril, le pseudo-calife Abou Bakr al-Baghdadi, disparu des radars depuis plusieurs années, a enregistré et diffusé une vidéo dans laquelle il se présente comme pleinement actif.