Gilets jaunes : la conférence hallucinante de Philippe Argillier, le «Monsieur X» de Maxime Nicolle
«Documents confidentiels», «coup d’Etat» ou
«gouvernement parallèle»… la réunion organisée mercredi par l’une des figures
des Gilets jaunes a été émaillée de multiples théories farfelues.
Maxime Nicolle avait évoqué son existence dans l’une de ses nombreuses vidéos sur Facebook dimanche.
Mercredi soir, au cours d’une réunion au cadre et au contenu plus que
fantaisistes, il a levé le mystère sur l’identité d’un certain « monsieur » qui
prétend détenir « des documents » contenant de quoi faire plier le
gouvernement.
C’est au cours d’une longue conférence
organisée à Nice, dans une salle louée par un Gilet jaune du nom de Jonathan,
que Philippe Argillier s’est présenté au public et a dévoilé ses objectifs pour
le mouvement, en colère depuis plusieurs semaines face au gouvernement et à la hausse
du coût de la vie.
Debout derrière un
pupitre décoré d’un drapeau français, se tenant à la manière d’un homme
politique en meeting, l’homme s’est présenté devant les quelques dizaines de
personnes présentes comme le fils de Charles Argillier. Un ancien élu de la
ville de Nice et commandant local des Forces françaises libres, un groupe de
résistants actifs pendant la Seconde Guerre mondiale. Contactée, la mairie de
Nice n’a pour l’instant pas été en mesure de confirmer s’il est bien le fils de
l’élu.
L’homme, qui se
décrit comme plutôt actif dans la ville de Nice, a été patron de discothèque à
Bruxelles (Belgique) dans les années 1990, selon un article du Soir datant de l’époque. « Prop(sic)
sur lui, Philippe Argillier. Il respire le fric », commentait l’article.
Toujours aussi propre sur lui, d’un ton
solennel, Philippe Argillier s’est donc exprimé mercredi soir pendant plus d’une
heure. La conférence a été relayée par le compte Facebook de Maxime Nicolle,
qui se nomme Fly Rider sur le réseau social. En préambule, Philippe Argillier a
raconté avoir choisi de « se présenter médiatiquement » pour la première fois,
afin de proposer son aide au mouvement des Gilets jaunes. Et a détaillé un CV
aux contours flou, rappelant le synopsis d’un film d’espionnage. « Je suis un
homme qui a créé en 2001 un réseau de consultants auprès du gouvernement à
l’étranger », a-t-il notamment déclaré au début de son discours.
« On a fait appel à moi, en me demandant si
je pouvais aider le pays à restructurer son organisme financier, y compris à
développer le tourisme. J’ai accepté, car se faire solliciter par le
gouvernement en tant que consultant, ce n’est pas tous les jours. Et, en ce qui
me concerne, j’avais un agenda personnel, qui est très proche du vôtre »,
a-t-il indiqué au public.
Car Philippe Argillier admire les Gilets
jaunes, au point de leur assurer que leur mouvement est déclencheur d’un renversement
du gouvernement. « Vous avez fait un coup d’Etat, vous avez fait une révolution
», s’est-il enthousiasmé, sous les huées de certains militants, qui voulaient
marquer leur désaccord. L’un d’entre eux lui a répondu qu’un coup d’Etat se
faisait nécessairement avec l’armée. « Si vous avez pu le faire sans l’armée,
c’est que vous êtes très forts », a répondu le Niçois.
« Sachez qu’il existe un monde parallèle. Un
monde très parallèle. Je le qualifierais peut-être de gouvernement très
officieux », a-t-il également indiqué, précisant qu’étant « sous la plus grande
confidentialité », il lui était impossible de « révéler certaines transactions
». Il a aussi affirmé avoir travaillé pour le gouvernement de 2001 « jusqu’au
31 décembre 2015 », date après laquelle il a décidé de « prendre du recul »
pour « préparer son agenda » prévu « pour la fin 2019 ». Plus tard, il dira
finalement avoir travaillé « pendant 18 ans » pour le gouvernement (au lieu de
14, si l’on se fie aux premières dates fournies).
Mais, rattrapé par
l’actualité des Gilets jaunes, il a décidé de se présenter plus tôt au public,
en faisant venir, « dans sa villa », Maxime Nicolle et un autre Gilet jaune, du
nom de Jonathan (le loueur de la salle où s’est déroulée la conférence), afin
de leur faire consulter des « documents » confidentiels. « Si je venais à vous
montrer certains documents, à cette minute, je peux arrêter maintenant, et ce
n’est plus nécessaire d’aller de l’avant », a-t-il notifié, sans jamais
préciser la nature, l’origine ou le contenu desdits documents.
Maxime Nicolle,
qui s’est aussi présenté au micro, a confirmé avoir vu ces documents et avoir
signé « une clause de confidentialité » qui l’empêche d’en dire plus à ce
sujet. « Pour ceux qui ne sont pas policiers, une clause de confidentialité, ça
empêche de parler, si vous parlez, il y a des poursuites », a-t-il précisé,
pédagogue. « A cette minute, M. Macron est en train d’écouter ce que je dis, à
la virgule près, y compris Édouard Philippe et tout le monde. Ça, je peux vous
le garantir », a aussi complété Philippe Argillier plus tard.
A plusieurs
reprises au cours de la réunion, Philippe Argillier s’est proposé comme une
sorte de « tremplin » pour les Gilets jaunes dans les discussions avec le
gouvernement. « Je prends des risques, mais vous en prenez aussi », a-t-il
certifié au début de la vidéo. « Vous avez la puissance de frappe, j’ai la
puissance d’action », a-t-il fait savoir, une autre fois. Plus loin, il se
décrira même comme un « homme d’Etat du peuple, un homme d’Etat des Gilets
jaunes ».
Ce devoir personnel, Philippe Argillier,
selon une des militantes des Gilets jaunes dans la salle, leur a été présenté
comme un « milliardaire », le manifeste, selon lui, par sa générosité. En
milieu de conférence, il raconte avoir eu l’initiative de racheter « tous les
invendus de tous les Monoprix de Nice » pour les redistribuer aux sans-abri de
la ville. Contactée, la direction du magasin n’a pas encore pu confirmer ou
infirmer ces dires.
Mais pas question pour l’ancien patron de
boîte de nuit d’aspirer à un plus haut poste, malgré les velléités de Maxime
Nicolle. « En ce qui me concerne, jamais vous entendrez de moi que je veux
devenir un jour président de la République de France », a-t-il maintenu. Il a
également rappelé vouloir laisser le choix aux Gilets jaunes de le choisir
comme « tremplin » ou non.
Un choix visiblement contesté par plusieurs
militants dans l’assistante. Après une grosse demi-heure de discours, le ton de
la réunion est vite monté. Plusieurs Gilets jaunes présents se sont disputés au
sujet des questions à poser à l’intervenant ainsi que sur sa légitimité.