Entre Emmanuel Macron et les élus locaux, les relations n'ont jamais été simples. Nouvelle illustration de cette méfiance jeudi après-midi, à l'issue d'un déjeuner à l'Elysée avec les présidents des départements. Tout en se disant ouvert à une «nouvelle phase» de décentralisation, il a averti que cela ne pourrait conduire qu'à «des choix profonds».
«Cela ne peut pas être la perpétuation d'une forme de culture de l'irresponsabilité, où on dit je prend les compétences mais c'est toi (l'État) le payeur en dernier ressort», a-t-il lâché devant ses invités. Et a ajouté, cinglant: «J'entends beaucoup de demandes de compétences et des refus de responsabilités».
Des critiques qui ne l'ont pas empêchées de regretter que ce soit «développé ces 18 derniers mois un discours contre l'État qui nourrit un sentiment dans les territoires qui est mauvais». Emmanuel Macron a poursuivi en affirmant qu'il ne «pensait pas que l'avenir de notre pays se construise dans l'ambiguïté et l'accumulation des strates», laquelle conduit à un «amalgame illisible pour nos concitoyens».
Lors des échanges avec la salle, de nombreux intervenants se sont émus de ne pas avoir les moyens de financer leurs missions (accueil des migrants mineurs, versement du RSA et de l'allocation dépendance,...). D'autres se sont élevés contre l'idée du chef de l'Etat de transférer aux communes une partie des recettes fiscales des départements, comme la taxe foncière ou les droits de mutation sur les transactions immobilières. «Nous souhaitons garder une autonomie fiscale. Nous prendre 20% de nos recettes (...) serait un casus belli», a prévenu le président de l'Association des départements de France (ADF) Dominique Bussereau.
«Drôle de système»
Les collectivités locales n'ont pas été les seules à être brocardées par le chef de l'Etat. Lors de son intervention il s'en est pris aux partenaires sociaux, lesquels tentent sans succès depuis trois mois et demi de trouver un accord pour réformer l'assurance chômage. «On est dans un drôle de système! Chaque jour dans le pays, on dit “corps intermédiaires, démocratie territoriale, démocratie sociale, laissez-nous faire”. Et quand on donne la main, on dit “mon bon monsieur, c'est dur, reprenez-la”. Et le gouvernement va devoir la reprendre, car on ne peut pas avoir un déficit cumulé sur le chômage comme on a depuis tant d'années», a déclaré le président de la République.
Une tirade à laquelle le secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger, a tenu à répondre sur Twitter: «Et si la démocratie ne passait pas par des petites phrases polémiques ou médias interposés? Nul doute qu'elle fonctionnerait mieux dans notre pays». Ajoutant: «La démocratie sociale a souvent prouvé son efficacité et sa responsabilité lorsqu'elle n'est pas soumise à des lettres de cadrage impossibles, menant sciemment une négo dans l'impasse».