Publié par CEMO Centre - Paris
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L'avenir de la relation entre les Frères musulmans le système Wali Faqih (Guide Jurisconsulte)

dimanche 10/juin/2018 - 02:42
La Reference
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Mohamed Mahmoud Mohamed Al-Dabbouli

 

A l’instar des Frères musulmans, beaucoup de mouvements de l'islam politique naquirent dans tous les pays islamiques, en particulier l'Iran, où se propagea rapidement cette tendance politique dans les années cinquante du XXe siècle. Et ce, sous les auspices de «Mirlowhi», mieux connu sous le nom de Navvab-e Safavi ou «Prince des Safavides», chef de l'organisation «Fidayeen Islam».

La propagation des mouvements islamiques est attribuée aux Frères musulmans. Beaucoup d'érudits et de spécialistes des mouvements islamiques font remonter l’apparition du courant de l'Islam politique à l'époque moderne à la période de la fondation de la confrérie, bien qu’il exista tant d’irritations similaires avant sa création.

La chute du Califat islamique (l'Empire ottoman 1299 H - 1924) fut un choc majeur dans l'esprit de beaucoup de penseurs et de personnalités du Monde islamique, où le Califat représentait une sorte de protection de la religion et de son prédicateur. C'est la raison pour laquelle, à sa chute,  de nombreuses personnalités islamiques tentèrent de faire revivre le Califat islamique afin de maintenir la religion et sa propagation. C’est d’ailleurs pourquoi la Confrérie a été fondée en 1928.

A l’instar des Frères musulmans, beaucoup de mouvements de l'islam politique naquirent dans tous les pays islamiques, en particulier l'Iran, où se propagea rapidement cette tendance politique dans les années cinquante du XXe siècle. Et ce, sous les auspices de «Mirlowhi», mieux connu sous le nom de Navvab-e Safavi ou «Prince des Safavides», chef de l'organisation «Fidayeen Islam» (les commandos islamiques).

Selon «Safavi», lors de la création de son organisation, il l’a calquée sur la forme et la méthodologie des Frères musulmans. Il est bien vrai que Safavi ne fut pas le premier trait d’union, ni moins le précurseur de l’islam politique en Egypte et en Iran. Il fut précédé par «M. Ruhollah Mustafa Moussavi» alias Imam Khomeini, qui visita l'Egypte en 1938, et fit la rencontre du fondateur des Frères musulmans «Hassan Al-Banna».

En dépit de la contradiction doctrinale entre la tendance de l'islam politique en Egypte et en Iran, ils eurent néanmoins des points communs, notamment intellectuels, tels que leur vision sur de nombreux concepts religieux et politiques en l’occurrence le concept d’Etat et de gouvernance, ou encore celui d'usage de la violence face aux ennemis de la Nation et le contrôle du monde, et bien d’autres points communs relatifs à certains concepts et notions intellectuels.

Les relations entre les Frères et le courant de l'islam politique connurent, en Iran, plusieurs étapes importantes. Au début, les Frères musulmans étaient en Egypte comme un phare pour le courant islamiste iranien. Et c’est ce qui influença la création de l’organisation des « Fidayeen Islam» (les commandos islamiques), qui est la première graine de la révolution iranienne en 1979 et du système «Wali Faqih», le « guide jurisconsulte », plus tard.

A un stade ultérieur, après le lancement du système «Wali Faqih» (guide-jurisconsulte) en Iran par Khomeini, les relations entre les deux parties prirent différentes formes. Allant de la coopération et du soutien mutuels entre les deux parties, dans un grand nombre de positions, à de vives tensions parfois, notamment avec la montée des salafistes au sein de la confrérie, qui rejetèrent l'idée de tout rapprochement avec les chiites, les considérant comme des ennemis de la nation, qui doivent être évités et dont ils doivent se méfier.

De nos jours, nous constatons que la relation entre les deux parties est enveloppée de mystère, à la lumière des changements actuels que connait la confrérie. Sans oublier les changements régionaux qui imposent aux Frères musulmans certains types de relations.

Ma recherche tournera donc autour de la problématique principale qui est le suivant : Quel est l'avenir de la relation des Frères musulmans et le système de «guide jurisconsulte», compte tenu des changements dont l'Égypte a été témoin au cours des cinq dernières années, ainsi que des changements politiques qui entourent la région? La question antérieure sera traitée à travers les volets ci-après:

•       Les principes intellectuels communs entre les deux parties ;

•       Les étapes du développement de la relation entre les deux parties ;

•       Les futurs scénarios relationnels.

 

Premier volet : Les principes intellectuels communs entre les deux parties

Le système de « guide jurisconsulte »  partage avec les Frères musulmans la plupart de particularités intellectuelles, en raison de la grande influence exercée par la confrérie sur le mouvement islamiste iranien depuis l’ère Navvab-e Safavi jusqu’à Khomeini. La preuve en est que le mouvement islamiste iranien est influencé par l'idéologie des Frères, et le fait que le guide actuel de la Révolution islamique «Ali Khamenei» ait traduit en persan les livres « Fi zilâl al Qur’an » (A l'ombre du Coran) et « Al Mustaqbal li haza al dine » (L'avenir de cette religion). Ces deux œuvres furent des plus importantes jamais écrites par le penseur musulman "Sayyid Qutb".

I. Le concept de Wilayat al-Faqih:

L'État moderne (État-nation) naquit après les « traités de Westphalie 1648» sous les auspices des penseurs du contrat social : «Thomas Hobbes, John Locke et Jean-Jacques Rousseau». Les caractéristiques les plus importantes de ce concept furent en quelque sorte le fait d’écarter l'autorité spirituelle (l'Eglise) de l'exercice du pouvoir politique. Il fut également identifié un grand nombre de fonctions à assumer par l'État: il s’agit notamment de la prestation des services économiques et sociaux et du soutien au progrès et au bien-être des citoyens.

Cependant, à jeter un coup d’œil sur les écrits islamiques sur l'Etat, l’on observe un avis quasi consensuel des penseurs islamiques à travers les âges de l'importance de l'existence de l'Etat comme un moyen de préserver la religion, et que sa mission consiste à faire marcher les affaires courantes et à faciliter la vie des citoyens pour qu’ils se concentrent dans l’adoration du Seigneur de l'humanité. D’où «Ibn Taymiyya» considéra l'Etat comme l'un des devoirs de la religion, sans quoi celle-ci n’existe pas. Tout comme le Wali Faqih est le fait de réformer la religion et d'accomplir la prière.

Selon l’ancienne formule de pensée, les intellectuels de l'islam politique ont au début du XXe siècle reformé les idées d'Ibn Taymiyya relatives au concept d'État. A titre d’exemple, le fondateur des Frères musulmans Hassan Al-Banna souligna dans ses lettres l'importance d'établir un Etat islamique, qui travaille sur l'application de la loi de Dieu dans le pays. Et ce, dans tous les domaines sociaux, économiques et de la défense, afin de rétablir la gloire des musulmans et la renaissance du Jihad, ainsi que pour atteindre le bonheur en appliquant les enseignements de l'Islam. Il souligna également que l'État devrait inclure tous les musulmans sur Terre, dépassant l'idée de l'État-nation moderne, qui a un peuple spécifique vivant sur un territoire spécifique. Il s’agira plutôt d’un État islamique international plus grand.

(Ayatollah) Khomeini réussit à provoquer une révolution majeure dans la pensée politique chiite qui a stagné intellectuellement après la grande absence de l'imam Al-Mahdi. Celui-ci avait rejeté l'idée de désamorcer l'Etat politique jusqu'au retour de l'Imam absent, quand il souligna, dans son livre «Le gouvernement islamique», la nécessité de former un gouvernement qui a la responsabilité juridictionnelle, afin de ne pas briser les dispositions de l'Islam. Ainsi s’inspira Khomeini des idées et arguments d’Hassan Al-Banna sur l’Etat islamique, quand il souligna également que l'Etat est plutôt l'Etat islamique, constitué de tous les musulmans en général et non seulement limité aux musulmans d'Iran. Il  mit aussi l’accent sur la nécessité de faire le djihad au nom de Dieu, de se débarrasser du pouvoir du colon qui a par la force désintégré et fragmenté l'État musulman.

Les propos de Khomeini sont aussi soutenus par certaines clauses de la Constitution iranienne adoptée en 1979, où plusieurs de ses articles ont souligné le rôle de l'Etat dans le développement des bonnes mœurs et la formulation des fondements de la politique étrangère basée sur les normes et les lois de l'Islam, en fournissant un soutien total à tous les opprimés sur Terre. L'article 11 de ladite Constitution a bien établi les propos d’Al-Banna et de Khomeini relatifs à l'Etat, quand il souligna que les musulmans sont une seule communauté, et que le gouvernement devrait travailler pour parvenir à la solidarité entre les musulmans, afin de réaliser l'unité politique, économique et culturelle dans le Monde islamique.

Le fait que Khomeini cite la pensée islamique d’Hassan Al-Banna est dû à un certain nombre de raisons, dont les plus importantes sont les suivantes :

1.           La communication précoce entre les Frères et la tendance islamiste iranienne: Après une période de naissance de la confrérie, Hassan Al-Banna fit la rencontre de nombreux dirigeants et autorités religieuses chiites, à l’instar d’Al Qomy et d'ayatollah Kashani», ce qui eut un impact profond sur la formation de la pensée de Khomeini.

2.                 La simulation des Frères musulmans en Iran: Au milieu des années cinquante, l’organisation «Fidayeen Islam» (les commandos de l’Islam » fut établie par le chiite  Naveed Safavi, qui fit la rencontre de «Sayyid Qutb» et d'autres dirigeants des Frères musulmans au Caire. Il fut fortement influencé par les idées des Frères musulmans jusqu’à ce que, lors d’un sermon, il invita les adeptes de la doctrine chiite Jaafari à se joindre à la Confrérie, en présence de l'observateur des Frères en Syrie, «Mustafa Sibaî». L’influence des Frères dans l'organisation «Fidayeen Islam» se refléta donc sur le suivi de la méthode d'assassinat comme l'un des outils utilisés par ces groupes dans la liquidation de leurs adversaires et leurs opposants. A titre d’exemple, Safavi jugea le penseur laïc Ahmed Kasrawi d’égaré. Ce qui conduisit à son assassinat par deux de ses disciples.

3.                Le pragmatisme intellectuel: Les Frères adoptèrent un style de pensée pragmatique. Notamment le fait de négliger la dimension doctrinale quand il s’agit de traiter avec l'Iran ou les Chiites, en faveur des intérêts de la confrérie et pour s’étendre davantage.

Après le précédent examen du concept d'Etat chez Al-Banna et Khomeini, les conclusions suivantes peuvent être tirées:

1 .Non seulement Khomeini transcrivit les idées d’Al-Banna relatives à l'Etat pour la doctrine chiite, mais aussi il œuvra à mettre en pratique ses idées sur le terrain en « exportant » la Révolution islamique aux pays musulmans voisins, en particulier les pays du Golfe et l'Irak.

2- Le fait que les deux parties essayent d'abandonner la dimension doctrinale afin qu’elle ne soit pas un obstacle à la communication et la viciation du projet islamique, les deux parties eurent des tentatives de rapprochement entre les doctrines. Il est aussi à noter que beaucoup des écrits attribués à la Confrérie ont favorisé la révolution iranienne et dopé l'idée de l'exporter vers les pays arabes. A titre d’exemple, le chef du Mouvement tunisien de la Renaissance Rachid Ghannouchi a souligné que le succès de la révolution iranienne représentait un bond pour la civilisation islamique, et que les vraies tendances du mouvement islamique étaient représentées par «le groupe des Frères musulmans en Egypte», les groupes islamiques au Pakistan et khomenistes en Iran.

3- Les deux parties réussirent à investir le degré de convergence intellectuelle et de mouvance entre elles afin de réformer un discours commun et hostile à toutes les tendances qui leur sont opposées. A titre d’exemple, l’adoption d'un discours hostile à l'Occident, en particulier les États-Unis et Israël, tel que les Frères notamment en Egypte ont adopté un discours hostile à l'Irak pendant la guerre Iran-Irak.

Vu la précédente analyse du concept d'Etat chez les deux parties, nous constatons que l'Etat se distingue clairement par trois caractéristiques principales, à savoir: Tout d'abord, son universalité, ce qui signifie qu'ils sont transnationaux, ne reconnaissant pas les Nations, et tous les musulmans doivent être sous sa bannière. Deuxièmement : cet Etat mondial n’a pas de frontières. Tout territoire où vit un musulman fait partie de l’Etat islamique. Troisièmement : son objectif est de rendre heureux les croyants en appliquant la loi de Dieu sur Terre. L’Etat veille donc à leur confort et leur facilite la vie afin qu'ils se concentrent sur l’adoration du Seigneur.

II – L’excommunuation de la société et l’incitation à la violence:

Le concept de gouvernance et d'ignorance de la société fait partie des concepts racistes les plus importants que produisit la pensée islamiste en Egypte et en Iran. Dans le livre «A l'ombre du Coran» de Sayyid Qutb, qu’a traduit en persan l’actuel guide suprême iranien, l'ayatollah Khamenei, le concept de gouvernance (hâkimiyya) fut répété à environ 77 fois, alors que celui de « Jaahiliyyah » (l’ignorance) y est revenu 555 fois environ. Ce qui marque l'importance des deux concepts et de leur interdépendance dans la pensée fondamentaliste.

En bref, le concept de gouvernance signifie que seul le jugement de Dieu doit dominer sur Terre. Autrement dit, tout ce qui est lié aux affaires sociales et à la gouvernance doit être conforme à la Loi islamique, et la violation de la Charia est blasphématoire vis-à-vis des enseignements islamiques ainsi qu’une sorte de retour en arrière, dans l’ignorance. Compte tenu de ce qui précède, il est donc à constater que les groupes fondamentalistes divisent le Monde en deux parties essentielles : la Demeure de l’immigration et de l’Islam d’une part et la Demeure de l'Incrédulité et de la Guerre d'autre part. La Demeure de l’Islam est celle qui applique la loi de Dieu dans la gouvernance, la politique et les affaires sociales. Tandis que la Demeure de la Guerre et de l’Incrédulité est celle qui ne met pas en application la Loi d’Allah, et la remplace par le droit, œuvre de l’homme.

Ce qui précède met en exergue la triade de la violence au sein des groupes extrémistes. Ce sont eux qui traitent la société d’ignorante en raison de son insoumission à la Loi islamique dans ses affaires quotidiennes. Ensuite le système politique est déclaré incrédule parce qu’il ne propage pas l’Islam et ne le soutient pas. Le résultat final c’est un djihad total contre les apostats et les infidèles dans la communauté, afin d’appliquer la Loi islamique.

Pour leur part, les fondamentalistes iraniens appliquèrent les idées de Sayyid Qutb sur la gouvernance et l'ignorance. Tout commença début 1945 lorsque le mouvement «Fidayeen Islam» dirigé par Navvab Safavi, proche des Frères, jugea le penseur iranien «Ahmad Kasravi» d’apostat et d’égaré suite à ses écrits profanes. Ce qui conduisit à son assassinat le 11 mars 1946. Dans une autre attaque, l’organisation extrémiste tenta d'assassiner l'ancien Premier ministre iranien «Hussein Alaa», ce qui a valu la peine capitale à Safavi en 1956.

Après la révolution iranienne en 1979 Khomeini et ses supporters mirent en place le concept de guide-jurisconsulte afin d’excommunier les sociétés et les gouvernements islamiques, et y soutenir la violence et l’extrémisme. Par exemple, l'Iran khomeniste soutint l'assassinat du défunt président égyptien Anouar Sadate le considérant comme un tyran, tout comme il soutint des mouvements terroristes extrémistes dans les pays arabes, comme Al-Qaïda, le Hezbollah au Koweït et le Hezbollah en Arabie Saoudite, ainsi que son implication dans la guerre régulière contre l'Irak.

Le deuxième volet: les étapes de développement de la relation entre les deux parties:

 

Les relations entre les deux courants fondamentalistes en Egypte et en Iran sont vieilles de plus de 80 ans, depuis la première rencontre du premier chef de la confrérie Hassan Al-Banna avec le guide suprême de la Révolution iranienne, Khomeini en 1938. Depuis lors, les relations entre les deux parties connurent de nombreux types de relations qui indiquent le degré de convergence entre elles, y compris notamment:

1-   La vulnérabilité et la fascination (1938 – 1956)

En cette période le courant fondamentaliste iranien fut fortement influencé par son homologue égyptien, surtout après la visite de Navvab Safavi au Caire dans les années cinquante et sa rencontre avec les éminents responsables de la confrérie, dirigée par «Sayyid Qutb», ainsi que sa création de la fondation de l'Organisation des «Fidayeen Islam», qui représente une simulation de l'organisation secrète des Frères musulmans en termes d'assassinat des personnalités fondamentalistes de l'opposition, telles que le juge Ahmed Khazandar en Egypte, et le penseur Ahmad Khosravi en Iran. Navvab Safavi est l'un des grands supporters de la confrérie en cette période, il invita les chiites de la secte Al-Jaafari à adhérer à la confrérie. Il appela également au rapprochement entre les doctrines islamiques, au rejet de la discrimination doctrinale et de l'intolérance. Il avait même attaqué le défunt président égyptien Gamal Abdel Nasser en raison de son différend avec les Frères musulmans en 1954. Il est à noter que la fin des fondateurs de la Confrérie des Frères musulmans et celle des « Commandos islamiques » (Fidayeen) ont une certaine similitude. Le fondateur des Frères fut assassiné en février 1949, après l'assassinat du Premier ministre (Mahmoud) El Nokrashy Pasha, tandis que Navvab Safavi fut condamné à mort en 1956 après avoir été accusé dans la tentative d'assassinat du Premier ministre iranien Hussein Alaa.

2-   Le transfert des sciences et la traduction (1956-1979(:

Cette phase est l’une des plus prometteuses de l'histoire de la relation entre les Frères musulmans et le courant fondamentaliste iranien, en particulier sur le plan intellectuel. C’est en cette étape que fut traduite en persan la plus importante œuvre de Sayyid Qutb : « Dans l'ombre du Coran », par l’actuel leader iranien (Ali) Khamenei. Elle connut également la publication des écrits politiques de l'Imam Khomeini au début des années soixante, qui furent grandement influencés par les écrits de Hassan Al-Banna et Sayyid Qutb sur l'Etat islamique. Cette idée se manifeste clairement dans le livre de Khomeini «Le gouvernement islamique».

3-        Le soutien (1979-2011(:

Cette période se caractérisa par la nature du soutien mutuel entre les deux parties, qui a commencé en plein milieu de la révolution iranienne, quand le chef des Frères musulmans Youssef Nada évoqua, lors d'une intervention télévisée sur le canal Al Jazeera, qu’une délégation fut constituée pour rendre visite à «Khomeini» lors de sa présence à Paris pour soutenir la position de la révolution iranienne. Aussi faut-il noter que le troisième avion à atterrir à l'aéroport de Téhéran après celui de Khomeini était un avion privé avec à bord une délégation de la confrérie, pour féliciter ce dernier du succès de la révolution naissante. L'Iran a également nommé un officier de liaison dans la ville de Logan immédiatement après la révolution pour être en contact avec les dirigeants des Frères musulmans à l'étranger.

De nombreuses déclarations de soutien des Frères musulmans à la révolution iranienne en sont également une preuve. Notamment la confirmation de l'ancien guide des Frères musulmans Omar Al-Tlemceni du plein soutien (de la confrérie) à cette révolution. Tout comme le leader du mouvement tunisien Ennahdha (la Renaissance) Rachid Ghannouchi a souligné que le succès de la révolution iranienne représentait un bond pour la civilisation islamique.

Le soutien par les Frères musulmans des positions de la révolution islamique iranienne continua pendant la première guerre du Golfe contre l'Irak, où la confrérie a publié une déclaration décrivant le régime baasiste irakien d’athée et de mécréant, et que cette guerre n’était pas une guerre pour libérer les opprimés dans le pays, encore moins pour libérer Jérusalem, mais qu’elle a comme seul objectif de torpiller les mouvements islamiques naissants et réaliser les objectifs des colons américains et sionistes d’une part. Et d’autre part, les Frères soutinrent Téhéran sur la question nucléaire iranienne, en affirmant le droit de l'Iran à posséder le nucléaire qui réponde à ses ambitions.

En échange, l'Iran n'a pas hésité à apporter son plein soutien à  la confrérie en Egypte. Au départ, (le pouvoir de) la révolution iranienne jura hostilité envers le régime égyptien à l'époque du défunt président Anouar Sadate, pour l'accueil qu'il réserva au Shah d'Iran. Aussi célébra-t-il l’assassinat du président Sadate et débloqua une aide financière, logistique et technique pour l'organisation du Hamas palestinien non seulement lors de ses guerres avec Israël, mais aussi lors de ses multiples crises avec l'Autorité nationale palestinienne (ANP), sous le règne de l'ancien président égyptien Hosni Moubarak.

4-     L’oscillation de la relation entre les deux parties (de 2011 à nos jours:(

Cette phase fut caractérisée par une certaine tension dans la relation entre les deux parties, à la suite de nouvelles variables qui surgirent dans leurs relations, bien qu'elles aient à leurs débuts connu le pic de rapprochement entre les Frères et Téhéran.

Lors du sermon du vendredi 4 février 2011 à Téhéran, le guide iranien décrivit ce qui se passait en Egypte comme un modèle de la révolution iranienne. Nonobstant, leurs relations furent rapidement entachées par une certaine tension dans certains dossiers, notamment:

•       Le dossier syrien: le dossier syrien figure parmi les dossiers les plus importants qui causèrent un désaccord important entre la confrérie et le système de Wali Faqih (guide-jurisconsulte) en Iran, Téhéran s’agrippant au régime baasiste syrien dirigé par Assad face à des groupes armés dirigés par des islamistes affiliés aux Frères musulmans. Tandis que la révolution syrienne, les organisations islamiques en particulier, avaient le grand soutien des Frères. Cela était évident dans le discours du Président déchu Mohamed Morsi, quelques jours avant qu’il ne soit déposé, quand il rejeta la présence de l’Iran, représenté par le  Hezbollah en Syrie.

•       Les Frères dans l'embarras : La confrérie fit à plus d’une fois  face à un état d'embarras, causé par certaines politiques iraniennes au Caire. Entre autres, la visite de l'ancien président iranien Ahmadinejad à Al-Azhar Al-Sharif en marge du sommet islamique en février 2013 a causé un certain embarras à la confrérie, vu le symbolisme de la mosquée d’Al-Azhar dans la pensée chiite; la mosquée étant fondée par les Fatimides. Aussi fut-elle embêtée par des rapports de presse relatant les rencontres entre les responsables – tels que Qassem Soleimani, le commandant en chef de la Force Al-Quds (Jérusalem) du Corps des Gardiens de la Révolution Iranienne -IRGC), et les dirigeants des Frères musulmans afin d'aider la Confrérie à s’émanciper. La lettre de certains religieux chiites adressée à Morsi, relative à la nécessité de suivre l'approche de l'imam Khomeini et le Guide-jurisconsulte dans la construction de l'Etat égyptien, mit les Frères dans un grand embarras à l'époque.

•       La domination salafiste de la Confrérie: un courant salafiste parmi les Frères voit la nécessité d'arrêter complètement les relations avec l'Iran, soi-disant que celui-ci représente une menace pour les musulmans.

•       La polarisation turque: Après le succès de la révolution du 25 janvier 2011, il eut lieu une certaine polarisation turco-iranienne vis-à-vis des Frères, mais ils estimèrent que se rapprocher de la Turquie était plus souple que de traiter avec l'Iran, d’autant plus que le système politique turc était apprécié par certaines forces politiques révolutionnaires en Egypte ; à l’inverse du modèle iranien dominé par le système « guide-jurisconsulte ». Raison pour laquelle les dirigeants de la confrérie ont préféré importer plutôt le modèle turc en Egypte.

La position de Téhéran vis-à-vis de la Révolution du 30 Juin et la déposition de Morsi confirment le degré de détérioration des relations entre le système de domination cléricale en Iran et les Frères en Egypte. D’autant plus que la position iranienne fut classée parmi les positions neutres, malgré les rumeurs sur la force des relations entre les deux parties à l'époque du règne du président déchu Mohamed Morsi. «La nation égyptienne va certainement protéger son indépendance inébranlable et sa grandeur de l'opportunisme étranger et de l'opportunisme de l'ennemi dans les circonstances difficiles d'après-révolution», avait dans ce contexte indiqué le porte-parole du ministère iranien des Affaires étrangères Abbas Araghchi. Aussi faut-il indiquer que l'Iran ne figurait pas parmi les pays qui attiraient les membres fugitifs les Frères après le 30 Juin, comme ce fut le cas de la Turquie, du Qatar et de l'Angleterre.

Troisième volet: les scénarios futurs des relations irano-fréristes:

Dans cet axe seront discutés des scénarios futurs des relations entre le Wali Faqih et le régime des Frères musulmans, à la lumière des principes intellectuels communs précédemment indiqués, de l'histoire des relations vieilles d’environ 80 ans, et de leur impact sur la situation politique égyptienne, tant à l’intérieur qu'à l'extérieur du pays. Seront notamment examinés des scénarios dans les rélations entre les deux parties:

I.      «La continuité»: elle figure parmi les scénarios probables actuellement, particulièrement du côté des Frères musulmans. Etant donné que la confrérie est en train de s'isoler vis-à-vis de toutes les crises iraniennes dans la région, en particulier l'ingérence iranienne en Syrie, en Irak, au Yémen et dans les pays du Golfe. La confrérie tente de tirer avantage de la question de Jérusalem pour être le fer de lance de la continuité des relations entre les deux parties, et peut-être que la continuité du soutien iranien au Hamas et au Jihad islamique en est la preuve.

II.     « Le désengagement temporaire »: L'Iran peut recourir à une politique de désengagement temporaire d’avec le groupe des Frères musulmans, en évitant tactiquement de les soutenir afin de leur permettre de se ressaisir, en se présentant comme défenseurs du sunnisme face à l'expansion iranienne notamment dans la région du Golfe et en Egypte, d'une part. Et d’autre part, dans le but de gagner l’amitié du système politique égyptien dans certaines prises de position à l’internationale, en particulier la situation en Syrie.

III.    « La reproduction des groupes pro-iraniens » : L’Iran peut recourir au clonage d'autres groupes alliés, pour qu’ils lui soient subordonnés en cas de désengagement d’avec les Frères musulmans. La preuve en est les tentatives perpétuelles d'expansion chiite en Egypte. Bien qu'il n'existe pas une statistique précise sur le nombre des chiites en Egypte, leur nombre va crescendo.

En définitive, la problématique des relations entre les Frères musulmans en Egypte et le système de Wali Faqih demeure relativement épineuse à cause du grand chevauchement intellectuel et les grands conflits doctrinaux entre eux, malgré la vivacité des deux parties, à se dépasser, à maintes reprises, face aux conflits doctrinaux ; et ce, depuis l’ère de Naveed Safavi jusqu'à présent. Le facteur doctrinal et sectaire restera certes un des éléments déterminants qui influenceraient ces relations. Les Frères musulmans sont compétents dans les manœuvres et manigances politiques. Au moment où ils s’approchent de l'Iran, ils s’approchent également des Etats du Golfe dont les relations avec l'Iran sont caractérisées par la rupture. Il est donc probable que leur stratégie, fondée sur l’équilibre de leurs relations bipartites, essuie un échec cuisant dans la situation politique actuelle, notamment suite au succès de l'Egypte, de l'Arabie Saoudite, des Émirats arabes unis et de Bahreïn dans la formation d'une alliance contre les groupes terroristes et les Etats qui les soutiennent tels que l'Iran, le Qatar et la Turquie. Par conséquent, la confrérie perdrait la confiance de leurs bases politiques dans les pays du Golfe en faveur de l’Iran.

Compte tenu de la souffrance que connaît actuellement la confrérie, pour avoir été incluse dans la liste des organisations terroristes par les pays du quartette arabe luttant contre le terrorisme, il est prévu que les Frères musulmans se rapprochent de plus en plus de l'Iran, à tel point que ce rapprochement pourrait conduire  le système de Wali Faqih à « avaler » la confrérie.

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