En Libye, les Tripolitains dépités par l’offensive du maréchal Haftar
Mahmoud S. aurait volontiers accueilli à
bras ouverts le maréchal Khalifa Haftar à son arrivée à Tripoli. « Je
le soutenais car je déteste les islamistes, je suis pour un gouvernement fort
qui permette de relancer notre économie en crise », explique cet
homme d’affaires de Tripoli spécialisé dans l’aménagement de cuisines. Il a
pourtant déchanté quand le patron de l’Armée nationale libyenne (ANL) a lancé
le 4 avril ses troupes à l’assaut de la capitale où siège le gouvernement
d’« union nationale » de Faïez Sarraj, reconnu par la communauté
internationale. La bienveillance n’a pas tenu très longtemps.
Aujourd’hui, Mahmoud S. est atterré par la
tournure prise par les événements. Après trois semaines de combats dans les
quartiers périphériques, la nouvelle « bataille de Tripoli » – la
troisième depuis 2011 – a fait près de 280 morts, dont des civils,
1 350 blessés et 39 000 déplacés. « Haftar a
détruit en vingt jours la bonne image que j’avais de lui depuis cinq
ans », soupire l’entrepreneur, assis à son bureau de la salle
d’exposition où s’exhibent cuisinières, placards, tiroirs aux formes et
couleurs variées. La pièce est vide de tout employé et de tout client. Avec
l’usine d’assemblage inaccessible, car située au-delà de la ligne de front à 5
kilomètres de distance, il a dû mettre au chômage technique ses vingt-cinq
salariés.