Espagne : pourquoi les élections législatives anticipées sont décisives
Elles devaient être
organisées en 2020, mais la politique espagnole en a décidé autrement. N'ayant
pas réussi à rassembler de majorité autour de son budget pour 2019,
le chef du gouvernement, le socialiste Pedro Sanchez, a été contraint
en février dernier de remettre en jeu son fragile mandat. Du coup, les élections législatives anticipées qui
se déroulent dimanche 28 avril en Espagne pourraient être décisives pour
l'avenir du pays.
C’est la troisième
fois en trois ans et demi que les Espagnols retournent aux urnes. Et,
cette fois-ci, le scrutin pourrait être historique puisque le parti d'extrême droite Vox
pourrait faire son entrée au Parlement. Franceinfo détaille les enjeux de ces
élections annoncées comme un tournant.
Parce que le chef du
gouvernement joue sa légitimité
Pedro Sanchez n’a
pas été élu pour devenir chef du gouvernement. C’est le mantra de ses
détracteurs issus des rangs de la droite depuis dix mois. Le socialiste issu du
PSOE, le Parti socialiste ouvrier espagnol, est arrivé au pouvoir en juin 2018 après
une motion de censure votée contre son prédécesseur de droite, Mariano Rajoy, leader
du Parti populaire (PP). Il n'a donc pas eu à passer le test des
élections législatives pour accéder à la tête du gouvernement.
Si le PSOE est
donné gagnant à 28,8%, selon une compilation de sondages publiés
par El Pais,
le chef du gouvernement va en revanche devoir former des alliances avec
d’autres partis pour atteindre la majorité absolue de 175 députés. Une alliance
probable avec Podemos, le parti de
Pablo Iglesias, des partis d'extrême-gauche, des nationalistes basques et
catalans pourrait permettre à Pedro Sanchez d'atteindre son objectif.
Une alliance du PSOE avec
Ciudadanos, parti libéral de centre-droit, tentée en vain en 2016, n'a pas non
plus été clairement écartée par le Premier ministre. Mais les libéraux
affirment eux vouloir "le chasser du pouvoir" et ont tendu la main au Parti populaire,
classé à droite. Une majorité formée par le PP, Ciudadanos et le parti
d'extrême droite Vox semble, elle, impossible selon les chiffres issus des
sondages.
Parce que la
crise catalane guette toujours
La fin du bipartisme,
en 2015, a secoué la vie politique espagnole. L'irruptionde Podemos, à
gauche, et de Ciudadanos, au centre-droit, avait abouti à un blocage politique.
Cette instabilité ne s'est pas améliorée depuis : tentatives
d'alliances, motion de censure, corruption, sans
oublier la crise catalane.
Un an et demi après la
tentative de sécession de la Catalogne, le dossier est toujours brûlant et
continue d'animer les débats. Le procès des douze dirigeants
indépendantistes catalans, qui se tient depuis mi-février et
devrait durer jusqu'à mi-mai, alimente aussi la campagne. Il est à l'origine de
la crise budgétaire qui a entraîné les élections anticipées.
Et pour ce scrutin,
Pedro Sanchez aimerait ne pas avoir à compter sur les indépendantistes catalans
pour former une éventuelle majorité. Il a réitéré récemment son refus de tout
référendum d'autodétermination mais promis plus d'autonomie. La droite et
l'extrême droite, qui accusent Sanchez de "trahison" pour être arrivé au pouvoir grâce aux voix des
indépendantistes, ont mené des attaques contre les "putschistes"
catalans, l'un des leitmotivs de leur campagne.
Parce que l'extrême droite
pourrait entrer au Parlement
De
0,2% à 12% : la cote de Vox a bondi dans les derniers sondages, à tel point que
le parti d'extrême droite pourrait entrer au Parlement. Selon les intentions de
vote, Vox est crédité de 30 sièges sur 350. Quasi inconnue il y a un
an, la formation politique a fait une entrée
fracassante au Parlement andalou en décembre 2018. Le chef du parti, Santiago
Abascal, est devenu l'une des figures de ces élections.
Le leader de Vox a
libéré un sentiment nationaliste en sommeil depuis la mort de Franco en 1975.
D'anciens généraux franquistes font ainsi parti des candidats de son
parti. Anti-immigration et ultranationaliste, Santiago Abascal s'en prend
aussi aux féministes. Lors de son dernier meeting de campagne, vendredi à
Madrid, des membres des Femen sont
venues perturber le rassemblement.