Après des fuites dans la presse sur Huawei, Theresa May limoge son ministre de la défense
L’histoire
raconte la lente implosion du gouvernement de Theresa May, où la discipline
collective a complètement disparu et où les conseils des ministres sont devenus
de véritables guerres de tranchées. Mercredi 1er mai, la
première ministre britannique a limogé son ministre de la défense, Gavin
Williamson. Elle l’accuse d’avoir fait fuiter des informations venant du
Conseil national de sécurité (NSC), classées confidentielles.
La
fuite remonte au 23 avril. Ce jour-là, le NSC, qui se réunit chaque semaine et
comprend une dizaine de ministres et les représentants des principaux services
de sécurité, prend la décision d’autoriser Huawei à participer à la
construction de son futur réseau de téléphonie mobile 5G. Londres choisit ainsi
de ne pas suivre la ligne dure de Washington, qui exclut entièrement la firme
chinoise. S’il n’est pas naïf sur les risques d’espionnage, le NSC préfère une
approche permettant à Huawei de fournir des équipements périphériques.
Sur
le fond, la décision divise profondément au Royaume-Uni. Mais, sur la forme, il
y a un autre problème : la première ministre n’a rien annoncé officiellement. Pourtant,
dans les heures qui suivent la réunion du NSC, le Daily Telegraph fait
fuiter l’information, avec un degré de précision et de certitude qui permet de
comprendre que la source est l’un des participants.
Rapidement,
les patrons des renseignements britanniques tapent du poing sur la table. Que
les décisions du conseil des ministres sur le Brexit fuitent dans tous les
sens, c’est le problème de la classe politique. Mais, sur les affaires de
sécurité nationale, ils espéraient que la discrétion soit encore de mise.
Etat
de déliquescence avancé du gouvernement
Ouvrant
une enquête interne, Mme May a nommé le coupable mercredi. Dans
sa lettre mettant à la porte son ministre de la défense, elle cite «
des preuves convaincantes suggérant [sa] responsabilité ». «
Aucune autre version crédible des événements (…)n’a été trouvée
», ajoute la première ministre. M. Williamson rejette farouchement
l’accusation contre lui. « Je démens vigoureusement avoir fait partie
de cette fuite et je suis sûr qu’une enquête minutieuse et formelle le
prouverait. » A un journaliste de Sky News, il « jure sur la
tête de [s]es enfants » que ce n’est pas lui.
Ce
dernier soubresaut de la fin de règne de Mme May illustre une
nouvelle fois l’état de déliquescence avancé du gouvernement britannique. «
Une culture de la fuite domine. A l’heure actuelle, on mettrait des caméras au
conseil des ministres que ça serait la même chose. Que cette culture atteigne
même des domaines aussi sensibles que la sécurité nationale est extraordinaire
», se lamente Sarah Wollaston, une ancienne députée conservatrice, qui
a fait sécession en février pour créer un groupe d’indépendants. Tom Watson, le
numéro deux du Parti travailliste, demande une enquête de police, pour savoir
si la loi sur le secret-défense a été violée.