En Irak, la double peine des enfants-soldats de Daech
Ahmed, Saïd et Mohammed (1) nous reçoivent
dans une petite pièce aux murs gris où s’engouffrent les courants d’air. Une
théière siffle sur un poêle à mazout. Depuis leur sortie de prison, cet hiver,
les adolescents vivent dans ce petit baraquement en bordure d’un camp de
déplacés avec des dizaines d’autres garçons condamnés, comme eux, pour
terrorisme. 1 500 mineurs sont aujourd’hui retenus dans les geôles
irakiennes et kurdes pour appartenance à Daech, selon l’ONG Human Rights Watch
(HRW).À leur libération, ils demeurent surveillés par les services de
renseignement, qui leur interdisent toute communication avec les journalistes.
Des enfants-soldats considérés comme victimes au regard du droit international,
mais jugés coupables par leur gouvernement. Eux racontent être passés aux aveux
sous la torture. Après des semaines d’enquête, La Croix a finalement pu
rencontrer certains d’entre eux.Dans le camp, où se mêlent des familles de
déplacés et quelques dizaines de repris de justice condamnés pour terrorisme,
l’atmosphère est délétère, nos interlocuteurs méfiants. « Daech a encore
une très forte emprise sur beaucoup de jeunes ici, glisse un travailleur
humanitaire. Certains sont toujours en lien avec l’organisation et exercent une
pression sur les autres. »