Hamouda: La Confrérie n'a pas réussi à se réconcilier avec elle-même. Comment peut-elle se réconcilier avec l'Etat ?
Sameh Abdel-Hamid Hamouda est l’une des figures les plus médiatiquement connues du parti d’Al-Nour, bras politique de l’appel salafiste à Alexandrie, créé en 2011. Hamouda est peu enclin à respecter la politique du silence imposée par Al-Nour à ses membres, ce qui a causé son renvoi du parti en mars 2017. Depuis, il multiplie les apparitions dans les médias, choisissant des sujets controversés, qu’il aborde avec beaucoup d'audace.
Hamouda a révélé l'existence de négociations directes entre lui et Al-Nour afin qu’il réintègre le parti.
Evaluant la performance parlementaire du parti, il explique qu’en dépit du nombre limité de députés dont dispose Al-Nour à la Chambre des représentants, celui-ci a un rôle actif au sein de l’hémicycle. Des députés de différentes tendances ont loué la performance d’Al-Nour, de même que l’électorat, car le parti est toujours présent sur le terrain et est en contact permanent avec les citoyens dans les différentes circonscriptions.
Hamouda pense que le parti d’Al-Nour fait face à une campagne médiatique féroce et systématique de la part de plusieurs mouvements. Les attaques les plus virulentes proviennent des médias des Frères musulmans, qui déploient des efforts pour déformer Al-Nour, et propager des rumeurs autour de lui. C’est pourquoi beaucoup de journalistes dans différents médias mènent une âpre guerre contre le parti.
Hamouda a exprimé son désir de développer la performance médiatique du parti, pour faire face aux défis, soulignant l'extrême faiblesse des moyens dont dispose Al-Nour, qui n'a pas pu jusqu'à présent se doter d’une chaine satellite, et ne peut pas non plus assumer le coût d’un journal.
Concernant le soutien accordé par le parti au président Abdel-Fattah Al-Sisi pour un nouveau mandat présidentiel, Hamouda souligne que l’Egypte a besoin au cours de la phase actuelle d’une personnalité consensuelle, acceptée tant par le peuple que par les institutions du pays. Or, Al-Sissi réunit ces qualités, il est issu de l'armée, et est accepté par les institutions comme la police, la justice, al-Azhar, l'église et autres.
Séparer la prédication de la politique
Hamouda explique dans quelle mesure Al-Nour a réussi à séparer la prédication de la politique. On a souvent reproché au parti par le passé de ne pas séparer les deux champs d’activité. « Le parti a réussi à séparer ces deux domaines. Nous avons un service indépendant pour la prédication (l’association des prédicateurs) et un autre pour le travail politique, qui est le parti, et chaque entité a sa structure et ses hommes », affirme Hamouda.
Concernant la différence entre Al-Da’wah Al-Salafya (l'appel salafiste) et les autres factions salafistes à Alexandrie, il affirme que les salafistes ont plusieurs écoles : « Certains suivent les salafs (prédécesseurs) et s’en tiennent à leur moralité, et d'autres tombent dans la déviation. L’appel salafiste représente la ligne pure qui consiste à suivre l’exemple des pieux prédécesseurs et d’adopter leur méthode. Certains courants salafistes ont dévié et dérivé avec les Frères musulmans. On l’a vu avec Mohammed Abdel-Maksoud, et Mohamed Al-Saghir, et d'autres ».
Concernant sa vision sur l'avenir du parti d’Al-Nour sur les court et long terme, il dit : « Le parti a une popularité remarquable, qui s’est manifestée dans les urnes aux dernières élections législatives lorsqu’Al-Nour a obtenu le tiers des voix en Egypte. Mais le scrutin de liste fermée a gâché toutes ces voix. Il est à rappeler que le parti était seul devant les listes des autres partis en compétition ».
Concernant une éventuelle réconciliation avec les Frères, il s’est interrogé sur un ton moqueur : « Les Frères n'ont pas réussi à réconcilier les parties belligérantes au sein de leur groupe, comment peuvent-ils se réconcilier avec les Egyptiens ?! ».
Il a laissé entendre que la seule issue pour les Frères est de se repentir de leurs crimes contre le peuple égyptien, et de s’engager à renoncer à la violence et à présenter des excuses au peuple égyptien. Les Frères doivent en outre reconnaitre qu’ils ont été la cause majeure de l'insécurité et qu’ils ont permis l’émergence du terrorisme et de la violence. Ils doivent renoncer à leurs idées égarées et fermer leurs chaînes qui déforment la réputation de l'Egypte à l'étranger et donnent refuge à des fugitifs recherchés par la justice.
La Confrérie et l’étape de la disparition
Il a ajouté que les Frères musulmans ont atteint un état de faiblesse et de dislocation jamais atteint depuis sa création, surtout que tous ses leaders sont emprisonnés. Les dirigeants emprisonnés même s’ils n’ont pas d’avis à donner sur une éventuelle réconciliation, peuvent la contester s’ils ne sont pas consultés à son propos.
La Confrérie est aujourd’hui infiltrée, et est soumise à des pressions internes et externes. Elle ne possède aucune carte de pression sur l’Etat et est rejetée par tout le monde.
Hamouda répond à ceux qui l’accusent d’être une personnalité controversée. « Soulever le débat est une chose positive si le but est de corriger des erreurs commises par la population ou de discuter de questions importantes ou nécessaires. Mes propos sont inspirés de ceux de savants dignes de confiance, et j’ai toujours avec moi mes preuves légales pour prouver ce que je dis. Je transmets mes Fatwas des savants fiables, et c'est là un grand domaine, celui de l'appel à Allah», conclut Hamouda.